Shining (nor) - Blackjazz

Chronique CD album (57)

chronique Shining (nor) - Blackjazz

À la rédac, nous avons failli passer à côté de ce Blackjazz venu du froid. Voyez-vous, notre panier se remplit généreusement et parfois en rangeant les courses, il y’a un oubli au fond du sac. Là, le cabas est particulièrement lourd, rigide, difficile à plier. A l’échelle, imaginez un peu de garer le Peterbilt dans l’arrière –cour, ben oui ça accroche, ça râpe les arêtes hein ! La carrosserie est toute belle, reluisante, les chromes rutilants,  bon sang, difficile de passer à côté. L’intérieur, sièges en corps véritables (!), pas de moumoutte sur le volant mais du bois plutôt raffiné, pas un bête Méranti quoi ! Eléments associés à une technique de pointe, une technologie qui respire quand même l’organique. Mais pourquoi cette couleur sombre partout ? A s’y méprendre, on a l’impression de s’installer aux commandes du camion de DUEL, sans la rouille et la poussière. Contact.

 

En 1971, la chaîne de télévision américaine ABC programme une série de films – Movies of the Week –End - . Dans sa politique de diffusion, elle offre un contraste avec des programmes pour enfants, des dessins animés caustiques comme les Pierrafeu ou de la violence en avant-soirée ; les programmes démarrant systématiquement une demi-heure avant la concurrence. Dans cette série de films du Week-End, le jeune Spielberg, alors âgé de 25 ans parvient à glisser son monolithique camion sans visage en tête de l’audimat et surtout dans l’esprit collectif du public. L’œuvre quitte rapidement le petit écran pour contaminer les toiles du pays avant d’inonder 2 ans plus tard le reste de l’occident. Le pitch : un représentant de commerce, interprété par Dennis Weaver, dont la vie est menacée par un poids lourd : tout le film consiste en une longue course poursuite sur les routes du désert de Californie. Le fait que l'on ne voit jamais le visage du chauffeur du camion (on ne voit que ses pieds quand il descend de son véhicule, et parfois son bras) et on ne sait rien de ses motivations, rend la péloche particulièrement terrifiante.

 

 

Pour leur cinquième escapade discographique, les norvégiens de Shining (Nor)  (rien, mais alors rien de rien à voir avec le groupe Black-Metal Suédois) exploitent avec fougue et passion ce sentiment primaire qu’est la terreur. « The Madness and the damage done » (jeu de mots)  qui ouvre les hostilités, oui il ne s’agit pas d’autre chose, résulte en un matraquage en règle des déclinaisons du rock dur. Même, cela va plus loin que ça.  Le raffut mis en place sur quatre albums par Patton, Osbourne, Dunn et Lombardo (Fantômas), brille ici de toute sa quintessence. La force d’avoir de vrais morceaux.  Là, où le propos des américains virait à la parodie et à la poilade, ici on sent le besoin irrépressible d’aboutir, d’approcher l’extrême de toutes les manières.

 

Comme du temps de nos bons vieux vinyles, l’album se divise en deux parties biens distinctes. Une face A dédiée à l’immédiateté (arf !) avec même son single tueur idéalement placé en seconde position « Fisheye » et une partie plus –libre- qui reprend avec « The Madness and the damage done » sous un autre habillage plus heu …électronique ;  Venetian Snares qui se fait tabasser par Cephalic Carnage à moins que ce ne soit l’inverse, oui, je vous parle de terreur. « Blackjazz Deathtrance » qui déboule derrière est tout bonnement une montagne infranchissable, une impression de perdition dans un maëlstrom virulent, inouï avant que progressivement le calme bénéficie pour la première fois d’une place de choix, taraudé par des soubresauts malsains.  A ce niveau de tohu-bohu permanent, on en vient à demander le pardon. Peine perdue.

 

DUEL a provoqué la terreur en reposant sur l’idée que la motivation du serial-killer, invisible, était gratuite ou, à tout le moins inconnue. Ici, tout est conscient.

L’ex Jagga Jazzist,  Jorgen Munkeby est un chercheur. Depuis des disques free-jazz teintés d’Electro jusqu’à la recréation du rock avant-gardiste (Can ou King Crimson), il creuse et repousse le plus possible les limites du jazz et du rock dur utilisant l’élément électronique  comme interrupteur. Shining, le groupe, est une assemblée de musiciens brillants, au fait de leur art sans retenue (écouter la batterie du début à la fin !), libre de toute contingence en totale communion vers leur but ; Cfr la reprise (tiens, tiens !) du « 21st Schizoïd man » du Roi Cramoisi, dantesque.

Blackjazz est un disque exigeant, éreintant, impertinent, difficile qui se doit d’entrer en bonne place dans les livres d’histoires du rock comme une œuvre majeure de l’excellence consommée.

