Dirty Loops - Beagle
Chronique CD album (22:18)

- Style
Funk flashy canal Motown & more - Label(s)
Autoproduction - Date de sortie
20 October 2024 - écouter via bandcamp
Ne me demandez pas ce que l’on est censé faire dans une « boucle cradingue » (traduction de « dirty loop » approuvée par François Bayrou) : je n’ai jamais eu moi-même de carte de fidélité à la Fistinière, ni n’ai jamais vu la version gonzo hardcore d’Un Jour Sans Fin. Mais manifestement, d’après le trio suédois qui vient à nouveau s’inviter dans les colonnes de CoreAndCo – alors que sur le papier, il n’a rien à y faire – ce genre d’endroit peu hygiénique où l’on se colle la tête à l’envers doit avoir un lien avec la crypto-zoophilie. Et avec les drogues dures, évidemment. Parce qu’après nous avoir fait planer sur le dos de son Phoenix en 2020, Dirty Loops s’en revient avec un autre animal volant tenant plus de la chimère que du passereau classique : le Beagle. Non, pas le chien-chien à sa mémère. Le métis castor (beaver en anglais) / aigle (eagle). À mon avis les loustics ont dû bouquiner l'Île du Dr Moreau sous LSD. Sauf que contrairement à Palmade, ça leur a sacrément réussi.
Mais rembobinons un brin. Il y a 4 ans de cela, l’écoute de l’EP précédent m’avait convaincu qu’on avait découvert la relève conjuguée de Michael Jackson et Stevie Wonder. Or, on a beau aduler Archspire, difficile de ne pas laisser échapper un Rhaa-oh-ouiiii de plaisir face à une aussi brillante flatterie auriculaire. J’étais donc chaud bouillant, en 2021, pour accueillir Turbo, l’album sorti main dans la main avec l'hyperactif Cory Wong. Sauf que ce fut le moment choisi par le soufflé pour – quoi, déjà ? – retomber. Trop sage et tiède cette reprise de « Thriller ». Trop propre sur elle cette collab’. J’aurai juste réussi à en extraire le superbe « Follow The Light », histoire d’ajouter une entrée supplémentaire à ma playlist Deezer Que-Du-Bon-Son-Garçon.
C’est donc un comité d’accueil bien plus modérément enthousiaste que prévu qui a réceptionné ce drôle de castor ailé…
Et soyons franc : mon tout premier mouvement fut celui du recul, assorti d’un « OK, là c’est définitivement mort… ». Car « Run Away », le tout premier titre, s’ouvre sur ce genre de boucle de synthé rappelant le générique de Champs-Elysées (formidaaaaab’ !), ainsi que la grande époque de A-ha et Europe. Les couleurs sont fluos, les étoiles clignotent entourées d’un halo tiède : on est au sommet du crémeux le plus over the top… Sauf que, diantre, ça marche aussi bien et aussi fort qu’à l’époque, quand j’avais tout juste dix piges ! D’autant que les marlous viennent bientôt dynamiter tout ça à coups de bidouillages sonores se situant entre le breakcore lounge et le scratch jazz. Et cette basse, 'di diou : elle est toujours aussi folle ! OK, c'est vrai : le groupe n’évolue plus vraiment dans le Funk à fleur de peau, plutôt dans un hommage ultime aux 80s – vous entendez ce subtil écho sur la batterie à la fin, le même que chez Phil Collins ?
Et crénom, ça fonctionne du feu de dieu !
Blasphème dites-vous ? Brûlez-moi sur la place publique, m’en fous, c’est trop bon !
Le 80s worship continue joyeusement sur « When The Time is Right », avec cette fois un gros supplément d’orchestrations cinématographiques. Là, c’est sûr, on va perdre les derniers poilus qui s’étaient accrochés aux branches pendant le premier titre. Pourtant, cette fois encore, même procédé : les Suédois viennent couper le flot sirupeux à grandes salves de funkeries hybrides bidouillées à la sauce House Music (... on va dire). Et quand l’orchestre calme enfin ses accès de micheldrukerïte, on réussit à flairer de douces vapeurs Soul. Sans compter que les doigts continuent de claquer. Et les enseignes de Broadway de clignoter…
Mais le meilleur est encore à venir. Pas plus tard que sur la troisième piste, balayant les relents un tantinet trop variétoche qui pouvaient jusqu’ici en rebuter certains. Avec « Final Touch », c’est en mélangeant Soul, Funk et Gospel que la dirty family organise la soirée de Noël que Michael Jackson n’a pas eu l’occasion de fêter de son vivant. C’est sûr, on est en train d’écouter un morceau qui aurait normalement dû figurer sur Dangerous, mais qui en a été écarté pour d’incompréhensibles mauvaises raisons. On se trémousse dans la lumière éblouissante, on chante des cantiques comme si on avait toujours cru en Dieu et au Père Noël : on peine à croire qu’une telle superproduction n’a pas remplacé « All I Want For Christmas » sur les ondes !
