Dionysiaque - Diogonos
Chronique CD album (47:30)
- Style
Heavy Metal du Mont Méros - Label(s)
I, Voidhanger - Date de sortie
15 mars 2024 - écouter via bandcamp
Il ne m'est pas facile d'écrire sur les œuvres des copains. Je le fais parfois, je l'ai fait et le ferai peut-être encore. Mais je ne le fais pas assez. Car si c'est au minimum digne d'intérêt, il n'y a aucune raison que je n'en parle pas, après tout.
Et puis, ici, comme je ne les connais pas tous, les Dionysiaques, peut-être ça va me faciliter la tâche...
En tous cas, je vais chroniquer de façon non linéaire une musique étonnante qui ne l'est pas plus. Nous l'allons montrer tout à l'heure en laissant tomber cette pédanterie de ton qui m'est arrivée là sans prévenir et sans raison.
Donc, déjà : ce n'est pas du Doom, putain. C'est bien plus riche que cela !
Dites Doom et tout le monde va prendre ça pour un truc lent et chiant, alors que non, pas du tout ! C'est pas très lent, parfois rapide, et c'est pas chiant du tout.
Même si, perso, j'aime aussi beaucoup le lent et chiant, ça dépend comment c'est fait.
Regardez-moi ça comment qu'ça commence, on se ballade tranquillement en présentation ''By The Styx'', un mi-tempo Metal posé qui s'arrête pour...
Nom de 'Tieu ! C'est quoi cette voix qui déclââââme ! Avec un accent français à couper au couteau !
Vous voilà prévenus, mais prévenus de quoi ?! Vous qui entrez là, ne perdez pas tout espoir, vous ne faites que commencer un voyage riche d'aventures, une foutue odyssée !
- Paie ta petite monnaie quand-même, avant d'embarquer, hein -
Ça repart sur du Thrash et du Black vénères avec toujours la basse qui bosse bien dans les médiums, qui racle comme il faut. Le son global du disque est nickel, d'ailleurs, bien nature mais ciselé, chaleureux, aussi. La grosse base (basse/batt/guitares sans les voix et les solos de grattes, même si quelques voix live ont été gardées) a d'ailleurs été enregistrée live dans le studio, mecton. Ouch, comment ça joue, frérot...
La voix est ce qui pourra bloquer certains, c'est certain. On ne fait pas dans la demi-mesure, c'est abusé, même. Je me suis même parfois esclaffé de surprise à quelques reprises. Mais abusé, abusé, n'est-ce pas l'essence du Rock, et du Metal, l'ABUS* ? Si. Donc. L'essence de Dionysos, idem c'est l'abus. Et puis, ne devrait-on pas plutôt parler des voix, tant Nathaniel explose tout ici. Tantôt voix de vieillard grognon, ou plutôt carrément Thrash, tantôt voix de gorge hurlée (là ça peut vraiment faire mal aux cordes vocales, 'tention!), tantôt voix déclamatoire ou caricaturale, (par moments, on pourrait croire que Nathaniel, c'est juste le Maître Gims du Metal. J'annonce cela avec grand respect, notez-le vous bien, et ce pour les deux chanteurs en question), y'a d'la matière granuleuse dans l'opulence. Bien-sûr par ici on imagine l'influence de quelques vocalistes issus de formations obscures chères au hululeur en chef, tout en affirmant une belle personnalité, taquinant même le Black Metal plus d'une fois.
Alors, qu'un consommateur de crack** le compare au chanteur de... Ange, excusez-moi, mais je me marre, c'est un peu comme dire que c'est du Doom.
...
Ben quoi ? C'est pas du Doom.
(vas-y je le redis encore ? Cé pa dudoume!)
Bon, pis deux autres dans le groupe se collent aussi au micro pour des voix additionnelles, et un chœur a été constitué, alors ça en jette (éhéh plus personne n’utilise cette expression, je sais), vraiment, c'est riche.
