Mechina - As Embers Turn To Dust

Chronique mp3 (1:05:23)

chronique Mechina - As Embers Turn To Dust

Parfois, les potes aux goûts musicaux bien arrêtés – sans aller trop dans le mono-maniaque non plus, n'abusons pas – peuvent nous surprendre. Sans forcément dériver de leurs terrains de prédilection, ces curiosités étonnent de par une griffe plutôt singulière. Petit apéro tranquille d'un dimanche soir pluvieux, la discussion tournait à la base autour de mes penchants assumés vers l'expérimental, l'avant-garde, le nawak ou toute entité dotée d'une mixture/personnalité originale. « Tiens, tu devrais écouter Mechina, ça devrait te plaire : c'est une sorte de death cyber symphonique, ça rend vraiment bien ! » a-t-il fini par me dire avant d'investir mon ordi afin de passer Progenitor (2016), leur dernier méfait du moment, en fond sonore.

 

Et à ce niveau, je ne pourrais lui donner tort sur son étiquette, ni même sur la perspicacité de ses oreilles en terme de bon goût. Et de sa rétine également quand on voit cette pochette qui a vraiment de la gueule et ne peut que donner envie de s'y pencher sans même trop savoir à quelle sauce on allait être mangé. Pour faire court : imaginez une rencontre improbable entre le death sympho d'un Fleshgod Apocalypse, le côté symphonique épique doté d'une voix lyrique féminine d'Epica et les atmosphères cosmiques à mi-chemin entre organique et artificiel de Fear Factory, se permettant même quelques relents djent par moments histoire de rehausser le challenge. Le tout tournant autour d'une véritable narration musicale, un concept SF assez Star Warsien dans l'esprit, aux qualités éloquentes quant au fait d'arriver à imbriquer aisément des images dans notre esprit uniquement via le sonore. En soi, avec Progenitor, Mechina a très bien fait son taff en proposant une recette bien foutue et équilibrée avec un concept omniprésent sans qu'il ne soit non plus envahissant puisque ce dernier est quand même développé depuis les débuts discographiques du combo, à savoir The Assembly Of Tyrants (2005). Autant dire, un contexte narratif gargantuesque développé sur plus d'une décennie au travers de six albums auquel il est bien complexe de se plonger dès lors qu'on prend le train en marche sur le tard...

 

Et du coup, avec As Embers Turn To Dust fraîchement sorti de cette année, ça fait maintenant sept albums. Avec un rythme d'un album par an depuis 2013. C'est que ça ne mégote pas chez Mechina ! Si on ne pourra pas leur déplorer un manque certain de productivité, un rythme si soutenu comporte néanmoins sa part de risques et de dangers. Proposer inlassablement la même formule sans la moindre once d'évolution par exemple. Et c'est justement là-dedans que tombe malheureusement As Embers Turn To Dust. On reprend ici tout ce qui a pu faire les beaux jours de Progenitor l'année précédente, tout en lui collant par-dessus des points noirs sur lesquels il avait réussi à échapper.

 

Malgré tout, on retrouve les charmes du style Mechina : à savoir une superbe maîtrise en terme de développement d'atmosphères cosmiques, par moment presque divines dès lors que la superbe voix féminine éthérée intervient, très visuelles et cohérentes à l'aspect Space Opéra que le combo cherche à développer. De même que les progressions tantôt calmes, tantôt épiques font mouche et en terme orchestral, As Embers Turn To Dust n'a pas à rougir face à beaucoup de bandes-originales de films SF, celles de John Williams en tête. Bref, à de nombreuses reprises, les bras ne peuvent que tomber face à cette succession de tronçons franchement magnifiques qui assaillissent nos oreilles.

 

Des tronçons entrecoupés de remplissages bien moins enjôleurs en vérité. Et c'est là que le dernier-né dénote par rapport à son prédécesseur : plus calme et moins impactant, il a surtout tendance à trop se perdre en longueurs inutiles. Le style Mechina étant déjà fort complexe à appréhender, d'autant plus lorsqu'on n'a pas forcément décortiqué le background conceptuel qui le caractérise, As Embers Turn To Dust n'en devient que plus hermétique au nouvel arrivant. Ce qui le convaincra très difficilement de faire l'effort de s'y intéresser depuis ses prémices.

 

Si en terme de concept, cette monture 2017 marque actuellement la fin d'un cycle narrativement parlant, on espère toutefois que Mechina se révélera plus novateur en terme d'évolution de son style dans le futur, quitte à mettre un pied sur la pédale de frein en terme de rythme de sorties discographiques. Leur musique se révélant déjà assez élitiste en terme d'appréhension tant musical que l'ambition de son projet de Space Opéra, il n'est pas forcément de bon ton de se perdre dans les travers de progressions futiles, preuve que les Américains semblent s'user de la même manière que leur recette semble montrer ses limites. Malgré tout, cette dernière regorge d'éléments fort intéressants qui méritent qu'on se penche un minimum sur son cas. D'autant plus lorsque l'on est amateur d’œuvres conceptuelles sophistiquées et qu'on se sente prêt à s'y investir dans sa globalité. Pour les autres n'ayant pas cette patience, préférez-lui son grand frère Progenitor, reposant sur des bases similaires en version plus accessible et concise.

photo de Margoth
le 15/09/2017

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