The Keening - Little Bird

Chronique CD album (51:29)

chronique The Keening - Little Bird

SubRosa est mort.

Mais revit presque étrangement, par deux groupes, deux projets qui chacun ramène énormément au défunt.

Le corps, le son, la musique, les compositions, le doom, la puissance avec The Otolith.

La tête, la voix, les compositions, l’ambiance, le folk, la mélancolie avec The Keening.

En gros, les parties plombées d’un côté, celles claires de l’autre. La scission est artistiquement presque totale et évidente. SubRosa déchiré en deux de ce qui faisait sa singularité. Mais avec les mélodies aux violons pour chacun en continuité. (Et également par les chiffres, les 3 groupes affichant tous 6 morceaux par album, coïncidence ?)

 

Be kind, rewind, SubRosa c’était ça (click for the chronick) :

 

 

Avec : Rebecca Vernon au chant, à la guitare et à la tête du projet, Sarah Pendleton et Kim Pack aux violons électriques et au chant, Levi Hanna à la basse, Andy Patterson à la batterie et à la production.

 

Les « musiciens » ont continué avec The Otolith.

La chanteuse avec The Keening.

Et si la perte de SubRosa est énorme, avec un More Constant Than The Gods indétrônable, les deux nouveaux projets valent largement l’écoute, même si sûrement, personnellement, flouté par un brin de nostalgie.

 

Et même si musicalement il n’y a là aucune ressemblance, j’ajoute ici l’album - instrumental - de Insect Ark, avec Andy Patterson à la batterie car lui aussi vaut également d’être écouté !

 

 

Ce nouveau premier album de The Keening est donc la partie musicalement « douce » et mélancolique de l’héritage. Toujours cette approche bien identifiable, prog-folk-pagan, tristesse au coin d’un monde en flammes avec ses fantômes qui paradent. Une douce voix chaleureuse, mais mystérieuse, accompagnée d’un piano ou d’une guitare claire sont la trame de fond des morceaux, colorés par l’intervention, ensemble ou séparément, de violons, d’un violoncelle, d’une flûte, d’une harpe, d’un cor, de chœurs vocaux, et quand la batterie et la basse - parfois - grondent, de guitares saturées. Grâce à des compositions toujours en évolution, à une production et des arrangements d’une extrême finesse, cet ensemble nous donne un très bel album (pour ne pas faire la fête). Homogène dans sa beauté. Homogène dans le fait de ne jamais sortir du cadre propre à The Keening. Seulement, aux premières écoutes, la nostalgie première pourra demander s’il ne manque pas ces moments de grâce que l’on pouvait trouver sur les albums de, qui vous savez.

 

Mais il faut également approcher ce Little Bird en mettant de côté le passé, en le considérant comme le premier album d’un nouveau projet. Rebecca Vernon, qui chante mieux que jamais, a construit un véritable temple dans lequel se réfugier. Tout y est éclatant, accueillant, envoûtant… à la lumière d’une bougie. De l’orgue massif en fond, aux voix en canon, aux violons et autres cordes évanescentes, en passant par les très belles guitares claires, tous se répondent, se relaient, nous entourent, et chaque minute allant, nous avançons vers l’inconnu. Sur de nouveaux chemins. A la qualité des musiciens, c’est également celle de la composition et de la production qui donne à ce premier album une forte résonance et une unité. En fait, tout y est beau, tout est tenu du début à la fin, et mis à part le redondant « So I ask you baby, did the truth set him free ?» dans le dernier morceau, on peut dire que c’est un sans-faute. C’est seulement avec le temps que l'on se rendra compte si cet album était trop homogène, si le cadre était trop serré. Dans tous les cas c’est plutôt fort pour un "premier album" non ?

 

Néanmoins, il reste difficile de s’éloigner de son projet phare. Si bien entendu la voix ne peut qu’être identique, les ressemblances sont également parfois proches par la façon de chanter, le ton, les compositions, le choix des instruments. Ce ne sont pas seulement des passages mais des morceaux entiers qui pourraient être le nouvel album de SubRosa. C’est flagrant par exemple sur "The Truth", le dernier morceau de 16 minutes, dont l’intro fait immédiatement penser au "No Safe Harbor" – également dernier titre – de More Constant Than The Gods, ou sur le final de "The Hunter II". On a vu pire comme ressemblances, alors forcément, nostalgie mise à part, on ne peut qu’apprécier ce Little Bird.

 

Et qu'apportent ces nouveaux albums dans "l'histoire" de SubRosa et des musiciens ? Ici on appréciera le travail bien plus appuyé et bien plus développé des voix. Elle chante encore mieux comme je disais mais pas seulement. Les voix, les mélodies et harmonies vocales, les coeurs, ont une plus forte présence. Les parties musicales en son clair également. Effectivement c'est bien la partie la plus "douce" de l'héritage qui est ici proposée, mais pas seulement reproduite, c'est davantage travaillé et poussé au delà de ce qui était proposé auparavant. Si cet album laisse sonner des passages et morceaux aux portes de la distorsion et de "l'énervé" - toutes proportions gardées - ce sont bien ces douces mélodies de la mélancolie qui sont réussies, à mettre à l'honneur, et qui permettent de proposer quelque chose de nouveau, de s'émanciper. Et éviter de rester à s'apitoyer sur le passé. Le premier morceau Autumn, ou The Hunter I (superbes couplets) par exemple en sont des exemples. C'est bien dans ces moments que l'on peut sur Little Bird se rapprocher des passages magiques que pouvait proposer More Constant Than The Gods. On pouvait supposer cette évolution avec le concert qu'avait donné SubRosa au Roadburn en 2017, en mode "épuré", acoustique, sans batterie, avec les morceaux retravaillés.

 

Ces deux nouveaux projets, The Otolith et The Keening, s’ils ont ce truc en plus de nous apporter de la très bonne musique, de nouvelles idées, surtout quand on pensait l’esprit SubRosa éteint à jamais, ils ont néanmoins chacun ce petit truc en moins (la colère et le heavy doom d’un côté, la mélancolie et la finesse de l’autre), écrasés par l’ombre d’un zénith qu’ils ont jadis atteint.

Mais la lumière naît de l’obscurité, je serai là pour suivre leurs chemins car je crois en leurs étoiles.

Et ainsi l’oiseau bleu pourra être libéré.

 

photo de R.Savary
le 30/11/2023

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