Souvent ça créé une atmosphère enfumée aux émotions ambiguës, les chœurs répondant à la voix principale, c'est très réussi comme l'enchevêtrement vocal à la mi-temps de ''By The Styx'' ou ce passage génial Druide/Chœur de Disciples vers les 5 minutes de ''Vineyard And Ivy''.
Mais oh... OH PUTAIN DE MERDE, STEVE VAI ! Mais qu'est-ce que Steve Vai vient foutre là, dans cet incroyable solo exubérant à la fin de ''Ad Nauseam'' !?!
C'est pas Steve Vai, bébé, c'est Ogma de Manzer en feat., qui se colle deux solos en même temps, entrecroisés, ça marche bien ça pour faire tourner la tête. Surtout que Floyd Rose ou même Whammy (?) dégueulent de partout sur le pantalon ! Ne vous en faites pas, chaque solo isolé devait être très bien, mais deux en même temps, c'est mieux ! Spécialement pour foutre la nausée.
Nausée des guitares, aussi, à la fin de ''Violet Venom'' (référence au casque de Jupiter, dit l'aconit, aconitum napellus ?), une fin de compo plus que surprenante, un éclair de génie, une stridence et une dissonance frénétique, quelle bonne idée ! Accélération torturée sur fond de basse tendue en triolets comme dessert !
Cerise empoisonnée sur le gâteau, la batterie déploie trésors d'énergie et d'idées pour dynamiser des plans, oui bon d'accord tantôt plutôt Doom sur les bords, la basse elle aussi travaille au corps et garde la tension tout du long. On se permettra même quelques blast-beats, allez, (notamment sur le premier titre, direct), z'avez vu comme c'est Doom ?! Les fondations rythmiques sont bien ancrées et bien vigoureuses, y'a rien de mou chez Dionysiaque. (!!!)
Même si... y'a bien du Doom là-dedans, je rigolais, c'est évident dès les débuts de ''Evohe'', très mélancolique (et qui nous perturbera sérieusement les oreilles avec des « Evohe !!! » qui transpercent de traviole), tout comme ''Sparagmos'' avant qu'il ne verse dans le Thrash-Black.
Je parlais de ''Evohe'' et sa mélancolie, en lisant les paroles, je comprends encore mieux les plaintes finales : on parle bien de désespoir, là. Le solo de guitare dans les aigus a un je ne sais quoi de ''Comfortably Numb'', d'ailleurs, pour rester dans des références de la feel good musique.
Enfin, j'insiste, ça joue vraiment très très bien. A tous les niveaux. Mais au niveau des guitares, il y a du romantisme dans la mélodie, parfois, on n'est pas chez Opeth mais presque. Et ça joue très délié et précis, avec un côté presque académique ou classique, trompeur, qui est malmené ou contredit par l'art de la composition et de l'arrangement. Au final, le classicisme se fait péter la gueule par les idées.
Et c'est très bien comme ça. N'étant pas moi-même un adepte du Heavy Metal classique, je reconnais bien de grosses influences, mais sans que ça ne me paraisse relou, jamais. Tout juste je souris un peu par instants fugaces, amusé par tant d'héroïsme, avant qu'il ne se passe quelque chose d'autre qui recentre les débats sur Dionysos et ses adoratrices ou adorateurs, quelque chose de pas cool les amis, faut pas croire que Dionysos, gnagnagna c'est la teuff et boire un bon canon. Enfin, c'est pas que ça. Mort, torture, sacrifice, folie, feu. C'est pas le roi du Zouk, bordel, ni Philippe Katerine putain. Causes-z'en aux Ménades et tu vas voir ! Gare à tes couilles !
« Il apporte la joie et la peur. »
Dieu de la fureur !
(et du jaja, oui, bon...)
