6:33 - Orphan Of Good Manners

Chronique CD album (42:43)

chronique 6:33 - Orphan Of Good Manners

“We will not be held responsible for any hearing impedance, or damage caused to you from excessive exposure to this sound…”

 

Eh bien comme ça au moins, on est prévenu! Par contre c'est marrant: j'avoue que j’aurais bien interverti ce message d’intro qui nous cueille froidement à l'orée de Orphan Of Good Manners, avec le joyeux “Good Morning ladies and gentlemen. It’s a beautiful day. Time to wake up” ouvrant le dernier Benighted. En même temps, ici aussi l’avertissement est judicieux, car même s’ils ne sont pas les plus violents de la planète metal, les 6:33 sont certainement parmi les plus fous. Si si. Preuve parmi tant d’autres: c'est via une reprise du « It’s Alright » de East 17 que je les ai découverts sur Decade-Dance, compil' qui rend un hommage métallico-rock à l’Eurodance des 90s... Bonne interprétation d’ailleurs  – bien que souffrant d’une prod’ approximative – qui, à l'époque, m’avait assez naturellement fait penser aux zouaveries des Carnival in Coal (notamment à cause de vocaux très Arno Strobliens). Eh oui, vous devinez juste: 6:33 est bien de ces trop peu nombreux groupes de nawak metal géniaux qui ne respectent aucune convention ni aucun tabou. Et c'est un programme qui, je l'avoue, me met particulièrement en joie... Champagne!

 

“Now, here comes the music!”

 

L’intro ci-dessus vous aura tout de suite mis sur la voie: l’une des influences majeures des parisiens de 6:33 est en effet Carnival in Coal. Oui. D’ailleurs el Señor Strobl se fend d'une participation au morceau éponyme (... aux côtés de Guillaume Bideau – Mnemic, ex-Scarve). Mais cet héritage musical est loin d’être le seul à venir nous flatter l’oreille. En effet s’il est cliché – voire facile – de citer le couple Mr Bungle / Faith No More pour étiqueter les groupes comme 6:33, il faut bien avouer que dans le cas présent, le rapprochement s’avère vraiment judicieux tant la voix de Kinky Zombi (pourquoi pas?) prend souvent des accents Pattoniens (en moins nasal toutefois), et tant certains passages nous entraînent dans cette direction (la schizophrénie du début de « Beretta », la funk touch FNMienne de « Drunk in Krakow » ou le début de « Orphan Of Good Manners » qui donne envie de fredonner « Sweet Charity »). Mais plus encore que la bande à Patton, c'est à l’un de ses plus brillants disciples que l'on pense: Polkadot Cadaver, avec qui 6:33 partage une approche à la fois caressante et sombre – voire dangereuse – du metal, tout en ménageant de l’espace pour de magnifiques aérations mélodiques où s’ébat une superbe voix pop/rock/machin-chose tirant dans les aigus. Et sur les solides fondations constituées de ces influences, le groupe bâtit un édifice musical fait de metal moderne saccadé, d’influences indus festives (pensez Punish Yourself, pensez Circus Of Dead Squirrels – ces derniers étant assez proches de nos zoziaux), d’arrangements électroniques et d’un clavier très présents qui évoquent tour à tour Devin Townsend, Machinae Supremacy (à la fin de « The Only One ») ou Mindless Self indulgence (au début de « Little Silly Thing part 1 »), de metal extrême (death, mais aussi mathcore), de délires et de multiples changements de braquet (pensez Vladimir Bozar), le tout agencé en de multiples couches superposées, pour finalement créer son univers.

 

“Taaake me ho-ney, riiiiight to the tooop of the woooooorld”

 

Au final, Orphan Of Good Manners est bel et bien une œuvre unique, singulière et profondément attachante. D’autant que le groupe cultive son jardin musical à grands coups de terreau mélodique et d’engrais énergisant qui font fleurir des refrains poignants et des passages grandioses sur toute la longueur de cette luxuriante galette. Admirez-moi donc, à 2:00 sur « Beretta », l’éclosion de cette superbe parenthèse mélodique qui succède à une bonne grosse séance de blast. Et l’étrange majesté de ce martellement guitaristique plein de bidibips qui sert de support à un chant de crooner bouffonisant à 1:38 sur « Black Berry ». Sans parler de cette collection de tubes dans laquelle j’inclus personnellement « Little Silly Thing part 1 et 2 » (maman ce passage fusion rock « larger than life » distillé au sein des 2 morceaux!!!), « The Fall Of Pop » et son électro-indus hyper catchy à la fois éthéré et sombrement virulent, et enfin « Orphan Of Good Manners » qui – tel un diesel – commence mollo pour s’épanouir progressivement dans des dimensions proprement hollywoodiennes. Et les jardiniers de 6:33 de planter régulièrement du blast, des orchestrations ciblées, des interventions féminines et toutes sortes de sucreries qui transforment la ballade dans ces vertes allées en un émerveillement perpétuel.

 

“I’m still reaaaaa-dy to go !!!”

 

Avec Orphan Of Good Manners, 6:33 réussit donc la gageure de digérer ses multiples influences pour en extraire quelque chose de frais, de pétillant – en l’occurrence un album kaléidoscopique bénéficiant enfin d'une production digne de ce nom, qui fera la bonheur des fans de brassages stylistiques inspirés. Et bordel quel plaisir d'avoir une raison de plus de se réjouir de la vitalité d'une scène française plus que jamais dynamique et prolifique dans cette branche musicale malheureusement si confidentielle! Dorénavant aux Vladimir Bozar, Torm, Pryapisme, Pin-Up Went Down et City Weezle vient se rajouter l'étoile scintillante 6:33 au firmament des stars d’un genre pratiqué par de talentueux musiciens pluridisciplinaires pour un public aussi curieux qu'exigeant (allez, un peu d’excès de lyrisme n’a jamais tué personne…). En tout cas si vous n’êtes pas encore convertis, rassurez-vous: avec 6:33 il ne sera jamais trop tard pour bien faire (hum, 'fallait bien la faire celle là...)!

photo de Cglaume
le 09/05/2011

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