Llnn - Deads
Chronique CD album (37:53)

- Style
Postcore - Label(s)
Pelagic records - Sortie
2018 - écouter via bandcamp
Pour la chronique consacrée à Loss, les mots étaient terriblement génériques.
Pour celle de Deads, les mots ne sont pas venus facilement : il se devaient d'être pesés, réfléchis.
Cette fois, il n'est pas question que de musique, mais aussi d'amour.
L'amour, ce n'est pourtant pas ce qui transpire en écoutant ce disque.
Songer à l'apocalypse, au chaos, à la violence, à l'espace (si si !) semblerait plus approprié.
Mais c'est ce que provoque Deads qui fait songer à l'amour.
Tous les signes neurobiologiques sont réunis :
-Accélération et intensification des pulsations cardiaques à chaque fois que l'on se laisse embarquer
-Dilatation de la pupille lorsqu'on associe la pochette à la musique (et le disque / vinyl)
-Gestion de la motricité atteinte : gestes incongrus, hésitations, bafouillements (il suffira de lire cette chro pour le vérifier)
-Euphorie intérieure péniblement contenue (La note en est la preuve flagrante)
Ces "symptômes" peuvent être ressentis à condition de se laisser envahir par les 38 minutes de cet album.
LLNN facilite la tâche avec un son parfait, qu'il ne faudra pas avoir peur de pousser.
Une invitation à gonfler le volume et à s'isoler qui n'est pas gratuite : c'est le meilleur moyen de découvrir les multiples couches sonores de ce disque et de profiter de leurs effets.
Le travail sur le son est tout aussi sensible lorsqu'un ou deux instruments s'expriment : LLNN se distingue par sa capacité à créer des ambiances.
Comme beaucoup de groupes "postcore", les danois s'organisent autour avec un orchestre relativement classique. Une énorme batterie (particulièrement valorisée par la prod'), une basse hyper vibrante (énorme de bout en bout), une guitare extrêmement lourde grattée par un chanteur hurlant.
Mais la personnalité du groupe s'affirme avec le claviériste qui peut faire voyager à des années-lumière en pressant quelques touches. Loin du statut de faire-valoir ou de figurant de luxe, il semble même être le "pivot" de l'équipe LLNN.
C'est à la force du synthé que s'écrit l'ambiance d'un titre. On a parfois l'impression d'entendre les trompettes de l'apocalypse, puis se sentir transporté dans le vide spatial.
Il est donc peu surprenant d'apprendre que les influences du pianoteur soient celles des oeuvres de Science-fiction des 80's ou des sons des jeux-vidéos horrifiques ayant lieu dans l'espace (à la Dead space / Alien Isolation).
On peut se sentir claustrophobe et enfermé au milieu d'un vide infini au bout de ces 10 doigts et quelques touches.
Loss avait effleuré la question, se concentrant principalement sur l'aspect apocalyptique, faisant "vrombir les trompettes" avec un peu de facilité et d'automatisme. À l'inverse, leur EP de 2017, Marks / Traces avait opéré un virage extrêmement ambiant quitte à casser le rythme des titres.
Pour Deads, l'équilibre a été trouvé. Offrant au mutisme les pistes "Civilization" et "Structures", LLNN parvient à poser une atmosphère hyper-pesante qui ne manque pas de mettre en valeur les titres qui les suivent. Quant à l'habillage des compos il coupe le souffle.
Ce climat oppressant, cette lourdeur, cette violence musicale n'est pas sans rappeler la noirceur de Vertikal des Cult of Luna.
On peut même songer à Will haven pour certains sons de guitare.
Un autre parallèle peut-être fait avec le chef-d'oeuvre de Zatokrev : Silk spiders underwater. On y retrouve la même hargne, le même jusqu'au-boutisme...pour se prendre un gros shoot de dopamine).
LLNN a la qualité de la variété si bien que l'on finit par se caler sur le rythme imposé par le groupe lorsqu'il nous prend par la main pour nous emmener là où il le souhaite.
Tantôt postcore pur jus ("Despots"), parfois complètement écrasant à la limite du sludge-doom (avec le titre "Armada" aussi frontal qu'ambiant ou les passages lancinants de "Deplete"), capable d'offrir des passages aériens et légers (pour mieux replonger) sur "Appeaser", LLNN est toujours surprenant en imposant des revirements sonores inattendus.
La fluidité et la facilité avec lesquelles ce disque s'écoute et déroule, marquent la justesse d'écriture des 8 titres et l'importance d'un tracklisting réfléchi comme l'atteste la clôture avec le morceau éponyme.
Ce titre résume à lui seul le disque : il assène un dernier grand coup à l'auditeur (avec un riffing inspiré porté par une section rythmique énorme) accentuant l'amour que l'on a pour lui. On baigne alors dans un cocktail hormonal dominé par l'ocytocine.
Cet amour est toutefois malsain, parce que Deads violente, agresse : le syndrome de Stockholm guette...
4 COMMENTAIRES
pidji le 27/04/2018 à 07:35:41
Un des albums de l'année, tout simplement.
Crom-Cruach le 27/04/2018 à 18:43:41
Faut pas exagérer boss mais il faut reconnaître, par pure honnêteté intellectuelle que eul bouzin possède une prod comme j'aime. Y'aurait eu un titre sur deux en D-Beat, avec un son pareil, que j'aurais choppé une syncope en plus des mycoses.
Black Comedon le 08/09/2022 à 10:15:27
Vu ce mardi en live à Lille avant the Ocean, quelle présence, quelle énergie ça nous a emportait. La capacité à jouer avec les samples est vraiment remarquable et semble être centrale alors que trop souvent les claviers ne sont là que pour amplifier ou boucher les trous.
Pingouins le 08/09/2022 à 19:42:33
@ Black Comedon : ayé, suis jaloux
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