State Faults - Children Of The Moon

Chronique CD album (01:02:24)

chronique State Faults - Children Of The Moon

Si l'on excepte un alignement fugace des astres au travers d'un EP de ré-enregistrements (Moon Sign Gemini) en 2020, cela faisait cinq ans que l'éclipse obscurcissait le ciel au-dessus de l'activité de State Faults, depuis la sortie de leur très chouette album Clairvoyant, dont la pochette avait de plus le mérite de rester bien ancrée en tête. C'est forts d'une quinzaine d'années de carrière et agrémentés d'un quatrième membre qu'ils nous présentent aujourd'hui Children of the Moon, leur nouveau – et long – disque.

 

Pour celles et ceux qui auraient trop chaud et voudraient aller direct à l'essentiel, vers ce bon vieux FFO ou name-dropping des familles, je vous livre en pâture en vrac : Frail Body, Gospel, Circle Takes The Square, Glassing, Touché Amoré, City Of Caterpillar. Allez en paix.

 

Pour les autres, on essayera quand même de développer quelques paragraphes autour, histoire de faire semblant d'avoir une vague idée plus précise sur la musique du quartet californien. Et mine de rien, cette petite précision géographique n'est pas si anodine, puisqu'avant même de vérifier leur provenance, quelque chose dans leur musique me hurlait leur affiliation au 'Sunny State'.

 

Cela s'exprime dès le premier morceau « Blood Moon », passée l'intro « Fragile Light », qui, à l'instar de lors de l'ouverture de Clairvoyant, met en scène un screamo teinté d'un post-rock certes mélancolique mais malgré tout assez lumineux, avec une sensation qui va tirer du côté du YES FUTURE, ce qui est loin d'être le cas de tous les groupes de la scène. Les voix claires (doublées au scream et que finalement je parviens ici à apprécier) de « Palo Santo », rebelote, avec une petite touche d'ingénuité et de désuétude qu'on trouve parfois dans les clichés de ce qu'on imagine des groupes californiens, même si ici, à l'instar d'un Touché Amoré, c'est tout de même une belle dose de mélancolie, certes un peu uplift – et peut-être une idée de rémission – qui ordonne les émotions les unes avec les autres.

Quelque chose que l'on retrouvait également sur le dernier opus de Glassing, dont les tendances parfois shoegazy, le ton du scream et l'organisation de l'espace sonore se retrouvent ici et là sur ce nouvel album de State Faults, bien que les Texans aient un penchant post-black beaucoup plus prononcé.

 

Dans notre petite liste plus haut, on trouvait en tête de file Frail Body, et ce n'était pas un hasard, puisque de nombreuses séquences de Children of The Moon rappeleront inévitablement le récent Artificial Bouquet, bien que moins intense dans l'ensemble, avec peut-être plus de directions et d'aérations, et surtout beaucoup plus de lumière. Mais pour le reste, la tendance de fond, pour ce qui est du scream, de ce screamo mélodique et arrache-tripe, si vous avez apprécié Artificial Bouquet, n'hésitez pas à jeter une oreille sur celui-ci.

 

Plus varié que Frail Body donc ? Et bien oui, parce qu'étant ancrés dans une optique un peu plus screamo/rock que ces derniers, State Faults en profitent pour aller entremêler d'autres paysages à leur ciel étoilé : le bien mal nommé « No Gospel », par exemple, qui hurle à la Lune l'influence de... Gospel, justement, et leur album The Loser (une surprise 17 ans plus tard, tout de même) avec ses sonorités retro et ses rythmiques qui, sur ce morceau précis, viennent aussi pour moi invoquer The Mars Volta.

Et tiens, vous prendrez bien une mélodie qui semble directement provenir du Circle Takes The Square de « Non-Objective Portrait of Karma » (rien que ça) sur « Heat Death » ? Ou une fulgurance blackened screamo sur « Nazar » ? Ces accointances avec La Dispute de Something... ? Ou ces aspérités rock et montées progressives que ne renieraient pas City Of Caterpillar ? Quelques doses de post disséminées ici et là ?

 

Pour le résumer en bref, je dirais que Children of the Moon souffrira (au moment de sa sortie, cela pourra se diluer dans le temps) de deux problèmes principaux : la proximité temporelle avec la sortie de Artificial Bouquet de Frail Body, dans un registre proche et clairement difficile à concurrencer ; et sa durée.

Avec 62 minutes au compteur (là ou Clairvoyant en faisait 36), et du fait de sa structuration (deux fois six morceau puis un septième qui avoisine les dix minutes), Children of the Moon s'apparente presque plus à un double album, avec un côté théâtral et divisé en actes, qu'aux productions plus 'classiques' dans un style souvent connu pour son côté direct.

A mon humble avis, il me semble que cette durée risque de limiter le potentiel de réécoute intégrale (surtout qu'il paraît que plus personne n'écoute d'albums en entier de nos jours, mouais), et il aurait pu être judicieux de justement l'organiser en double album part 1 / part 2 ; ou bien d'aller grappiller quelques mesures et répétitions excédentaires ici et là, passer peut-être outre certaines parties dispensables (l'intro, l'interlude « Looming ») pour gagner une dizaine de minutes à l'arrivée.

 

Mais malgré ces quelques critiques qui n'ont rien de dramatique, State Faults signent ici un excellent retour aux affaires, malgré quelques voix claires pas franchement indispensables (sur « Leviathan » par exemple, l'outro « Bodega Head » qui finira peut-être par m'avoir malgré tout) que je me sens obligé de signaler, bien qu'elles ne soient heureusement que très peu présentes.

Pour mettre une sorte de point final à cette chronique qui à ce même défaut, celui d'être un peu trop longue, je dirais simplement qu'avec Children of the Moon, State Faults offrent un album très complet qui regorge de recoins à explorer et qui a à mon avis très bien digéré l'ensemble des apports des groupes de cette sous-chapelle musicale, y compris celui des comeback de certaines formations des années 00.

Il mérite très clairement une écoute chez tous les screamsters qui hantent ces pages en quête d'une nouvelle opportunité de se laisser aller à pouvoir vivre, assumer partager ces émotions viscérales pas toujours faciles, et s'en sentir part.

 

A écouter en se perdant dans la profondeur d'un ciel nocturne.

photo de Pingouins
le 11/09/2024

2 COMMENTAIRES

Beunz

Beunz le 12/09/2024 à 22:46:19

Tout d'accord ! :)

Pingouins

Pingouins le 12/09/2024 à 23:38:19

😃

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