Gravity - Noir
Chronique CD album (59:32)

- Style
Modern Metal foisonnant - Label(s)
Apathia Record - Sortie
2017 - écouter via bandcamp
On se complaît toujours à dire que le troisième album est la dure étape de la maturité. En cela, les Montpelliérains de Gravity l'ont pris au mot. Si la formation a sorti ses premières productions sur un rythme tambour battant, il a fallu cette fois-ci attendre cinq ans afin de voir débouler ce Noir. Une latence s'expliquant en partie par le manque de moyen et une demande de financement participatif qui n'a malheureusement pas réussi à complètement remplir les caisses. Un mal pour un bien d'avoir vécu cette longue aération vu que Gravity nous revient au sein d'une nouvelle écurie, Apathia Records, et une fougue toute nouvelle. Car oui, la marche d'évolution qui s'est opérée depuis ces cinq dernières années a été énorme, vraiment.
La recette des Montpelliérains s'est considérablement diversifiée par rapport à Syndrome et Eutharia, passant d'un metalcore à mi-chemin entre classicisme et modernité un chouïa juvéniles – mais non-dénués de quelques morceaux à l'identité affirmée – à une mouvance s'apparentant davantage à un modern metal dans son sens le plus large. Et visiblement frustré de s'être retrouvé sur la touche aussi longtemps, Gravity nous livre avec Noir un sacré pavé conceptuel s'étalant sur presque une heure. Sacrément culottés les saligauds.
Même si la comparaison s'avère assez réductrice, les fans d'Eths de la dernière période, certainement en manque depuis sa disparition, pourront trouver en Gravity une excellente alternative : la musique tend vers le metal/deathcore et une figure féminine pousse la chansonnette en growlant à tout va – avec quelques passages clairs de temps à autre même si ce registre manque un poil de mordant – le tout, dans la langue de Molière. Même si les Montpelliérains préfèrent enrichir davantage son répertoire par rapport aux Marseillais.
Encore ne faut-il pas se fier à l'intro rétro laissant présager une carte de visite sur les terres nawakiennes, tant on ne s'étonnerait pas de retrouver ce sample chez Igorrr, car le morceau éponyme a vite fait de nous remettre les pendules à l'heure avec deathcore djentien syncopé, planant et moderne. Nous montrant d'ailleurs une prod' aux petits oignons. La première partie de Noir s'avère fort agréable, savant fort bien osciller entre brutalité et mélodie quand il le faut, passant du direct au planant avec des breaks très bien amenés (« Noctifer – Le Porteur De Nuit »), même si certaines longueurs peuvent parfois se faire cruellement ressentir (« Noctifer – De L'Homme Au Loup »). La partie centrale se voit pleinement marquée par l'empreinte Gojira (« Noctifer – Démonarque I » et plus particulièrement « Noctifer - Ogres ») très bien digérée tandis que « Noctifer – Démonarque II » se frotte même carrément à l'exercice du black. Mais c'est tout particulièrement sur le doublon « Dune » et « Hypérion » que Gravity nous livre ses plus belles prouesses en s'accordant sur cette même recette en modèle simplifié qui lui ajoute une spontanéité fort bienvenue. C'est un peu où le bât blesse avec Noir : à trop donner, on finit par perdre le fil et décrocher.
Car même si la recette est large et riche, elle se montre paradoxalement fort homogène, si ce n'est carrément linéaire. En cela, les trois lanternes rouges de cette troisième fournée illustrent très bien cet état de fait tant ils se montrent anecdotiques et laissent cette impression tenace de remplissage intempestif d'un disque déjà rempli à ras la gueule d'informations et de longueurs. Peut-être aurait-il mieux valu pour cette triplette de compositions de faire office de simples faces B, voire peut-être appartenir à un EP de chutes de studio comme l'a fait dernièrement Epica avec The Solace System.
En résumé, Gravity nous livre là une fournée solide en terme de maturité. Noir montre sans aucun doute sa personnalité la plus riche et aboutie, à se demander d'ailleurs s'il pourra aller encore plus loin de ce côté-là. En revanche, à trop jouer les ambitieux, le côté conceptuel de l'album apporte malheureusement une trop longue longueur et linéarité d'ensemble. Un signe qu'il reste encore pour les Montpelliérains du chemin à parcourir afin d'atteindre l'excellence, à savoir conjuguer l'efficacité spontanée de mise sur sur ses deux premiers albums avec la richesse singulière fort bien exploitée que l'on retrouve tout au long de cette troisième offrande.
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