Tymo - The Art Of A Maniac

Chronique CD album (32:01)

chronique Tymo - The Art Of A Maniac

« Dis papa, pourquoi tu aimes tant le Thrash ?

- Écoute ça fiston, tout est là, expliqué en moins de 3 minutes... »

 

Pour une expérience Sons & Lumières complète, à cet instant précis du dialogue, il faut lancer « Tymonicide », le premier morceau de The Art of a Maniac. Tout y est dit à l'occasion de ce qui pourrait ressembler à une introduction, du fait du caractère instrumental de l'exercice, et de la transition naturelle qu'il offre vers « Sanity Clause », le morceau le suivant immédiatement. Mais pour le coup il ne s'agit pas de ce genre de mise en jambe inutile, pleine d'orchestrations claironnantes et de bruits de champs de bataille censés suggérer que le budget du Seigneur des Anneaux a été cramé en frais de studio et de mastering – alors que, au mieux, celui-ci a été dépensé en brushings et dans l'achat d'une épée en alliage carton/allu'. Non, quand Tymo nous fait pénétrer sur son 3e album, c'est comme quand Stephen Hawking parle de trous noirs et d'espace-temps : en utilisant à peine plus que le temps nécessaire pour engouffrer un crêpe au sucre, il vous résume avec évidence et un enthousiasme palpable toutes les merveilles d'un univers riche en possibilités. Et l'on en ressort avec des paillettes plein les yeux.

 

Car « Tymonicide », c'est l'impatience du pur-sang qui piaffe dans son box, impatient de partir au galop. Ce sont des mélodies lead à la fois grandioses et amicales. Ce sont des démonstrations solo fastueuses mais justifiées – pas des masterclasses prétentieuses pondues par des guitar heroes onanistes. Ce sont de grandes chevauchées tagada-tagada à la vitesse du son, ponctuées de ces breaks fulminants qui précèdent les assauts foudroyants. C'est l'impression de sauter en fly-suit de nuit, depuis le sommet du plus haut gratte-ciel du monde, avec une bande de potes. C'est une cavalcade extraordinaire, doublée d'une No Bullshit attitude de tous les instants.

 

… Voilà pourquoi on aime le Thrash, bon sang !

 

Et les Canadiens poursuivent la démonstration sur un « Sanity Clause » un peu plus bagarreur, un peu plus proche de la cadence d-beatesque. Considérées comme un tout, les deux premières pistes ne durent même pas 6 minutes, mais on en sort comme d'une intense séance de canyoning, avec le cœur qui bat la chamade, et les poils dressés comme autant de fantassins prêts à repartir au combat. On serait alors en droit de demander une pause, histoire de s'envoyer une grande rasade de Gatorade et de mordre dans une barre Ovomaltine. Mais on n'en aura pas le temps. Car « Mars Attacks » déboule comme Gengis Kahn dans notre salon, bien décidé à décrocher jusqu'à la dernière étagère Ikea. Poignée en coin, acide comme une grande rasade de Punko-citron, ce troisième titre déborde d'une énergie sympathiquement féroce et éminemment communicative.

 

Il y a une pédale de frein sur cette grosse cylindrée ? Rien à battre !

 

Si The Art of a Maniac avait foncé à la même allure jusqu'à la ligne d'arrivée, cela aurait certes été usant, mais on aurait tracé la route sur un petit nuage, et attribué à l’œuvre ce genre de notre himalayenne que seul les sprinters fabuleux comme Expulsion se voient habituellement décerner. Malheureusement, Tymo a eu peur que nos petits cœurs ne tiennent pas la distance : il amorce donc, dès « Estrogenocide » (qui pourtant démarre fort) un virage progressif vers plus de mid tempos moshy et moins de geysers d'adrénaline. Pour autant le Thrash du groupe n'en perd pas tout sex-appeal, ni son agressivité. N'empêche, sur cette 4e compo comme sur « The Roy Parson Project », on sent l'excitation s'amenuiser. Autre piste qu'explorent alors les petits gars d'Edmonton : le Thrash accidenté, moins évident, qui joue sur les ruptures. C'est le cas sur un «  Age of Deception » qui fait le taf sans faire bouillir l'adrénaline, ainsi que sur un « War Beneath the Skull » plus technico-progressif, qui la joue tortillon, et ne s'en sort d'ailleurs pas si mal, sa démarche syncopée n'étant certes plus celle d'un pilote de F1, mais celle d'un courageux participant à une "expédition Voivod" pour une planète hostile. On remarque par ailleurs que, comme s'il souhaitait contrebalancer cette rétrogradation vers des vitesses plus raisonnables, le groupe se met à exhiber plus régulièrement sa basse. Car il sait bien, finaud qu'il est, que les Thrasheurs ont toujours un petit faible pour les états d'âme de ce sympathique gros bourdon à peu de cordes.

 

Mais au final les loustics gardent la tête sur les épaules : ils savent pertinemment là où réside leur force. Sur le morceau-titre et « Alcoholocaust », qui ferment la marche, ceux-ci s'en reviennent donc aux tempos déraisonnables et à l'attitude effrontée qui nous avaient rendu les trois premiers titres aussi jouissifs qu'une grande pinte de lager glacée en plein désert. Sur les huit dernières minutes, ça tape donc dru, ça enrobe de gouaille Rock'n'Roll des riffs salement incisifs, ça vomit du solo éruptif, ça affiche une grimace mauvaise... Et l'on finit cette grosse demi-heure de décibels vociférant ventre-à-terre grisé par la vitesse. Avec, au moment d'attribuer la note, juste ce qu'il faut de retenue pour prendre acte de ce relatif ventre mou, qui quitte la trajectoire de l'excellence le temps des quatre pistes constituant le milieu de l'album.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte : The Art of a Maniac c'est le Thrash tel qu'on l'aime, fulminant, déraisonnable mais extrêmement compétent, cavalant à la vitesse de la roquette au galop, acide comme une giclée Punk et hargneuse comme un molosse à qui l'on a piqué la côtelette qu'il rongeait. C'est une course jubilatoire et fulgurante sur l'autoroute du gros son, à qui l'on n'attribuera cependant pas la plus haute note sur le Tripadvisor du Metal du fait d'une pause moshy accidentée un peu longue, et moins exaltante, à mi-course.

photo de Cglaume
le 20/06/2024

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