Marxthrone - Total Dialectics
Chronique CD album (39:44)

- Style
Black frostbitten anarchosatanist metal - Label(s)
Autoproduction - Date de sortie
24 avril 2023 - Lieu d'enregistrement Chez eux (Andalousie) à l'hiver 2023
- écouter via bandcamp
« - Oui, j'entends bien ce que tu dis, mais... est-ce que tu connais... MARX THRONE !?! »
« - ... »
Suite à ce petit tip de « comment détourner une conversation ni vu ni connu » gracieusement offert par la rédac' de CoreandCo, je vous pose donc la question : est-ce que vous connaissez Marxthrone ?
Malgré les chaleurs ardentes de l'été, vos fines connaissances en musique n'auront probablement pas été altérées et vous aurez sûrement perçu la (vraiment très) subtile référence à un petit groupe de la fin du millénaire dernier, du côté nordique de la vie.
C'est pourtant de contrées (beaucoup) plus méridionales que sont originaires Marxthrone, puisque c'est de la région de Séville en Andalousie que naît ce projet. Et en particulier, le groupe indique venir de Marinaleda, un village à une centaine de bornes à l'est de la grande ville andalouse et qui a ancré son fonctionnement dans un héritage libertaire et anticapitaliste, qui en fait le village d'Andalousie avec le plus bas taux de chômage, des services accessibles à bas prix à tous et toutes.... Si je mentionne cela en particulier, c'est parce que j'ignore si le groupe est effectivement originaire de Marinaleda, ou bien s'ils l'indiquent sur leur page comme un clin d'oeil, un de plus au milieu des multiples références aux idéologies révolutionnaires.
Ce qui avait commencé il y a quelques années comme une sorte de projet « blague » avec un premier EP A Blaze in the Western Sky, illustré de façon très à propos par un Marx grimé de war paints (voir l'image de la fiche du groupe, ou leur bandcamp) en bousculant évidemment A Blaze in the Northern Sky de Darkthrone d'un petit jeu de mot espiègle mais cohérent avec le projet (à ce moment-là de la chronique, si vous n'aviez pas compris, c'est juste que vous n'écoutez pas du tout de black metal, parce que même moi j'avais la réf), c'est cette fois sur Total Death que se jette le pastiche pour en faire ce nouvel album, toujours aussi orienté, qu'est Total Dialectics (et ce bon vieux Engels sur la pochette, salut!).
Et si de prime abord on pourrait se dire qu'il serait trop caricatural au vu de l'imagerie déployée suite à ce qui pourrait n'être qu'une mise en abyme d'un jeu de mot, il n'en est rien. Total Dialectics est un très bon album de black metal, selon mes relativement piètres connaissances en la matière, qui va chercher différents recoins des arts sombres pour articuler le très sérieux de son propos (il suffit d'aller faire un tour du côté des paroles), en plus de celui de sa musique, quand bien même la forme est chargée d'humour.
Musicalement, on trouvera essentiellement cet humour dans les samples employés en début de plusieurs des morceaux, sinon, on est dans un niveau de rigolade mine de rien proche de zéro : un black souvent assez raw et tendu porte la plupart des morceaux, mais Marxthrone font tout de même suffisamment d'écarts à la droite gauche ligne du black metal pour qu'on ne s'ennuie pas, que ce soit en variant les rythmiques et les approches sur leurs plus longs morceaux (« Dialectics of Human Nature », par exemple, qui vient frôler la barre des dix minutes par le haut de son ambiance mid tempo bien sombre au début et qui prend le temps de se construire jusqu'à de gros blasts et un riff avec un beau son bien rond et chromatique ensuite ; ou le plus posé « Clandestine Chronicle From Catalunya » qui va tendre plutôt vers le black atmosphérique) ou en faisant de vrais pas de côté.
Marxthrone se payent par exemple le luxe d'insérer un riffing qui groove (oui !) dans sa recette, avec de savantes doses de gras deathophile (la fin du morceau bagarre « Astroturf Fields », et surtout « Red Star » qui s'ensuit) ou d'aventures blackpunk (sur les mêmes morceaux), en plus d'avoir un son de caisse claire qui me renvoie souvent au côté punk de la vie.
Bref, vous l'aurez compris, j'ai vraiment apprécié cet album, mais je n'y bitte pas grand chose en black metal quand celui-ci ne va pas se perdre dans des expérimentations ou des chelouseries en post-machins, aussi attendrai-je volontiers un regard plus expert de la part de mes confrères Xuaterc ou Seisachteion, ou le vôtre, histoire qu'un peu de dialectique jalonne la journée.
Oh, et puis l'album est autoproduit et disponible à prix libre, alors si le matérialisme dialectique vous parle, passez un peu du côté du matérialisme réifié, même si c'est sous format numérique, histoire que Marxthrone puissent accumuler tranquille un peu primitivement du capital.
Voilà tout. Il me semble que je suis obligé de clore cette chronique-incantation avec les paroles du premier morceau « Secular Magick » :
« Casting spells through digital recitations
/ Infusing sigils with Marxist and Anarchist vibrations
/ Ink the book of shadows with the blood of fascist hogs
/ Incantations must be closed with: Nazi Punks Fuck Off ».
A écouter si, à défaut de casser des briques et de combattre l'aliénation par des moyens aliénés, on a résolu la question de l'organisation.
4 COMMENTAIRES
cglaume le 31/10/2023 à 10:12:14
J’adore ce genre de détournements !! ❤️❤️🤘
Arrache coeur le 31/10/2023 à 11:31:08
C'est énorme haha. J'avais découvert ça quand je m'étais plongé dans le black metal antifa ; très content de voir ce projet chroniqué ici ! 😄
Crom-Cruach le 01/11/2023 à 19:05:20
Contre toute attente ça envoie vraiment pas mal et c'est fun en plus sur le fond.
Crom-Cruach le 01/11/2023 à 19:10:26
Et j'aime forcément la référence aux glorieux DEAD KENNEDYS.
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