LeiÞa - Sisyphus

Chronique CD album (38:34)

chronique LeiÞa - Sisyphus

L’artiste allemand Noise, originaire de Bamberg, m’a offert un moment fort sympathique cette année avec son projet Kanonenfieber, dont le concept fit alors vibrer en moi ma fibre d'historien, au point de me laisser – d’un souffle – une impression terminale plus franche que celle, pourtant bonne, du dernier 1914. Mon attention lui était donc toute garantie, lorsque la sortie d’un autre projet intitulé LeiÞa a été annoncée pour le 25 juin sous son label Noisebringer Records.

 

Point de Blackened Death/Doom Metal ici, mais un Black Metal atmosphérique conforme aux attentes du fan du genre. Le concept est différent là aussi, aussi sombre certes, mais bien plus personnel et plus introspectif : « Cet album est né du doute et du dégoût de soi. Ce visage pâle qui vous regarde matin après matin depuis le reflet de votre miroir alors qu’il affiche sur vous-même le résultat misérable de votre existence. Vous héritez du goût amer de la bile et de la cendre de cigarette, après un nouveau jour piégé dans le cercle vicieux d’une existence sans valeur. Ce sont ces moments où la certitude vous crache au visage avec un mélange de dégoût et de résistance. Dans des moments tels que ceux-là, soyez bien sûr d'une chose : vous n’êtes pas le seul. » Je conçois tout à fait que le miroir est un support qui met l’homme à l’épreuve, l’occasion peut-être de faire tomber le masque, de faire oublier cet Autre que l’on peut montrer aux autres toute la journée. Une surface de réflexion assez redoutable, un prisme déformant de nos espoirs, de nos fragilités, de nos peurs.

 

Si l’approche conceptuelle est semblable à la musique qui doit en être le réceptacle, cet album, tel une création qui se dérobe au reflet de son créateur, nous promet alors un beau moment de projection, d’identification et d’introspection. On traverse, il est vrai, ce Sisyphus de manière fort agréable, sans que celui-ci exige un tunnel attentionnel trop prononcé. Soulignant un réel effort de composition, les bons titres sont là et en premier lieu le plus long d’entre tous : "Endlos". L’intensité de "Der Feind lebt in mir" rend également hommage à la force des paroles. À rebours, d’autres morceaux, parfois rabotés à 3-4 minutes, convainquent moins ("Sterben um zu sterben", "Gib mir Heimat"), au point qu’à l’issue des presque 40 minutes de Sisyphus, la trace mnésique demeure tout à fait menue.

 

Le timing de la rédaction de cette chronique n’est peut-être optimal, car dresser la cartographie des sorties marquantes en cette fin 2021 m’oblige à insérer LeiÞa dans l’arborescence hautement qualitative des sorties BM de cette année. Or, les propositions fortes sont ailleurs, ne serait-ce que celles défendues par Grima, Mare Cognitum, Aara, Ethereal Shroud, Gráb, Panopticon, Der Weg Einer Freiheit, Sol Sistere, Gloosh, etc. etc. etc. Moi qui ai méchamment poncé Menschenmühle, j’ai eu du mal à me départir de cette impression tenace, celle que le premier long-format de LeiÞa n’est que le (simple ?) prolongement atmosphérique de Kanonenfieber… Cela me semble flagrant sur "Prometheus".

 

À voir si je me suis complètement égaré, alors même que Noise vient d'annoncer pour mars 2022 la sortie d'Impious, troisième pièce antireligieuse de son projet le plus ancien : Non est Deus.

 

photo de Seisachtheion
le 27/12/2021

1 COMMENTAIRE

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 27/12/2021 à 11:12:37

Quelle radinerie sur la note: un bon 8 perso pour l'atmosphère et l'application classique des compos..

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