Shining (nor) - Without You EP
Chronique CD album (08:59)
- Style
Sirock de pop-corn - Label(s)
Spinefarm Records - Date de sortie
21 juin 2024 - écouter via bandcamp
J’aimerais vraiment pas vouloir donner l'impression d'être un boomer en affirmant que le métale c’était décidément vachement beaucoup bien plus mieux avant, encore moins du haut de mes 27 ans ; la précocité ça n’a quand même pas que du bon. Mais là quand même, avec les récents exploits de Dagoba, While She Sleeps et, en l’occurrence, Shining (les Norvégiens, pas les Suédois post-dépressifs), on peut pas dire que je sois aidé. Qu’est-ce que vous voulez que j’y fasse, moi, si tant de groupe s’obstinent dans les expérimentations foireuses ?
Un incident de parcours ça se comprend tout à fait et on en apprend. Quand il fait la quasi-unanimité, c’est même supposément difficile de fermer les yeux dessus. Même pas besoin de se fier à mon unique point de vue pour cela : un p'tit tour par la plupart des webzines spécialisés qui s'en sont infligé la chronique – CoreAndCo les premiers et j'étais même pas encore là –, puis s'imprégner de la nuance modérant une proportion non négligeable des live reports consécutifs à la sortie d’Animal ne manque guère d'éloquence : l’accueil réservé au virage des meilleurs blackjazzmen du monde dans la pop-rock bideusement synthwavée semble assez éloigné du très positif. Comment alors s'expliquer une telle obstination, surtout une semaine après avoir sorti un live de Blackjazz ?
Un bon point pour eux : le droit chemin, ils suivent obstinément le leur avec une droiture monastique, sans sourciller ni tergiverser vis-à-vis des critiques. Preuve en est, avec la sortie de l'EP Without You, que les roses odorantes et printanières des uns font bel et bien les champignons hideux et vénéneux des autres. En l'occurrence : un EP, trois morceaux pour autant de covers aussi insolites que dispensables de références couvrant Avicii (title-track), Adele (« Someone Like You », sans rire, pour de vrai) et une chanson de Noël des Pogues (« Fairytale of New York », c'est vraiment vrai), engluées dans un sirop de guimauve aux frontières du coma diabétique. Accents rock impersonnels, fragrances industrielles galvaudées dans leur structuration électronique, cassures de rythme au tournant du moindre break, instrumentations réduites au minimum syndical au profit de doigtés synthétiques stériles, fausse intensité dramatique nichée dans chaque incursion vocale... Shining se fait visiblement plaisir, ce qui rend d’autant plus consternant de constater qu’absolument rien ne fonctionne. Même si un certain panache se dessine au cœur de l'énergie que dégage l'EP comme de l'exubérance visuelle que s'est donnée le groupe, vous connaissez le proverbe : mettre de la Chantilly sur de la merde n'en fait pas du Nutella.
Plus le temps passe, plus Shining semble faire table rase de sa singularité en se confortant dans des prises de risques favorisant la rutilance à la prestance. Où la pétulance prend le pas sur la véhémence, où les expérimentations s'engoncent dans un consensuel élagué de toute âme, au point de se débarrasser purement et simplement du saxophone si cher à leur période dorée en-dehors de leurs prestas live. Parce qu'après tout, quitte à avoir honte de son propre virage, autant le laisser pourrir dans sa discrétion et le noyer dans sa nostalgie en rejouant Blackjazz en intégralité quand on passe au Hellfest. Dans ce genre de configuration, ça ne donne même plus spécialement envie d'insister.
Quand on s'obstine à creuser, deux scénarii sont envisageables : la Terre étant ronde – n'en déplaise aux platistes –, on peut, à force, finir par remonter. L'inconvénient quand à la place on trouve du pétrole, c'est que du montage de la derrick à l'extraction du gisement, on se fossilise soi-même à la longue. Plus qu'à naïvement espérer que celui sur lequel est tombé Shining se tarisse plus vite qu'eux-mêmes ne le feront.
8 COMMENTAIRES
cglaume le 21/09/2024 à 11:21:14
Diantre, le fond du trou n’est plus très loin !!
Crom-Cruach le 21/09/2024 à 11:31:09
La conclusion est géniale.
Xuaterc le 21/09/2024 à 12:14:27
En effet cette conclusion est géniale et les norvégiens sont décevants
Aldorus Berthier le 21/09/2024 à 14:55:32
Ah bah ça commençait à manquer de notes en-dessous de 7 sur le zine !
Et en plus je crois que jamais je ne pourrai rêver d'un meilleur compliment de la part de Cromy 💜
Crom-Cruach le 22/09/2024 à 11:36:45
Les meilleurs chro sont parfois rédigées sur les plus mauvais albums.
Wohosheni le 26/09/2024 à 21:20:10
Qu'est-ce que c'est mauvais... heureusement, il y a cette chro pour remonter le moral pendant l'écoute de l'EP !
Pingouins le 04/10/2024 à 22:09:23
Mamma mia je n'avais pas encore pris le temps de l'écouter (et vu les retours ça me faisait un peu flipper), c'est complètement délirant de se dire que c'est les mêmes gens qui ont fait Blackjazz 😱
Aldorus Berthier le 13/10/2024 à 12:13:45
@Wohosheni : Ah bah content qu'elle t'ait remonté le moral, moi l'écrire ça me l'a encore plus plombé 😥
AJOUTER UN COMMENTAIRE