Great Falls - Objects Without Pain
Chronique CD album (53:42)

- Style
Noise-rock / Post-hardcore - Label(s)
Neurot Recordings - Date de sortie
15 septembre 2023 - Lieu d'enregistrement Studio Litho (Seattle)
- écouter via bandcamp
Il y a quelques mois, j'ai eu la chance de voir les New-Yorkais de Unsane en live, et pour résumer avec un jargon professionnel, c'était ce qu'on appelait plus communément une branlée.
Et à l'écoute de ce Objects Without Pain (ce qui est tout de même le lot de tout objet inanimé) de Great Falls, dans un registre similaire, je ne doute pas que leurs concerts infligeraient eux aussi un massage d'oreille interne et de fessier similaire. Les grésillements de mes enceintes alors que j'écoute de nouveau cet album en écrivant cette bafouille insipide m'en sont témoins, mon bureau vibre sous mon clavier.
Parce que ouais, si vous n'aviez pas compris, IL Y A DES BASSES, BORDAYLE.
Et les trois loulous sont loin de débarquer dans le game des musiques sévèrement amplifiées, puisqu'on les a retrouvé dans Kiss It Goodbye, Undertow, Playing Enemy, Bastard Feast ou encore Gaytheist. Et pour couronner le tout, c'est chez Neurot Recordings que sort l'objet, ce qui contribue à éclairer sur le côté bonne ambiance qui règne tout au long de ces huit morceaux massifs. Donc spoiler alert : si vous cherchiez de la feel good music, passez votre chemin et allez plutôt vous aventurer sur les territoires sur lesquels le lapin jaune fait régulièrement son footing alambiqué.
Cet album provoquera certainement un mal de crâne chez celles et ceux qui ont réglé leurs niveaux de tolérance à la saturation sonore plutôt vers le bas de l'échelle. De riffs destructeurs en tensions qui éclatent orages de distorsions, Great Falls portent somme toute très bien leur nom : la sensation de se retrouver bloqué·e sous la pression d'une cascade qui nous tombe sur le coin de la gueule sans discontinuer, avec quelques variations de débit toutefois, mais presque toujours écrasante et remplissant l'espace, quitte à s'y noyer. Ce qui peut rendre l'écoute intégrale un peu éprouvante.
Mais on y trouve cependant un énorme travail réalisé sur les textures, avec plein de détails d'ambiance qui viennent agrémenter le tout (les petits crissements de cordes bien névrotiques sur « The Starveling », gasp, cette voix claire surprenante en mode berceuse à la fin de « Born As An Argument », qui laisse penser.... « c'était juste un mauvais rêve ? »... et ben non), un mur de saturation et une basse au son si typiquement râclant du noise-rock AOP quand elle frappe dès après la paire de minutes d'intro de « Dragged Home Alive », pour ne plus stopper de se faire menaçante jusqu'au bout de l'album. Et que dire de ces quelques passages murmurés par Lillian Albazi, qui par ce contraste si fort qui se crée entre la déferlante et cette 'discrétion' vocale de quelques instants met une pression d'enfer (dès « Dragged Home Alive », avec un « There's no escape » très proche de la réalité qui vient tourner en boucle avant de se faire gratter la gueule par la basse ; ou au début de « Spill in the aisle »).
Tout dans cet album est écrasant et absolument sans pitié, et ce dès les premiers mots « The last few years..... » balancés d'une voix balafrée et écorchée au possible, à l'image de la musique, à la limite de la rupture nerveuse, ce qui correspond aussi très bien à la détresse mentale qui ressort des paroles.
« Trap Feeding », par exemple. On y commence directement dans la tempête totale, avec une tension de dingue, des ralentissements pachydermiques, on a l'impression de se faire marcher dessus, vraiment, et les quelques souffles qu'on reprend ici et là ne sont qu'une façon de survivre un peu plus avant qu'on ne nous replonge la tête sous l'eau. Chez Decibel Magazine, qui ont streamé le disque en avant-première, ils disaient « on ressort de l'écoute de ce disque un peu plus mal qu'on ne l'était avant », et je ne suis pas loin de penser la même chose, mais dans le 'bon' sens du terme, si ça a un quelconque putaing de sens.
Par contre, c'est sûr qu'il faut être dans le mood pour s'envoyer cette petite heure d'inconfort palpable et poisseux d'une traite, l'effort peut être assez exigeant.
Bref, pour tenter de résumer les dégâts collatéraux que provoquent Great Falls sur Objects Without Pain, disons que l'on est dans un grain et une mixture qui allie les râclements de fond de vie de noise-rock à la vieil Unsane aux tessitures post-apocalyptiques ultra-lourdes de Neurosis (sur « Old Words Worn Thin », c'est frappant) et de LLNN.
Tout un programme, donc, parfait pour rentrer dans l'automne.
A écouter avec des bouteilles d'oxygène et un flotteur pour remonter à la surface tant bien que mal.
10 COMMENTAIRES
Molanf le 21/09/2023 à 09:51:28
Moi je l'écoute en slip léopard et chemise hawaïenne OKAYE.
Belle chronique pour 1 des meilleurs albums de l'année, tous styles confondus. Je trouve qu'il s'écoute très bien dans la foulée de 2 autres albums, ceux de Sprain et de Bruxa Maria. Beau trio gagnant au rayon posthardcore noisy malade.
8oris le 21/09/2023 à 12:30:07
Une chronique qui donne envie et qui révèle une galette impressionnante, pleine d'émotions aussi noires que sans faux-semblants...Et hop, dans le panier!
lapaju le 21/09/2023 à 20:30:52
La lecture des chronique de core&co me coûte de plus en plus chère…
Elesdee23 le 22/09/2023 à 00:33:35
Cet album est génial, il a tourné en boucle depuis une semaine....
Mais BRUXA MARIA bordel de merde!!! Merci Molanf, je suis en train de me faire retourner dans tous les sens par Build Yourself A Shrine And Pray, c'est incroyable
Moland le 22/09/2023 à 10:55:30
@Elesdee23 content que ça t'ait plu. Chronique ultime du Bruxa Maria à venir. Tu peux tenter l'album de Sprain. Je trouve qu'il va bien avec les autres.
PS : c'est Moland, pas Molanf. J'ai laissé 1 coquille à mon blase. :)
Arrache coeur le 22/09/2023 à 13:21:47
Mais quelle tuerie cet album. Merci pour la découverte, j'écoute ça en boucle depuis ce matin au taf : c'est efficace haha.
Pingouins le 22/09/2023 à 19:51:38
Oui album fait un peu l'unanimité chez écoute un peu ce genre de conneries en effet. La bonne grosse dose de noirceur qu'il fallait !
Moland le 22/09/2023 à 20:30:38
Pingouins t'as oublié des mots dans ta phrase haha
Pingouins le 22/09/2023 à 21:39:24
Oui bon en même temps des mots y'en a plein dans la chronique alors demmerdez vous hein :p
Moland le 23/09/2023 à 00:32:28
Hahaha cteu pirouette !
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