Radiohead - Kings of Limbs

Chronique CD album (37)

chronique Radiohead - Kings of Limbs

Quoi ! Même la pochette –semblant d’hommage à Paul le Poulpe- est moche ! En découvrant la vidéo de « Lotus Flower », je fus glacé d’effroi. Non par la liberté stylistique de la vidéo, on découvre Thom Yorke  en réincarnation d’un Fred Astaire spasmophile, cherchant à contenir ses émotions ou sa vessie, c’est selon. On peut en sourire poliment, par contre sa voix de tête, remontée comme jamais est particulièrement insupportable. Les climax électroïdes posent le titre sur une très fragile frontière entre synthèse Lounge et chutes de Protools, Nigel Godrich renversant sans doute sa tasse de café sur les curseurs au moment du mix final. C’est donc avec un sourire assez carnassier que j’accueille la proposition de notre bienveillant taulier d’écrire une bafouille à propos de ce dernier-né.

 

En route depuis près de 25 ans, d’abord sous le nom de On Friday en 1986, les natifs d’Abingdon mènent Radiohead  -référence à un titre des Talking Heads- depuis 1991. Diantre, certains de mes confrères au sein de cette joyeuse assemblée, et sans doute certains parmi vous, lecteurs, n’avaient pas encore poussé leurs premiers cris.  On peut donc parler d’expérience. Pourtant le groupe reste – éternellement (?) – dans la position d’un outsider de luxe. Placebo s’étant vautré depuis belle lurette dans la fange du médiocre, il s’en débat encore, Coldplay ayant opté définitivement la posture d’un Jean-Marie Bigard de l’internationale Pop, et Muse amassant les dollars au même rythme que les costumes à paillettes et les boules à facettes. Sur papier pourtant, ces grands anciens avaient tout pour réussir.

 

Ils ratent le coche -Grunge, jouant le misérabilisme dans l’affable Pablo Honey, nous gratifiant au passage de l’infect « Creep », titre-somme de facilités convenues et de manque d’inspiration. Déjà là, « Pop is dead ». Pourtant les amateurs de Pixies et des ambiances lynchiennes (souvent les mêmes) trouvent matière à espérer  une vraie rénovation dans l’alternative-rock.  Avec ce carton planétaire, Radiohead  tutoie R.E.M pendant que Nirvana impose le bruit blanc partout et que les basses enflent dans l’électro de moins en moins froide. The Bends est un bon disque Pop, je lis en 1995 dans un fanzine belge (disparu) que U2 a trouvé son concurrent direct. Bientôt le rock stadium style !

 

Succès mondial avec l’épique Ok Computer hanté par le fantôme de Freddy Mercury et les mauvais relents du rock progressif (ouch !).  C’est avec le vrai-faux double album Kid A/Amnesiac que les représentants d’Oxford plongent à cœurs perdus dans l’Electro. La guitare s’efface, la voix de Yorke est abîmée par les machines et le substantif -Groupe de Studio- prend toute sa mesure.  Les vrais (!) fans sont déstabilisés, attendent quand même que le groupe en live joue « Creep » et « Karmapolice ». Le statut d’outsider de luxe est adopté.

 

Les britanniques abordent les années 2000 avec  Hail to the Thief  qui porte bien son nom, les genres abordés précédemment se retrouvent pêle-mêle avec de vraies réussites « There There », « The Gloaming ». Ils approchent le Graal. La suite… Le groupe se fâche avec EMI et prend possession – à l’ancienne – de sa propre destinée,  publiant sans l’aide fonctionnaire un album creux, bâclé, à grands renforts d’internet et d’une fan-base toute acquise. Acclamés, attendus et suivis, ils peuvent se permettre de faire comme bon leur semble. Là, le groupe devient intéressé par sa stratégie marketing savamment orchestrée. On dépasse le stade du pressage japonais à 1000 copies et 85 euros l’exportation, on joue avec les nerfs.

 

Radiohead en 2011, c’est donc cette blague postée sur Youtube « Lotus Flower » où le bâton tendu pour le scribouillard qui va s’en donner à cœur joie.  Un mauvais titre bâclé une fois de plus prémisse supposé d’un retour de Bjork (tous aux abris). King of Limbs ne bénéficiant d’aucune sortie presse, le groupe préférant le sortir sur le net un jour avant sa sortie officielle. Buzz, Buzz, Buzz… et ça marche bien sûr. A l’instar de Nine Inch Nails, le groupe a bien compris le fonctionnement de la musique digitalisée et comment la promouvoir, susciter l’attente. Si l’on se soustrait à la voix heu… libre  de Thom Yorke (que l’on aime… ou pas) et que l’on se penche exclusivement sur l’impact instrumental, le groupe continue dans sa voie électronique incluant piano, guitares faméliques et posture un peu jazzy. L’ensemble n’est pas mauvais, n’est pas renversant non plus. Plus léger et moins aventureux que le diptyque du début de la décennie écoulée, aussi mal agencé qu’Hail to The Thief,  un titre comme « Feral » résume bien cette impression de remplissage qui semble traîner tout au long du disque. Bien sûr, on retrouve de l’épique  avec « Bloom » à l’entame de la pièce, une certaine verve pop dans le chef de « Little by Little », un titre sympatoche.  C’est dans « Morning Mr Magpie » que l’on trouve le titre le plus spontané de la plaque avec une assise robotique assez ennuyée. Avouons-le c’est quand même fort peu pour un groupe de cette dimension. Avec un capital à l’abri et une Head-Army organisée, il y’a fort à parier que le groupe continuera sur cette lancée de (remp) lissage. Radiohead conforte facilement sa place d’outsider de luxe en passe de fossilisation. Si l’on part sur ce postulat là, on lui concède une certaine indulgence.

photo de Eric D-Toorop
le 26/02/2011

9 COMMENTAIRES

Jull

Jull le 27/02/2011 à 01:57:02

deception...

mat(taw)

mat(taw) le 27/02/2011 à 15:41:05

faut avouer que In Rainbows était déjà pas super... donc c'est pas vraiment une surprise

JUll

JUll le 27/02/2011 à 17:31:43

In Rainbows avait une odeur Radiohead... la ca a juste une odeur Tom Yorke, c'est dommage...

Ukhan Kizmiaz

Ukhan Kizmiaz le 27/02/2011 à 17:58:38

Beaucoup de remplissage et c'est d'autant plus dommage que sur "Feral", "Codex" ou "Separator" y'a du potentiel.
Comme je dis pas mauvais, mais pas renversant.

l'ogre doux

l'ogre doux le 27/02/2011 à 19:33:06

Pffffffff, quel ennui à l'écoute de ce disque! Radiohead a toujours su intercaler quelques pépites à l'intérieur de ces albums et In Rainbows, plutôt bien foutu et homogène, n'avait déjà plus cette petite étincelle. Mais alors là, que dire .......... Et ben ouais on s'fait chier, en long, en large et en travers. C'est le néant artistique et emotionnel!

Pidji

Pidji le 28/02/2011 à 09:19:25

Je l'ai écouté qu'une fois mais je n'ai pas été super emballé non plus, j'avoue

mat(taw)

mat(taw) le 28/02/2011 à 10:58:33

Insomniac restera comme le dernier coup de génie du groupe en fait.

l'ogre doux

l'ogre doux le 28/02/2011 à 19:35:44

Et Hail to the thief comporte peut-être 3 des morceaux les plus percutants de la formation depuis Pablo! Mon disque préféré avec The Bend.

Ukhan Kizmiaz

Ukhan Kizmiaz le 28/02/2011 à 19:47:10

ai ré écouté The Bends aujourd'hui

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