Bad Tripes - Phase Terminale

Chronique CD album (48:37)

chronique Bad Tripes - Phase Terminale

Sur la papier, rien à redire: le menu de ce 1er opus des marseillais de Bad Tripes met l'eau à la bouche, tous les éléments semblant être exprès réunis pour contenter mes papilles auditives. Jugez plutôt: une chanteuse avec un bon gros grain, une ambiance cabaret gothico-gore déjantée, des cabrioles metallistico-electro-musette, un univers visuel plein de blouses maculées de toutes sortes de fluides corporels peu ragoutants, un patronyme comico-déviant, de l’énergie punk à revendre … C'était plié, j'allais kiffer grave ma race (Sa mère comme ils essaient d'étendre leur lectorat chez Core&Core!) ce « Phase Terminale » au contenu affriolant… En plus les loustics affichent à leur tableau de chasse des concerts un peu partout en Europe, aux côtés de Six Feet Under (ouais?) et de IllDisposed (OUAIIIISSS!!!). Pourtant j'aurais dû me rappeler les sages conseils de ma Tatie Renée: il ne faut jamais vendre les bourses du lapereau avant de l'avoir tué (ou un truc dans le genre …)!

 

Car en effet, si la démarche du groupe est tout à fait louable – et a d'ailleurs tout mon soutien –, j'ai bien peur que le résultat effectif ne soit à des lieues de cet horizon idéal que j'entrevoyais déjà avec gourmandise à la lecture de la feuille promo … Alors je vous préviens tout de suite, un peu à la manière des stickers « Parental advisory, explicit content »: je n'éprouve aucune haine ni aucun ressentiment envers le groupe, je ne suis pas supporter du PSG, et ni le batteur ni le clavier du groupe n'ont – a priori, croisons les doigts – couché avec ma femme, ma mère ou mon père en salopant au passage le canapé du salon. Pourtant les lignes qui suivent vont faire montre d'une certaine véhémence dans le propos, et risquent bien d’être perçues comme un lynchage en règle aux yeux d'observateurs pressés… Alors que ce n'est en fait qu'un simple avis, certes tranché et peu amène, mais sans remontée de bile aucune ni volonté de nuire. Enfin bon hein, ce que d'aucun appellent aujourd’hui une chronique d'album s'appelait à l'origine une critique, alors zou!

 

Que ce soit clair, bien que le groupe développe une image déviante et transgressive, ce qui ressort principalement de « Phase Terminale » est une grande naïveté. Naïveté des textes, naïveté du travail de composition, naïveté de l'interprétation. Allez, pour ne pas remuer trop longtemps le couteau dans la plaie, balançons d'un coup d'un seul la liste complète des griefs: un batteur franchement amateur et démesurément mis en valeur au vu de ses capacités (et paf!), un clavier aux interventions la plupart du temps insupportables (et bim!), une guitare bien présente mais trop souvent utilisée a minima (et chtonk!), des arrangements électro/indus plutôt pauvres (et vlan!), un chant habité qui sort des tripes mais qui passe mal, notamment quand il devient carrément faux (et clac!) et enfin des textes terriblement maladroits dans la forme (un exemple parmi mille autres, sur « Le Bal des Chaises Roulantes »: Seul le tic-tac d'la pendule fait frémisser leurs paupières … Hum, à faire vomisser Bernard Pivot!) … Bon, on arrête là les frais. Je pourrais illustrer chacun des reproches ci-dessus en vous jetant en pâture une demi-douzaine d’extraits tirés de l'album, mais j'aurais alors vraiment l'air de m'acharner comme un sadique sur les phocéens...

 

Et si on redressait à présent partiellement le manche, histoire que ce coucou ne se mange pas violemment le tarmac dans les gencives? Car en effet, outre qu’il adopte une démarche qui – sur le fond – me plaise, le groupe réussit à écrire 3 morceaux franchement sympathiques, dont 2 qui défrichent un terrain relativement peu fréquenté et s’avérant riche en promesses: celui du mélange metal rock joufflu/accordéon (oui je sais, moi non plus à l'origine je n'aime pas cet instrument du diable, mais là ça le fait). Ainsi sur « Alice Über Alles », avec ses accents folkloriques franchouillo(un peu)-bavarois(beaucoup) et son final carrément sympa (à base de « Blitz-krieg in ihrem Arsch - Ta-tatatata-tatatata-tatatata », qui me rappelle un peu les vieux groupes punk français des 80s), et surtout sur l'excellent « Phase Terminale » (qui donne son nom à l'album, ce qui me donne bon espoir que le groupe continue dans cette voie par la suite), le groupe décolle et transforme enfin l'essai. Et en plus de ces deux signaux fort encourageants, l'aventure « Phase Terminal » se termine plutôt bien, « Na Zdorovie » adoptant une attitude slavisante très sympa, avec un piano alerte et une énergie m'évoquant le « Madame Oscar » de la Mano Negra (si si).

 

Certes, sans les 3 morceaux évoqués dans le paragraphe précédent, l'album aurait écopé d’une note frôlant les abymes glacés du 0 degré Kelvin … Mais le potentiel certain des marseillais, l'énergie et la conviction mis par Hikiko Mori dans son interprétation, et la démarche no-futuro-avant-gardiste du groupe me donnent néanmoins envie de croire en l'avenir de celui-ci, et de lui accorder généreusement (!?) les encouragements du jury. A suivre sur le prochain album donc...

photo de Cglaume
le 08/11/2010

5 COMMENTAIRES

kurton

kurton le 08/11/2010 à 21:26:51

Autant je suis fan de trucs barres...autant la c'est ennuyant et je dirais meme embarassant quand j'ecoute ca...

cglaume

cglaume le 08/11/2010 à 22:21:44

Joli résumé :) J'insisterais d'ailleurs plus sur le côté embarrassant que sur le côté ennuyeux ...

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 03/11/2011 à 21:40:16

De bonnes idées plombées par des compos pourries et un son de clavier pénible

legooz

legooz le 30/04/2013 à 14:28:03

pas d'accord du tout avec vous...j'ai trouvé ça original, déviant a souhait et carément malsain,encore plus que ta critique ;) je conseille cette opus aux plus barré d'entre nous et l'envite a bien écouté les textes.

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 30/04/2013 à 19:36:06

Dans le genre barré y'en a pas mal par ici, je te rassure.
Relis le dernier paragraphe de Lapinou, il ne jette pas le bébé avec l'eau du bain : juste des morceaux du bébé.
Après j'aime les gens pas d'accord, moi.

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