Zmar - Napořád

Personnellement, si on me dit 'Prague', le premier truc qui me vient en tête, c'est généralement Gattaca (bien que les origines soient mixtes avec Olomouc). Il me faudra désormais ajouter Zmar à ces repères musico-géographiques, puisque c'est bien de la ville aux cent tours que le combo est originaire.

Si comme leurs illustres confrères, les racines screamo sont bien présentes, au contraire de Gattaca qui tire vers le crust, c'est ici vers des contrées plus emoviolentes et blackenisées que nous nous dirigeons avec cet album Napořád (qui veut dire « toujours »), sorti chez les toujours très au point Zegema Beach Records et Dingleberry Records.

Dès le début de la mise en bouche introductive « Napořád », on pourra percevoir les influences qui traverseront ce disque, mais c'est surtout à partir de la seconde piste « Zařadit se » que Zmar vont jouer la carte 'blackened' par dessus leur base screamo / emoviolence, un peu comme on pouvait le retrouver chez des groupes tels que Old Souls ou ██████ (les deux formations ayant d'ailleurs fait un split ensemble), avec une voix très arrachée comme on les aime, avec une nette influence d'Envy sur ses parties calmes screamées (chose que l'on retrouvera fortement sur « Bílej stín »).

Et c'est ça qui est sympa à l'écoute de ce disque, c'est que j'ai régulièrement pensé à des groupes que j'aime beaucoup, mais rarement les mêmes : une sorte de blackend screamo qui peut faire penser à mon inconsidérable amour pour Potence sur « Kapitalizace nenávisti », un voix screamée donc entre Envy et la très bonne surprise post-metalisante Reigan-Do (« Bílej stín ») d'il y a peu, et des bouts de Ostraca / City of Caterpillar / Gospel vieille époque, naviguant du blast aux rares parties plus aérées, pour une sorte d'éventail des directions phares du style, avec par exemple « Poslední směna » qui pose d'entrée une ambiance plus introspective, une explosion cathartique attendue et qui arrive vite, exhalant ses émotions, screamant le mal-être dans une belle unicité qui vient s'abandonner dans le blast beat, avec encore une fois avec un tournant relativement post-black. Le tout en bien foutu.

Du côté des paroles, tout est en tchèque, mais une traduction anglaise est disponible sur chacun de leurs titres sur bandcamp. Et une phrase (que je traduit grossièrement) résume assez bien l'état d'esprit de Napořád : « Je n'ai jamais excellé en rien, sauf peut-être dans le manque d'intérêt envers votre façon de vivre ».

Parlant sur « Kapitalizace nenávisti » de la situation LGBTI+ et pointant du doigt les groupes ultra-conservateurs qui ont manifesté contre l'envoi de pilules abortives aux femmes ukrainiennes victimes de viols de soldats russes, des luttes féministes et de masculinité toxique sur « Žena, růže, píseň, revoluce », ne vous attendez pas à un groupe apolitique et faites votre autocritique (ça fera du bien à tout le monde).

Bref, avec des morceaux finalement assez longs pour un groupe qui s'enjaille avec l'emoviolence, Zmar prennent le temps de construire chacune de ces compositions, pour un résultat tout à fait convaincant, entre screamo bien énervé et lichettes blackisantes étalées ici et là.

Pour celles et ceux que ça intéresse et qui sont sur Paris ou pas loin, le groupe se produira le 22 juin au Cirque Electrique.

A écouter quand la vie devient trop anguleuse pour marcher droit.

Pingouins

le 20/06/2023