Krvvla - X

Chronique CD album (26:13)

chronique Krvvla - X

Souhaitant promouvoir « la musique étrange, dérangeante et inhabituelle », le label italien Brucia Records est rentré dans mon viseur il y a quelques mois à l’écoute de Concealment, premier jet musical d'ampleur du one man band Knowledge Through Suffering, projet d’Umberto Poncina qui propose un Blackened Death/Doom détonnant. Il panache en effet l’élégance technique d'Ulcerate, l'ambiance atmosphérique d’Aosoth et la brutalité grassouillette de Canniboule. Pas mal du tout… Ce label continuera d’ailleurs à m’intéresser puisque le mois de septembre verra la sortie de Voyance des Polonais de Hegemone, dont le précédent album (tiens, tiens, ils ne sont plus chez Debemur Morti du coup) a fait l’objet de l’une de mes toutes premières chroniques à CoreandCo !

 

Par ricochet ai-je fait la découverte, fort agréable, d’un groupe biélorusse de Post-(Black) Metal : KVVLA. Né en 2015, ce trio a été d’abord un groupe instrumental qui a balancé sa première demo en 2016, avant d’enchaîner les deux années suivantes sur trois EP M, N et Ø. Suite à mes écoutes, 2018 est une année de basculement qualitatif avec une bien meilleure prod’ avec les singles E (19 mn tout de même) puis T (13 mn) l’année d’après. En 2019, le trio est devenu quatuor, le combo s’enrichissant de l’apport significatif d’un chanteur, avant que leur premier long format X (un 8-titres) ne sorte en février 2022. Alléché par les influences mises en avant de Krallice, Au-Dessus (dont il reprenne l’idée de la numération de la tracklist) ou encore Der Weg Einer Freiheit, j’ai été sensible aux lignes, forcément élogieuses, écrites par Brucia Records. Lisez plutôt : « X est une démonstration de talent et d'inventivité : une explosion kaléidoscopique de riffs glacials, d’atmosphères dissonantes et de fureur post-hardcore mélangées à une sensibilité blackgaze – [le tout] visant à transmettre un maelström de désespoir, d’oppression et de tristesse. »

 

Je reconnais très volontiers les qualités de cet album tout autant sur-vitaminé (en 26 minutes, KRVVLA nous ne laisse pas reprendre notre souffle) qu’immersif (l’intro XI et l’outro XVIII aident pour beaucoup). Mais je ne serais pas aussi dithyrambique, en tout cas pas autant qu’à la suite de mes deux/trois premières écoutes. En creusant un p’tit peu, on se rend compte que les Biélorusses souhaitent (seulement ?) arpenter les mêmes sillons que ceux déjà creusés par des formations de BM avant-gardiste, comme Krallice. Ils sont même allés jusqu’à s’en remettre pour le mixage/mastering justement à l’un de ses membres : Colin Marston, patron du studio new-yorkais The Thousant Caves. Mais bon ils ne sont pas les seuls dans ce cas dernièrement, et non des moindres (Imperial Triumphant, Suffering Hour, Aeviterne).

 

La prod’ chiadée par Marston gonfle à bloc la dissonance et la corrosivité du son de KRVVLA, qui parvient à dégager une ambiance d’ensemble particulièrement oppressante. L’enchaînement de titres "XII" et "XIII" est dantesque ! La plus-value de la voix y est réelle, notamment le mix du shriek BM et du chant guttural sur le très bon "XV". Cependant, l’ensemble – surtout lorsque l’on s’approche des derniers morceaux – demeure assez classique et pas suffisamment créatif pour son genre, mais peut-être trop fidèle à des références musicales par trop sagement digérées. Ensuite, les Biélorusses font le choix de revenir à la concision des morceaux, telle qu’elle a été pratiquée lors de la composition des trois EP M, N et Ø. Résultat : on est loin d’atteindre la demi-heure. L’énergie dégagée est puissante certes, mais cela reste bien chiche au total, frustrant même. Terminées donc les larges et prometteuses plages d’expression des singles E (vraiment excellent) et T qui aurait pu (aurait dû ?) trouver un prolongement dans ce « long » format et donner des idées au quatuor fraichement constitué pour accentuer justement l’atmosphère poisseuse et entêtante dont il entend accabler ses auditeurs. Il me paraît donc encore prématuré pour j(a)uger le « talent » et « l’inventivité » de KRVVLA, le second point tout du moins. Mais il ne s’agit-là que d’un premier album ; l’avenir de ce jeune groupe prometteur, à suivre de très près, est devant lui.

photo de Seisachtheion
le 06/09/2022

1 COMMENTAIRE

Xuaterc

Xuaterc le 08/09/2022 à 19:07:41

Terriblement efficace comme BM en effet, mais on sent encore trop le lait au coin des lèvres

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