Et là, BAM : « Going On a Date ». Dans un mode plus expérimental, plus « Synthetic Disco / Funk », plus Michael J. meets Herbie Hancock, les Dirty Loops nous foutent sur le cul. Ce morceau s'impose en effet comme un petit bijou de tension rythmique, un putain d’orgasme funky, un fantasme de fan éclairé de Bruno Mars. Eh oui, les mots reviennent tout le temps les mêmes, les superlatifs se bousculent sans imagination, les comparaisons deviennent paresseuses : il faut dire qu’il est compliqué d’être au top de la chronique quand on ne peut s’empêcher de se trémousser et de glousser tel un jeune collégien débarquant à sa première soirée dansante sans chaperon !
En guise de conclusion, les loustics jouent à nouveau la carte de la reprise. Mais un poil moins convenue, cette fois. Car c’est le « Living For The City » de Stevie Wonder qui se voit joliment relooké pour l’occasion : avec plus de galbe, plus de lumière, plus de volume, plus de jus, ce titre déjà pétillant devient limite explosif. 30% Jazz / 70% Funk / 100% bonnard, l'exercice donne envie de porter des lunettes de soleil jusque dans les toilettes.
Alors oui, malgré ce côté parfois crémeux, limite compatible avec une grille de lecture drukerienne, et malgré un style pas du tout Core, voire répondant à peine aux critères du AndCo, je continuerai de vous bassiner avec les sorties de ces bienfaiteurs de la Mélomanité (ça n'existe pas ? 's'en fout) nommés Dirty Loops. Car ils apportent un peu de ce bonheur non matériel qui, en dépit d'éléments trop souvent déchaînés, permet à tant d'entre nous de continuer d’avancer. Et si j’arrive à convertir même rien qu’une petit poignée d’entre vous, j’aurais le sentiment du devoir accompli !
La chronique, version courte : ils nous avaient fait croire à la résurrection de Michael Jackson sur Phoenix, puis fait douter sur un Turbo moins uniformément transcendant… Avec Beagle, ça y est, Dirty Loops le prouve par Aigle plus Beaver : la réincarnation est un fait. Car on y entend le créateur de Thriller, Bad, Dangerous & co revenir parmi nous sous la forme de trois jeunes Suédois manifestant un talent insolent. Notez que si ce nouvel EP s’éloigne un peu de la pure funkerie le temps de deux premiers titres plus axés « Hommage décomplexé aux néons des 80s », il finit sur un trio pétillant qui vous transportera au paradis des doigts qui claquent, de la chair de poule radieuse, et du bonheur injecté par voie auriculaire.
16 COMMENTAIRES
el gep le 01/02/2025 à 09:10:19
A-Ha avaient pourtant pour eux:
a) un formidable chanteur
a-ha) des super compos
Peuh !
cglaume le 01/02/2025 à 10:54:38
A-ha est un plaisir coupable que j'assume presque 😅
el gep le 01/02/2025 à 11:12:17
"East Of The Sun / West Of The Moon" est un très joli disque de Pop. Ça n'a rien à foutre ici, oui, mais bon...
Coupable de quoi ?! Re-peuh ! Fuck off !
cglaume le 01/02/2025 à 12:19:39
Vous êtes un véritable punk Mr Gep 🙂
Xuaterc le 01/02/2025 à 14:09:24
et que dire de Stay On These Roads?
Xuaterc le 01/02/2025 à 14:13:39
J'étais en Norvège au moment de leur réunion en 2000, c'était la folie!
Crom-Cruach le 01/02/2025 à 21:00:28
Y'a un musée A-Ha à Stockholm.
Ah non c'est Abba.
el gep le 01/02/2025 à 21:53:01
Ah bah non c'est Abba tu veux dire, Ah-ha - ah-ha !
el gep le 01/02/2025 à 21:54:42
...n’empêche que mettre un castor ailé (!!!) sur sa pochette, c'est osé aussi. Je sais pas si c'est Punk mais c'est quelque chose !
(et c'est la seule chose qui donne peut-être vaguement envie d'écouter malgré tout le mal que tu te donnes Glaume, désolé le castor ailé est plus fort)
Pingouins le 02/02/2025 à 09:46:40
La pochette est parfaite oui 👌
8oris le 03/02/2025 à 17:32:18
Je reste certain que le "AndCo" est bien assez inclusif pour cet excellent album!
Je plussoie aussi pour la pochette digne d'un numéro de "La Hulotte" sous acide
cglaume le 03/02/2025 à 17:46:49
🥰🥰
Aldorus Berthier le 05/02/2025 à 09:56:40
... du breakcore, vraiment ?
Garantis-le moi à au moins 99% et jle fais passer au top de ma liste d'attente, vil margoulin.
cglaume le 05/02/2025 à 10:51:03
"entre le breakcore lounge et le scratch jazz"
Faut pas enlever des mots 😝😉
Aldorus Berthier le 05/02/2025 à 11:26:06
Ouais mais y a quand même "breakcore" dedans, merde quoi ! 😍
cglaume le 05/02/2025 à 12:46:45
Va pas trop te montrer le bourichon, hein 😜
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