Zatokrev - Silk spiders underwater

Chronique CD album (61:00)

chronique Zatokrev - Silk spiders underwater

Album unique : traitement unique. Ressenti onirique.

 

Une petite île. Une plage, coincée entre la mer et des falaises, bondée de touristes débarqués en zodiaque pour fouler la terre ferme : escale d'un le paquebot de croisière, amarré, au loin.


"Silk spiders underwater" de Zatokrev ou L'apocalypse en 8 étapes.


Au départ il n'y eut que les ténèbres. ("Runaway soul")

 

Un lourd voile noir s'installait et écrasait lentement ce petit bout de terre en plein après-midi.
Un chant grave et diphonique en fond tentait d'apaiser les premiers paniqués : dissocier le corps et l'esprit. Certains y parvenaient à force de concentration et furent salués par des choeurs. D'autres l'invoquèrent encore et encore.
Dès la deuxième minute, plongée dans l'obscurité, la plage ne laissa plus de place à la joie. Tous ne craignaient qu'une chose : que les corps souffrent.
A la cinquième minute, le ton changea. Pour ceux qui n'avaient pas abandonné, il n'était plus question d'invoquer silencieusement mais de l'hurler puissamment : "Runaway soul" ! "Runaway soul !" 
Il y avait urgence. Il y avait la peur. Il n'y avait déjà plus rien à faire.

 

Puis, sur un dernier coup de tom, tout s'acheva, car tout allait commencer. (Bleeding island")

 

Dans un déluge sonore, le sang se mit à couler. 
Tous se mirent à courir : ils fuyaient ce qui ne pouvait leur échapper.
Les guitares hachaient au rythme de la mitraille qui perçait les nuages les plus noirs et traversait les corps en tous points.
Parfois le calme revenait, mais il n'était que passager. Les guitares délaissaient parfois leur violente perversion. 
La frénésie ne dura le temps d'un éclair, mais elle fut dévastatrice et laissa place à d'autres coups de semonce.
Car tout cela n'était qu'un début : les premiers tombés furent les plus chanceux.

 

La peur et l'installation de la folie. ("The phantom")

 

Des frappes sur les toms de ce genre ne pouvaient qu'annoncer une colonne de calamités. Un riff aussi lourd pour la première guitare, lancinant pour l'autre, invitaient une nuée de plaies pendant ce qui n'était finalement qu'une minute de répit. Le ciel se dégageait progressivement mais l'accalmie était trompeuse.
Les ondes musicales se diffusaient autour de corps sans vie et imprégnaient les oreilles des vivants qui avaient déjà perdus la raison.
Un chant résonnait et, à force de répétition, accompagnait les âmes à quitter les carcasses inanimées qui jonchaient le sable. "The phantom" traînait dans les oreilles de vivants qui ne l'étaient plus vraiment.


"La vie qui ne tient qu'à un fil". ("Loom")

 

Sortirent alors de l'eau trois vieilles femmes. Nues, leur peau blanche laissait apparaître des os fins, leurs longs cheveux noirs trainaient sur le sable. Elles marchaient péniblement, au son d'une lourde basse. Courbées, elles portaient sur le dos de grandes hottes en osier.
Elles avançaient lentement mais déterminées, piétinant les cadavres. Médusés, les agonisants turent leurs plaintes. Les vivants encore indemmes étaient à genoux et les observaient les yeux remplis de terreur.
L'inquiétude monta d'un cran lorsque la première vieille se mit à chanter d'une voix que l'on n'aurait jamais soupçonnée aussi puissante pour ce fragile squelette.
Puis, arrivées au milieu de la plage, elles s'alignèrent parfaitement, laissèrent tomber leurs hottes qu'accompagna le batteur par un grand coup sec.
Elles s'agenouillèrent, près de leur grand panier. Chacune sortit une petite bobine de fil de la main gauche qu'elles déroulèrent à la force du poignet qu'un riff haché accompagnait.
L'opération se répéta en rythme, pendant près de deux minutes. Se levèrent alors comme un seul homme, blessés et indemmes, qui n'avaient plus de larmes pour pleurer.
Lentement, les vieilles femmes allèrent chercher au fond de leur hotte. Lorsqu'apparurent leurs mains, pouces et index étaient anelés d'une paire de ciseaux qui coupèrent dans une frénésie funeste des bobines de fils par dizaine.
A chaque coup de ciseau, à chaque fil sectionné, un corps s'enflammait dans des hurlements emmenés par de "Fire ! Fire ! Fire !" à la limite de l'humanité.

