Le Butcherettes - Cry is for the flies
Chronique CD album (41:20)

- Style
Garage-Pop sauvage - Label(s)
Ipecac Recordings - Sortie
2014 - Lieu d'enregistrement Los Angeles, Etats-Unis
écouter "Your sickness gives me life"
Quand Luc Besson se met en tête de faire un western, début des années 2000, il a en tête d'avoir un duo girl power, un rien déluré. Le produit doit servir, comme souvent, à mettre le pied à l'étrier à l'un ou l'autre de ces poulains. Le résultat, c'est Bandidas avec la sculpturale Penelope Cruz et la ténébreuse Salma Hayek. Le résultat, un film du dimanche (comme souvent) où tout le piquant naturel des maîtresses de cérémonie s'est dilué dans le sable mexicain de Durango.
Teresa Suarez – Teri Gender Bender comme nom de scène, de guerre – la pasionaria qui mène Le Butcherettes a hérité de tout !
Une fois n'est pas coutume, dans ces pages à haute dominante de testostérone, ça va causer d'un album de meuf, mignonne comme tout et qui pour le coup a une fameuse paire de bollocks.
Fort de deux albums passés inaperçus dans nos contrées, Le Butcherettes aura offert, en 2014, la plaque garage-pop sauvage de cette dernière décennie, rien que ça.
Le Butcherettes s'est formé en 2007 autour de Teri et de Auryn Jolene - aux baguettes- à Guadalajara (aussi un nom de guerre!) au Mexique. S'ensuit un Kiss and Kill de bonne facture en 2008 et surtout, un paquet de concerts passionnés et passionnants d'après les observateurs. Les filles se font bonnes copines avec Karen et ses Yeah Yeah Yeahs. Teri et Karen sont souvent comparés dans les papiers de l'époque. Dénonçant les comportements machistes, Teri brandit des balais et porte un tablier ensanglanté sur scène. Et parfois le frigo et le placard y passent avec farine, oeufs, viande, véritable tête de porc. Le groupe se produit en première partie de The Dead Weather, s'ensuit une tournée avec les Flaming Lips, Omar Rodrigez-Lopez (qui enrôle Teri dans Bosnian Rainbows) et Jane's addiction... que des gens sains de corps et d'esprit.
Cry is for the flies fait référence au déménagement de la jeune femme lorsqu'elle quitta son pays pour retourner à Los Angeles. Elle est née à Denver et a vécu de sa prime enfance jusqu'en 2012 au Mexique. Ouep, Teri, c'est le genre de fille qui te fais craquer mais qui t'impressionne tellement que par fierté masculine, tu ne veux pas perdre la face... tu la regardes plus. - Pleurer, c'est pour les mouches -, ça doit pas être simple pour la dame.
On découvre cette voix reconnaissable aux intonations de Karen O, il est vrai, ou encore Johnette Napolitano (Concrete Blonde). On devine l'énergie, même si la prod de Rodriguez-Lopez embellie bien trop l'affaire. Il manque la crasse sous les ongles, et les dissonances pour coller davantage aux lives que l'on peut trouver sur le net. Cette maladie de rendre tout radio-friendly ! Bon ça reste dans l'esprit garage quand même, le piano boogie fou de « Burn the scab » en introduction marque les esprits. « Demon stuck in your eyes » plonge la soul brûlante dans la culotte de Christina Martinez... les 90's sont de retour et Boss Hog aussi, non... tu cherchais le titre pour éveiller ta libido ?
« My child » marque la fin momentanée des festivités. On devine mieux, la théâtralité du personnage. Actrice de sa chanson, et vivant son moment. « Your weakness gives me life » donne le pendant pop de l'entreprise. Le texte est dur mais la mélodie emporte tout et marque son territoire. Imparable. Voilà qu'Henri Rollins débarque pour un spoken world engagé certes mais qui casse méchamment la mécanique du disque. On l'aimerait en plus « Liar » pour le coup. Plus loin on retrouve Shirley Manson (Garbage) pour un titre très... Garbage, une incongruité sympathique sans plus. Les deux titres suivants hésitent entre ambiance garage-cabaret et grande poperie. « Crying out to the flies » démontre les talents de songwriter de l'auteure.
Trop produit pour être tout à fait honnête, la faute à Omar Rodriguez-Lopez, aussi à la basse sur cet album, qui la joue en mode hollywoodien pour être bien certain que sa protégée puisse toucher le plus grand nombre. Par contre, pour qui maîtrise l'anglais, on découvre une vraie plume. Et quand on lui lâche la grappe, on ressent l'énergie vive d'une fille bien de son temps qui sait ce qu'elle veut et qui utilise le créneau de ce bon vieux rock pour partager ses émotions.
Teri Gender Bender renvoie dos à dos les growleuses testostéronées et les divas pop. Son truc à elle, c'est l'énergie et une désarmante sincérité. Small is beautiful.
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