Znous - Znousland 4

Chronique CD album (27:30)

chronique Znous - Znousland 4

« Votre mission, si vous l’acceptez, est de chroniquer Znousland 4 sans vous chopper un hashtag #balanceTonNéoColon… »

 

Si si, je vous jure : je marche sur des œufs. Car j’ai beau être armé des meilleures intentions, je sais bien que mon cerveau reste embourbé dans certains automatismes faisandés de vieux mâle européen cisgenre. Après tout, même Jean-Paul Sartre, qui se pensait pourtant au-dessus de tout soupçon, s’est fait retoquer par Simone de Beauvoir – qui lui a prouvé par A + B qu’il menait encore des raisonnements imprégnés de ce sexisme sentant fort la chambrée de caserne et la buvette de stade.

 

Pourquoi ces sueurs froides introductivo-branlage-de-nouillesques ? Parce que, aux alentours de la sortie de Znousland 3 – back in 2021 –  Znous a clairement mis les points sur les i :

 

« We are not Oriental Metal. Do not exotify our art. »

 

Ce qui se défend : est-ce qu’on rassemble dans le même méli-mélo « Occidental Metal » un Finntroll, armé de sa bière et de sa Humppa, et un Igorrr, qui injecte musique baroque, et parfois accordéon, dans sa Fusion sans nulle autre pareille ? Non. Parce que les deux ont autant à voir que le JT de TF1 avec son équivalent d’Arte. Or je sais bien que, si je cherche un peu, je trouverai sûrement dans d’anciennes de mes chroniques tantôt un « Oriental Metal », tantôt un « exotique »…

 

Pourtant, naon, j’vous jure : je n'appartiens à aucun cercle de nostalgiques de l’OAS !!

 

Mais revêtons à nouveau le costume du grand reporter présent sur les fronts de tous les conflits métalliques internationaux. Car, que j’emploie ou non les bons mots, que je froisse sans le vouloir ou non des sensibilités, il faudra bien que je vous le dise : Znousland 4 est diablement bon. Encore un peu plus, même, que son prédécesseur. Il fait par ailleurs preuve de plus de brièveté (seulement 27 minutes, grrrrr…), peut-être bien de plus de maturité également, ainsi que de plus de cohérence. Pas parce que le groupe se serait mis à brasser moins large le champ des possibles stylistiques, mais parce qu’au niveau de la prod’ et de la tonalité générale, on sent comme une unité plus marquée. Ce qui pourrait bien être mis sur le compte d’une approche globalement plus sombre…

Mais on va détailler tout ça juste après le syndical double retour à la ligne, marquant le changement de paragraphe. Hop !

 

Percus et fifrelin enjoués en bandoulière, « Salih » démarre comme le plus pétillant des titres de Khalas. Mais avant que l’on s’en rende compte, cette hargne vocale, ces diatribes acides, ce Metal velu comme un Sepultura sortant Roots, cette mosherie finale digne de Trepalium nous font brutalement ouvrir les yeux : ce n’est pas tant la nouba dans la casbah dont il est question ici, que du pendant musical de leur « We are not Oriental Metal », livré là, BAM, en intro. Vénères ils sont. Et moqueurs aussi :

« I am not a racist! I have a friend whose name is Abdallah! »

Cela rappellera aux plus vieux le « Poulailler’s Song » de Souchon, et son :

« … Je compte parmi les gens qu'j'aime bien, un jeune avocat africain »

(ça y est, tu retombes dans ton ethnocentrisme culturel, Lapin…).

 

Voilà donc un album qui démarre sur un superbe premier parpaing, à la fois méchamment gaulé et plein de ces chaudes couleurs nord-africaines dont notre oreille gauloise est friande ! Puis, c’est comme si un froid linceul avait été drapé autour des deux pistes suivantes. Car le déhanché s’y fait plus mélancolique, le pas plus résigné, la narration plus pessimiste… Mais l’accablement laisse régulièrement la place à de majestueux accès de furie Black Metal qui montrent qu’il ne faut pas trop pousser Fatima dans les orties, ainsi qu’à de belles expressions lead, d'où sourd encore l’espoir.

 

Le passage à « Nahki Maa El-Hoot » nous rappelle que Znous est un groupe de contrastes. Car sur ce morceau, la mélancolie se veut beaucoup plus positive. Et beaucoup plus « smart », le riffing classe, les grands espaces, la sobriété, même, rappelant le meilleur des groupes de Modern Metal/Rock évoluant au sein de la Klonosphere. On y sentirait presque un fort arrière-goût de Gojira, même. Le morceau est aussi simple qu’il est superbe, là, c’est dit.

Et les contrastes de continuer sur le Folk/Rock de « Sakret El-Mout », qui semble vouloir prouver qu’on peut se taper un gros bourdon lors d’un mariage tunisien. Mais qu’en dansant, ça passe. Mais que, non, finalement, même en dansant ça ne passe pas complètement.

Puis ce chapelet aboutit à « 7 Shaltaat », interprété en compagnie de la chanteuse et comédienne Lobna Noomen. La démarche y est à nouveau traînante, les épaules lourdes… Jusqu’à ce superbe riff et cette mélopée féminine qui percent la chappe de plomb et, épaulés par quelques orchestrations savamment dosées, conduisent à une explosion de puissance, de celles que l’on recherche en écoutant du putain de bon Metal.

Et bien que Znous porte haut et fort son message de non-indigénisation, cela ne l'empêche nullement de revendiquer ses origines – sans toutefois se cantonner au proche périmètre jouxtant son clocher, vu que le groupe honoré en fin d'album est marocain. Il consacre ainsi sa dernière piste (déjà ?) à revisiter magistralement « Leklem Lemrassa », un classique enjoué d’une formation connue pour lutter contre les traditions rétrogrades. C’est l’occasion de boucler la boucle avec un autre de ces titres sonnant – à nos oreilles – à nouveau comme du Khalas. Voire comme du Acyl.

 

… Eh bien, on dirait que j’ai réussi à ne pas trop sombrer dans les clichés à deux balles, non ? Pas une seule fois vous ne trouverez ci-dessus un « loukoum », une « babouche », un « sable brûlant », ni une « danse du ventre ». Ce qui, avant même d’éviter des stéréotypes bien gras, permet déjà d’éviter la facilité de cartes postales éculées. Mais ma vraie mission, rappelons-le, était de vous donner envie d’écouter Znous 4. Et j’espère ne pas avoir trop foiré cet objectif, celui-ci étant le seul qui importe vraiment…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte : plus sombre, plus ramassé, mais également plus solide, Znousland 4 – le nouvel album de Znous – fait encore mieux que son prédécesseur, pourtant déjà bien sexy. On y sent certes comme un supplément d’amertume, mais également plus de cohérence, plus de maturité, et plus de profondeur. Le spectre métallique exploré y reste assez large – de Sepultura au Black Metal, en passant par la Klonosphere, Khalas, Gojira & co – mais baigne toujours dans une tradition musicale tunisienne fièrement revendiquée – qu’on nous demande toutefois fermement de ne pas ramener à ces clichés réducteurs trop souvent d’usage dans les chroniques écrites de ce côté-ci de la Méditerranée.

 

 

photo de Cglaume
le 18/06/2024

3 COMMENTAIRES

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 18/06/2024 à 13:17:03

Rooooooh trop New Metalcore pour moi. Dommage.

cglaume

cglaume le 18/06/2024 à 23:11:34

Ton cœur est sec et ton âme noire comme un petit phacochère.

:D

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 19/06/2024 à 06:49:54

... bouffi, je sais.

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