 

"Le ciel leur est tombé sur la tête" ("Brick in the sky")

 

Les vieilles repartirent comme elles étaient venues, marchant lentement pour disparaître dans la mer. Le calvaire durait depuis près de 30 minutes.
Une lente et douloureuse marche commenca alors pour les survivants...
Leurs pieds s'enfoncaient dans le sable, chaque pas était une peine. Un violoncelle pleurait la désolation aux côtés de guitares. Les oreilles sifflaient encore de cette terrible demie-heure.
Il n'y avait plus rien à dire. Pour les rares survivants ne restait plus qu'un désir : fuir.


"L'énergie du désespoir" ("Discoloration")

 

On comptait les vivants sur les doigts de la main.
Ils se précipitèrent vers un des zodiaques qui les avait amené pour ce qui devait être une belle halte sur la terre ferme.
Epuisés, mais vivants, ils démarrèrent le moteur sans mal et prirent la direction du paquebot. La délivrance devait être proche...
Pourtant, à mesure qu'ils avancaient et que cette plage maudite s'éloignait, le bateau devenait de plus en plus petit, se tranformant en un point à peine visible à l'horizon.
Le zodiaque tomba à court de carburant. Ils étaient seuls, perdus au milieu de l'océan.

 

L'eau ne dort jamais ("Swallow the teeth") 


Ils sentaient le danger monter : elle s'était installée sous le zodiaque.
Huit fines et longues pattes entourèrent bientôt les flancs du bateau pneumatique. Une immense araignée venue de ces fonds marins damnés creva de ses quatre paires de pointes le dernier abri des malheureux.
Malgré l'agitation de ses proies et l'ondulation de l'eau, elle enfonça avec une impressionnante habileté ses pattes dans la bouche de ses victimes qui, eurent pour dernier souvenir le goût de leurs dents mêlées à leur sang et l'eau de mer. Il y avait alors la fureur, le déchaînement de violence, le désespoir, la mort et le black-metal de Zatokrev
Ils ne furent plus que 4, puis 3, puis 2, puis elles se retrouvèrent face à face.


Epilogue "They stay in mirrors"

 

Tous étaient morts, tous sauf elle, qui avait déjà abandonné l'idée de survivre.
Elle se laissa d'abord aller, puis l'araignée la prit délicatement entre ses pattes, l'enroula dans sa soie et plongea, avec elle, dans les fonds obscurs.
Ses pattes s'actionnaient en rythme avec la musique pour pénétrer dans l'eau et se dirigeait, lentement, dans les profondeurs.
Les gestes étaient là, lourds, mais l'avancée indéniable.
La dernière victime mourut, les poumons gonflés d'eau, le crâne explosé sous la pression de l'eau avec le chant sinistre d'une sirène qui sonnait tel un requiem.
L'araignée gratta le fond, près d'un récif coralien coloré, et y enterra sa prise de guerre recouverte de soie du cou jusqu'aux pieds. Le silence s'installa de nouveau, après une heure d'événements cataclysmiques.
Zatokrev s'était tu. Tout était terminé.

 

 

 

La chro, version courte...et normale : 
-Son béton
-Compos énormes, avec un petit creux sur "Discoloration" qui repose des oreilles mises à rude épreuve.
-Un peu black, un peu sludge, un peu doom, et finalement une personnalité unique.

-On est loin du son de "The Bat, The Wheel And A Long Road To Nowhere" qui était plus black-metal.
-1h magnifique à la fois pleine de hargne, de macabre et de désespoir.

-Dans le Top 10 de l'année 2015.

photo de Tookie
le 26/05/2015

2 COMMENTAIRES

pidji

pidji le 26/05/2015 à 09:20:47

Un des albums de l'année !!!

Eric D-Toorop

Eric D-Toorop le 28/05/2015 à 14:42:08

Impressionnant parce qu'il se détache d'une série sortie cette année dans le même genre... mais y'a un truc plus jusqu'au boutiste chez Zatokrev

AJOUTER UN COMMENTAIRE

anonyme


évènements

  • Devil's days à Barsac les 9 et 10 mai 2025
  • Seisach' 6 les 17 et 18 octobre 2025
  • ULTHA au Glazart à Paris le 27 juin 2025