Ethereal Tomb - When The Rivers Dry

Chronique mp3 (36:27)

chronique Ethereal Tomb - When The Rivers Dry

J’affectionne particulièrement les artistes animés par une cause, ceux pour qui s’exprimer devient viscéral, presque vital. Et c’est exactement ce besoin fondamental, qui m’a saisi à la première écoute de ce When The Rivers Dry aux allures de revendication. Quelques lettres capitales sur la page bandcamp des canadiens annoncent la couleur :

 

INDEGINOUS EXISTENCE IS RESITANCE. LANDBACK.

 

Réclamation sans doute un brin utopiste mais indéniablement courageuse au sein d’un continent qui au fil des générations tend à oublier que ses fondations ont été coulées dans un bain de sang.

 

Après un premier album éponyme en mai 2022 suivi d’un split avec Loose en novembre de la même année, Ethereal Tomb, composé d’Alexandre Senum (chant/guitare) et d’Aidan Weatherall (basse), qui se présentait il y’a peu encore comme un trio (exit le batteur), revient avec ce deuxième effort nous exposer son anticolonialisme (entre autres) à travers un doom/sludge des plus gras. Le crasseux « Save The Man », avec sa rythmique allant constamment de l’avant, ses quelques extraits vocaux à l’habillage plus dépouillés, transpire de rage et s’érige d’ailleurs comme un rejet total du principe d’assimilation :

 

« Blood on the land

Done by your hand

Your claims of sanity

Rooted in supremacy

You have no right

To tell me how I should be »


Alexander Senum, descendant des Premières Nations, dont la voix oscille entre, mal-être, douleur et colère, n’a pas besoin de grands discours pour faire entendre ses arguments. Le phrasé se veut court, percutant, desservi par un chant écorché, toujours intelligible, entrecoupé d’accords lourds et insistants, qui burinent dans nos petits crânes les quelques lignes fraîchement déclamées. Le son est brut, pesant, à la dynamique lente, voire très lente, comme sur « Victim Mentality » où pendant près de trois minutes les seules variations sont limitées à quelques changements de tonalités, avant que le morceau ne mue vers un final encore plus sombre empestant la mise en garde :


« 500 years of resistance

500 more

Fuck your reality

And your fucking victim mentality »


Vous l’aurez compris, la cause indigène affecte particulièrement le duo qui ne reste pas pour autant enfermé dans cette unique souffrance. « Born Into Pain » et « When The Rivers Dry » aborderont respectivement l’incapacité à s’épanouir en marge du système ainsi que le lien inextricable entre capitalisme et écocide :

 

« Through a trail of lies

Ecocide you deny

When the rivers dry

Who is left to cry ? »

 

Malgré la musicalité plutôt uniforme de l’ensemble, une alchimie se forme, entre la gravité des propos, l’interprétation poignante du vocaliste, et l’instrumentation dépressive qui évite de s’enliser. La guitare s’autorisera même quelques décollages sur une piste de clôture aux accents plus psychés (« The Sufferance Of Mourning »), avant qu’un drone saturé ne la ramène six pieds sous terre. A mon humble avis, la fin aurait été parfaite, mais la résurrection aura bel et bien lieu, poussant le titre au-delà des dix minutes.

 

Le titre du préambule, « Face The Facts », défini bien la démarche entreprise par Ethereal Tomb qui à travers ses six nouveaux morceaux (l’intro et « Pure Radiant Energy » n’étant que des samples apportant toutefois une certaine solennité à l’album) nous confronte sans fioritures aux conséquences engendrées par différentes formes d’oppressions. When The Rivers Dry s’adresse directement aux minorités et plus largement à ceux qui préfèrent garder leur lucidité face à la futilité environnante. Mais les messages sont tellement centraux et mis en avant qu’il me semble difficile, sans adhérer un minimum aux idées, de s’enfoncer dans ce disque sombre et engagé.

photo de AdicTo
le 12/10/2023

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