Aeffect - Theory of Mind
Chronique CD album (51:57)

- Style
Death djento-technique - Label(s)
Autoprod' - Date de sortie
2 juin 2023 - Lieu d'enregistrement Odeholm Audio / Wanderland Recording
- écouter via bandcamp
En ce début de mois de juin orageux (et c'est tant mieux), voici enfin un peu de lumière pour éclairer autrement qu'avec des éclairs les mornes soirées dans les chaumières. Les petits gars de Aeffect sortent leur premier album, Theory of Mind, et les p'tits nuages tout gris n'ont qu'à bien se tenir tant la bonne humeur est communicative. Et puis ils s'y connaissent, en nuages, puisqu'ils viennent de Londres (hop, merci les clichés), et forcément, ça influence l'esprit des compositions et l'envie de s'en sortir.
On a donc ici affaire à un album de pop-punk mélodique lumineux largement influencé par des formations comme Blink 182 et qui.... nooooooooooon je déconne.
Aeffect pataugent dans d'autres eaux, celles de la Tamise donc, bien obscures et insondables, qui worshippent le groove et la dissonance et les riffs dans ta gueule : c'est bien ça, vous avez tout compris, ils vouent un culte à Meshuggah, ont fait tourner les méfaits de Frontierer (qu'ils recommandent d'ailleurs sur leur page bandcamp, en tant que groupe de l'underground extrême britannique qui a tout démonté ; flagrant vers la deuxième minute de « Retraction » par exemple) trouze mille fois, et puis on sent qu'ils ont quelques affinités avec les trucs tech death, aussi (j'ai de temps en temps l'impression d'entendre des relents de Necrophagist, sans les solos)
Alors vous la sentez bien, là, l'estimation de votre compteur à riffs et rythmiques débilement complexes et neurophages ? Vous avez bien réglé les amortisseurs ?
Bon, pas de panique, si vous avez déjà abreuvé la machine des abominations chaotiques des groupes sus-nommés, il devrait être assez entraîné et ne pas risquer la surchauffe. Car en termes de bordel, on est tout de même un cran en-dessous en termes de radicalité, quand bien même les influences sont évidemment là, tout en restant digestes. Par contre, attention, hein, ça reste extrême dans les intentions, et Aeffect sont loin d'être un orchestre qui pourrait être une porte d'entrée évidente vers ces contrées plus.... hostiles et accidentées, disons.
Avec un son et des compos qui s'orientent tendanciellement bien plus en direction du metal que du hardcore, Theory of Mind aura probablement plus de facilités à mettre dans son escarcelle les fans de death plutôt technique et djenty que celles et ceux de mathcore. Et la voix joue un grand rôle là-dedans, puisqu'elle cloue définitivement le style d'ensemble dans le metal : pas spécialement rageuse, ni même très énervée je dirais, c'est une grosse voix fort honnête de metal extrême, mais qui ne franchit pas de palier supplémentaire dans la violence : à peu près la même chose que ce que l'on évoquait musicalement vis-à-vis des groupes phares du style.
L'ensemble de Theory of Mind est assez cohérent, et pour cause, au-delà- du batteur Mike Pitman, tous les autres instruments (ainsi que le chant) sont trustés par Mark Broster, dont on sent qu'il a modelé son bébé pour en faire sa créature, fidèle à ses inspirations et à son envie de jouer compliqué et d'y coller toutes ses idées : avec huit morceaux qui dépassent tous les six minutes (excepté le second, un petiot d'à peine 5:10, pfff) vous en aurez pour vos riffs chuga-chuga (le morceau-titre « Theory of Mind »), vos boucles alambiquées, les sections stupid complexes mathcoro-Frontiererisantes comme annoncées, du groovyyyy (ce riff Meshug'-like aux 2:30 du premier morceau « Patronage » pour mettre dans l'ambiance, la deuxième partie de « Retraction » avec ces blocages sur les notes de basses bendées typiques, le tout début déjà de « Emergent Behaviour ».... oui, tous les morceaux en fait), des basses accordées aussi bas que les espoirs que Cromy ait une révélation emo et une double-pédale qui se fraie régulièrement un chemin alambiqué dans tout ça, doublée d'une caisse claire au son parfait pour le style, et même des zones blackenisées, d'autres qui jouent sur la dissonance cheloue... Bref, y'a du boulot pour assimiler tout ça.
Pour ne rien gâcher, le mix et le son sont l'oeuvre de Boster Odeholm, le même bonhomme que pour Humanity’s Last Breath ou, plus proche du genre pratiqué ici, Vildhjarta. Donc disons que ça marche tout pile poil, c'est fat comme il faut.
Mark Broster a fait le taf pour produire lui-même cet album, collaborant avec les personnes qu'il jugeait les plus qualifiées pour mener à bien ce projet, et le résultat se fait sentir : c'est qualitatif.
Je ne m'étendrai pas plus, vous devriez déjà avoir compris si oui ou non vous allez jeter une écoute à cet album (et je vous pousserais à le faire) : parvenant à recapter régulièrement l'attention par différents artifices qui ont le bon goût d'être assez variés, Aeffect proposent avec Theory of Mind un premier album qui est tout bêtement excellent, et qui servira de carte de visite qui devrait leur ouvrir la porte de la plupart des logis des amateurs et des amatrices de ce style de death djenty, jouant sur l'impact autant que sur la perdition rythmique, et qui parvient à le faire sans en faire trop ou sembler surjoué ou prétentieux. Certes, l'album est long, mais ça ne devrait pas effrayer celles et ceux qui pratiquent le style.
A écouter si vous avez un autel avec des tours jenga à l'effigie de Meshuggah dans votre salon (mais les autres pièces marchent aussi, ce sera l'offre de l'été).
1 COMMENTAIRE
Mark le 04/07/2023 à 22:31:33
Merxi! - a great review, which is a pleasure to read. Very happy that you enjoyed the album.
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