Et bref, on retrouvera plein de bonnes idées sur l'entièreté du disque, avec ses moments presque Noise Rock qui passent par là sans en avoir l'air, gardant toujours cette grande fluidité, autre qualité ici vivement appréciée. Encore une fois, le premier morceau-fleuve montre bien cette qualité fluide, des joutes mélodiques se reflétant les unes dans les autres, créant un univers tour à tour presque chatoyant (dans ses textures, c't'une image, la couleur reste noire et violette) et baigné de ténèbres, velours de la nuit contre la dureté rêche des troncs et des racines, la tourbe où l'on s'enfonce recèle de funestes secrets, comme une paire de baskets momifiées, une bouteille de rhum remplie de liquide à bactéries tueuses ou, tiens-donc ?!, un crâne humain... et là-bas des falaises de granit froid d'où d'étranges psalmodies s'élèvent comme des sacs plastique Carouf' emportés par le vent vicieux du Nord ! Vas y je raconte n'importe quoi, faut que ça s'arrête.
Dernier morceau, dernières paroles : « Sur le Styx, un Dieu vient d'apporter la mort. Et a donné naissance à une vie terrifiante. »
Et la boucle est bouclée.
Je terminerai en précisant qu'il y a deux interludes qui ne sont pas de trop pour apporter encore d'autres nuances, que ce soit du Prog-Folk floral à flûte (instrument de Dionysos!), ou un Requiem et une trompette qui ne sont pas là par hasard, malheureusement. Après discussion avec le principal intéressé, j'ai eu confirmation que les notes légèrement fausses sont intentionnelles, tout comme la fragilité et vulnérabilité exprimées. Je sais pas si vous avez déjà essayé de chanter à un enterrement, mais vous voyez l'idée...
J'espère avoir été à peu près lisible, j'avais tellement de choses à en dire que je ne savais plus trop où j'habitais.
Heureux de ma scène locale. Soutiens la mienne, soutiens la tienne. Non je parle pas de nos bites.
(Il fallait que je vous quitte sur un instant poésie, car c'est trop d'émotions).
* Vas-y j'te mets ça en notes çà la fin de la chronique, sinon ça sera encore plus illisible ma connerie. Donc oui, l'abus, prenons un peu de distance : les voix Black et Death, les shrieks et les growls, on peut trouver ça trop abusé et ridicule, facilement, hein. Sans même aller jusqu'au Brutal Death ou au Porno Grind / Gore Grind ! Mais à ce compte-là, Billy Corgan aussi c'est ridicule. Sérieux vous avez entendu comment il chante, comment il couine ? Et que dire d'AC/DC alors ? De Michael Jackson, ah-ha ! Et James Brown ! Et Chino Moreno qui pleurniche en soupirant ! L'exagération fait partie du truc, si vous n'avez pas compris ça, c'est que vous n'avez rien compris à rien. Après libre à nous d'accrocher ou pas à telle ou telle expression vocale. (Mais putain, Billy Corgan, c'est chaud quand-même, non ? Ah bon.)
Et aussi, alors que moi-même je déchire les oreilles des gens depuis des décennies en, hum, chantant n'importe comment et qu'en outre (sans vouloir une seule seconde m'y comparer, hein) j'ai su apprécier les divagations vocales de Mr. Robinson ou de Mme Galas, je serais bien mal placé pour reprocher à qui que ce soit d'abuser avec sa voix. L'abus c'est la vie !
** Comme quoi le crack est un vrai fléau : moi je venais tout juste de le comparer à Maître Gims...
3 COMMENTAIRES
el gep le 21/11/2024 à 11:31:17
Interview à viniir !
Rafff1 le 24/11/2024 à 23:32:04
C'est très bon ça ! Il y a côté claudiquant comme sur les derniers Darkthrone que j'ai bien !
el gep le 25/11/2024 à 19:08:09
Ouais, hein que c'est du bon ?!
"Claudiquant", ahah ?! Peut-être, mais en se tenant bien droit et le regard assuré.
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