Sacred Reich - Awakening

Chronique CD album (31:23)

chronique Sacred Reich - Awakening

Crénom d’une pipe en bois (gare aux échardes mal placées): la dernière fois que Sacred Reich nous avait envoyé une carte postale discographique (une vraie de vraie, longue durée, avec rien que du neuf et du juteux dedans), c’était en 1996, pour la sortie de Heal, sur la pochette duquel les Américains découvraient les joies de la préparation de rôti à même la table d’opération! Et la dernière fois que l’on avait aperçu Phil Rind sur une scène – ça devait être dans le vignoble nantais, aux alentours d’une Main Stage. Oui: quand je dis « on », en fait c’est « je » – celui-ci méritait un premier prix de concours de sosie de John Goodman, sa brioche et son triple menton évoquant plus le canapé de Dan (le mari de Roseanne) que le vétéran vénère de The Big Lebowski. Du coup, si la puce ne nous avait été collée à l’oreille plus tôt cette année via un split avec Iron Reagan, on n’aurait pas parié une boite de Vache Qui Rit sur ce retour aux affaires.

 

Mais les choses ont bien changé ces dernières années, car Phil semble être à nouveau passé du XXXXL au simple XL, et parce que… Attendez voire… Ah non, côté musique, RIEN n’a changé. Simplicité, efficacité, une pointe de Rock’n’Roll, la voix très reconnaissable de Phil, les leads sans fioriture de Wiley Arnett, la frappe de Dave « Je suis aussi chez Machine Head » McClain… Tout juste l'arrivée d'un petit nouveau, Joey Radziwill, à la seconde guitare, histoire de faire baisser la moyenne d’âge. Ce qui a changé par contre, c’est que – même s’il n’a jamais vraiment révolutionné notre vision du Thrash par le passé, et qu’il y a parfois des moments pas hyper folichons sur ses albums précédents – le bon l’emportait toujours sur le mauvais chez Sacred Reich, et l’impression globale laissée pas ses albums était quand même globalement bonne. Mais même les meilleures choses ont une fin, et j’ai bien peur que le réveil qui sonne sur Awakening ne nous voit cette fois nous lever du mauvais pied…

 

Mais vous avez raison: c’est un peu facile de profiter de la toute fin du 2e paragraphe pour égratigner d’un « Bôarff » peu enthousiaste le nouvel album d’un groupe culte sortant d’une longue période de mutisme. Alors argumentons – et tentons de nuancer – un brin. Oui, l’entame de « Awakening » est pêchue. Mais elle est aussi foutrement classique. Et si des fois retrouver ses pénates est une sensation sympathique, ce titre d’ouverture sent surtout le réchauffé et le pilote automatique. Peut-être la dynamique du chant contribue-t-elle à ce triste constat, Phil donnant l’impression d’être sur ses gardes, en mode défensif, plutôt que d'être pleinement partie prenante de l’assaut en cours. Et les saccades simplissimes qui finissent le morceau n’aident pas d'avantage à trouver le ciel plus bleu, cette conclusion sentant la fin d’album de groupe de Thrash teuton de 3e zone. Heureusement – ou pas – avec « Divide & Conquer » s’amorce un mouvement qui va perdurer quasiment jusqu’à la fin: celui des dents de scie. Car là où « Awakening » commençait le festin par une soupe tiède, ce 2nd titre dégage une vraie énergie et une vraie volonté d’en découdre… Ça sent le steak, quoi! Vélocité slayerienne, refrain conquérant… C'est qu'on se mettrait de nouveau à y croire!

 

Sauf que le problème des dents de scie, c’est que les coups de mou suivent immédiatement les pics plus ou moins affûtés. Et ça ne loupe pas sur « Salvation » dont le riff d’entame est plus creux qu’un discours macronien, dont le refrain ne nous tire que quelques  sourires gênés, et dont le premier solo, qui jaillit au bout de 2 minutes, est franchement anémique – et ce ne sont pas les twins maideniennes qui lui embraient le pas qui changent la donne. Ras des pâquerettes, le nombril dans la mousse… Pourtant rappelez-moi: le groupe a près de 35 ans d’expérience, c’est bien ça? Comble du aïe-aïe-aïe: la dent d’après, censée relever un peu le niveau, s’avère malheureusement quelque peu émoussée. Car si le rythme de « Manifest Reality » est relativement enlevé, que les solos retrouvent un peu de lustre et qu’il en transpire une belle hargne urbaine, il n’en demeure pas moins un titre de Thrash relativement téléphoné, pas inventif pour un sou.

 

Et la scie de se retrouver salement édentée sur la suite de la tracklist. Parce que « Killing Machine » oscille entre le « Mouais, OK, tout juste » et le « Bof, préviens moi quand il y aura de l’action… », partagé qu'il est entre un refrain mélodique potable et un riff plat comme Jane Birkin en soins palliatifs. La chevauchée à dos de vieux canasson intitulée « Death Valley » a certes un côté convivial avec ses vieilles santiags et ses accents Blues’n’Rock (fini ici le Metal à excès de vitesse), mais le refrain est bien insuffisant, et puis on sent que la bedaine se met à nous pousser. C’est pas ça qu’on cherche à Thrash city, voyons! « Revolution » nous refile enfin le sourire et offre une dernière pointe de mordant à la scie Awakening, le titre s’avérant aussi speedé que basiquement punky. M’enfin si la compo réveillera peut-être Cromy, tout ça reste sans prétention aucune, même si on apprécie le clin d’œil final aux Beatles. Et patatras, pour finir Sacred Reich se prend les pieds dans son déambulateur sur un « Something To Believe » qui commence par une partie de batterie digne de Tonton Henri quand il est à 3,4 grammes (putain Dave, tu donnes tout là?) avant de dérouler un Thrash’n’Roll tranquillou à basse mignonne mais à électrocardiogramme aussi vallonné que la Beauce.

 

Si Cyrano trouvait l’insulte un peu courte-jeune-homme, alors que dire de cet album du retour? Huit petits morceaux qui correspondent plus à ce que l’on attend d'un groupe animant les soirées Saloon de fin de compétition régionale de rodéo, c’est vraiment le minimum syndical pour un groupe de la trempe de Sacred Reich! Alors oui, on est content de retrouver intacte la patte si spéciale des vieux briscards. Oui, Phil est parfois particulièrement en voix. Oui, on réussit à accrocher de-ci (de scie?) de-là. Sauf que la colonne Débit du bilan Awakening est cette fois franchement plus chargée que sa consœur Crédit. Et ce n’est pas de gaieté de cœur que j’écris cela. Rhaaa, si c’est pas malheureux de devoir mettre ce genre de note, accompagnée des Encouragements du Conseil de Classe, à une telle pointure…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: dieu qu’il est court et qu’il bande mou ce nouveau Sacred Reich! Juré, on les aime bien Phil Rind et sa bande. Mais en dehors d’un « Revolution » au sursaut punky et d’un « Divide & Conquer » presque fringant, cette petite demi-heure (c’est tout?) ne s’avère pas franchement folichonne. Faudrait pas vieillir tiens…

 

photo de Cglaume
le 10/10/2019

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