Implacable

photo de Eric D-Toorop
le 24/12/2010

9 COMMENTAIRES

vkng jzz

vkng jzz le 24/12/2010 à 12:02:46

je pense que je passe à côté d'un très bon truc, il faut absolument que j'écoute l'album en entier, ça m'intrigue énormément.

ukhan kizmiaz

ukhan kizmiaz le 24/12/2010 à 12:26:38

Exemple typique du disque que l'on déteste tout de suite, ou que l'on adore. Il n'y aura pas d'entre-deux après une douzaine d'écoutes, je suis encore sous le choc. Fisheye pour commencer, Blackjazz Deathtrance pour bien comprendre de quoi il s'agit et la monumentale reprise de King Crimson pour asseoir son opinion. Oui je suis enthousiaste et en même temps je vais comprendre ceux qui vont détester ce disque. Simplement Hors-Normes

bernard

bernard le 27/12/2010 à 15:34:27

Avant garde ? Hors norme ? Non mais il faut arreter, ce groupe est une vaste blague pour gens en manque de sensation mouillée dans leur slip.
Ce n'est qu'un vulgaire rock moderne avec un vulgaire son moderne en plastique et un trou duc qui veint coller trois notes de sax par ci par là.
Aucune structure musiacale coherente, que du collage minable, aucune ambiance et j'en reste là parce que ça pourrait continuer pendant des heures.

Quand j'attends des gens dire que c'est jazzy, j'en pleure de rire !! A croire que ces gens là non jamais écouté de jazz c'est pas possible.

Allez j'arrete ça sert a rien de perdre plus de temps avec un album aussi pretentieux que conforme (oh oui c'est du conforme travestie en dragqueen) !

Ukhan Kizmiaz

Ukhan Kizmiaz le 27/12/2010 à 15:48:16

On a du dire la même chose de Tago Mago, et de Trout Mask Replica. Je peux admettre que les potards continuellement sur 12 atténue les nuances dans le disque, la faute à un mixage barbare. Si pas d'avant-garde, aventureux en tout cas. Rayon Jazz ça dépend si on se penche du côté de Mongo Santamaria, l'orchestre de Francis Bolland ou Monk.
Mon slip va bien merci.

Jaco bah non

Jaco bah non le 27/12/2010 à 16:49:13

Très bon album pour moi aussi. Et pourtant je suis tout à fait d'accord que ça a très peu à voir avec du jazz ( à la limite, un groupe comme Khanate est plus proche du jazz que Shining, parce que l'improvisationa une vrai place, les tempos (tempi???) sont fluctuants)). Et si on veut un metal qui sonne comme du jazz, faut aller tapper dans le naked city ou Ephel duath (2ême et 3ême Album)

Là, on a, en effet, affaire à un groupe très proche de ce que pourrait être un King Crimson moderne (même si je trouve que sur la reprise, il se sont pas foulés). J'y entend beaucoup d'indus aussi (son du sax traité, son de la batterie) et de la noise (harch ou pas) dans le traitement du son. C'est un peu comme si Merzbow avait produit Jagga Jazzist (qui n'est pas non plus du jazz pour moi..mais bon)

Voyons Bernard, ta note est un peu dure quand même, reservons ce genre de traitement aux groupes de deathcore à mèche !

Ukhan Kizmiaz

Ukhan Kizmiaz le 27/12/2010 à 18:21:24

J'ai lu aussi qu'on les rapproche de Rammstein.
Bien viu pour Naked City. Les "3 notes" de sax ne donnent pas à mon sens la caution "jazz" bien moins en tout cas que la batterie.

bernard

bernard le 28/12/2010 à 13:42:40

Ukhan : Désolé mais pour moi rien de comparable avec Can ou Captain Beefheart (RIP d'ailleurs) qui ont non seulement inventés un son mais aussi une approche particulière de la musique, ce qui est loin d'être le cas avec Shining qui au contraire reste dans une conformité affligeante (pour un groupe soit disant novateur) aussi bien au niveau des structures que du son.
Rien de bien intriguant en tout cas dans ce disque, quant à la batterie je ne trouve pas non plus que le mec se foule (ce qui ne veut absolument pas dire qu'il n'est pas bon attention).
Pour le jazz je serais plutôt Monk que jazz a papi, merci.

Jaco : Assez d'accord avec toi même si Khanate me semble beaucoup ecris et pas très improvisé malgré ce qu'on pourrait croire.
Ma note est dure certes car au delà de ma mauvaise foi legendaire, je n'ai trouvé absolument aucun interet ni ambiance a ce disque, ce qui pour moi le place au niveau de plein de musique insipide (dont en effet le death core de merde (ce qui est un pleonasme))

Ensuite je ne suis pas sur de vouloir entendre du metal avec du jazz, ce sont 2 styles bien distinct et il serait très difficile d'arriver a retranscrire correctement l'ambiance de ces 2 styles.
Alors certes NAKED CITY mais bon ça ne se limite pas au jazz ou au metal, ça n'a justement pas de limite c'est ça qui le fait.
Quant a Ephel Duath, désolé mais pour moi même combat que ce groupe, c'est à dire trop de collages pour pas grand choses.

Ukhan Kizmiaz

Ukhan Kizmiaz le 28/12/2010 à 16:53:37

Merci pour le débat. C'est l'essentiel, on peut scribouiller tenter d'apporter un éclairage, c'est bien lorsqu'il y'a des réactions. Sinon, dans un autre registre, cela me fait penser à Faith No More période Angel Dust et je ne sais pas pourquoi.. le collage insipide peut-être ;-)
Je trouve toujours ce disque bon, éreintant sur la longueur mais vraiment bon.
C'est bien rare qu'il y'a un disque qui m'accroche comme ça. Ça peut faire un peu midinette mais bon y'a plus de 20 ans que je n'ai plus 16 ans.

bernard

bernard le 28/12/2010 à 17:10:35

Oui le débat c'est ce qui est interessant sinon on fait comme certains en disant "c'est de la merde" sans donner un quelconque argument.

Ah FAITH NO MORE j'ai jamais pu encadrer ce groupe, étonnant n'est ce pas eh eh ?

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