Pinewalker - Migration

Chronique CD album (43:34)

chronique Pinewalker - Migration

Ils viennent de Salt-Lake City, ils sortent leur premier album en 2019, et balayons de suite la question de l’étiquette, puisque les enfermer dans une case s’avère extrêmement réducteur et n’aurait pour conséquence que de les voir en sortir en défonçant les parois. En clair, Pinewalker, puisque c’est sous ce nom qu’ils officient, offrent avec ce 1e opus une foultitude d’ambiances qui puisent dans divers genres, du doom au death, en passant par le black, mais avec une bonne dose de sludge louchant par moment vers le stoner. Avec un dénominateur commun à l’ensemble des titres : une certaine rage, même quand le chant, par exemple, se montre plus langoureux. De la rage, donc, mais pas sauvage, si on peut se permettre cette nuance. Avec du poil au menton, des aisselles tropicales mais un cœur gros comme un camion transportant des troncs de sequoia sur la route 66.

 

Comme Migration ne compte que 7 titres (pour une durée totale de 43 minutes), permettons-nous de les aborder par le menu. « Sentinel », le titre d’ouverture, dresse le tableau. Ici, on répond à la règle des 3 L du sludge : lourd, lent, (relativement) long. Après une entame hachée, le titre s’alourdit davantage, devient pachydermique, les riffs et la batterie martelant le rythme tel un troupeau de bisons déments. En 6 minutes, le morceau garde sa ligne directive, mais se permet des alternances entre fureur écrasante et saillies plus bondissantes, notamment sur son final. Une fois qu’on a compris où on met les pieds et les oreilles, l’album peut dérouler son programme, en enchaînant sans pause avec un titre plus stoner (« Bone collector »), mais qui garde cette odeur de transpiration dans son ambiance de trot de mastodonte en rut. Très bien, on croit qu’on sait à quoi s’en tenir, mais là où on commence à comprendre que Pinewalker cache plus d’une surprise dans sa musette, c’est lorsque soudain, « Burning earth » nous coupe l’herbe sous le pied, en envoyant sans intro ni transition, sa cavalcade endiablée. La voix devient death, tandis que le titre file à toute allure à travers champs. Court, nerveux, efficace. Logiquement, l’album s’accorde une respiration. Toute relative, puisque cette respiration réside dans l’intro de « Maelstrom », titre de 10 minutes surfant entre sludge gras, doom enroué et post-metal taillé à la hache, avec un solo final épique en diable. Et puisqu’on est dans les soli épiques, pourquoi ne pas en balancer un au début du titre suivant, « Space witch », instrumental mélancolique (notons le passage à la guitare acoustique, tutoyant les grands espaces de l’Ouest américain) habité par une rage sourde. Evidemment, il convient de revenir à la lourdeur qui habite l’ensemble de l’album, dès « Self VS. Self », titre qui sonne comme une ultime chevauchée désespérée.

 

Mais ce qui aurait pu constituer une conclusion parfaite de l’album laisse en réalité la place à un ultime bijou, « The thaw », où le chant s’accorde plus de retenue, se montre mélodique, clair, élégiaque, plaintif. Une belle façon de conclure ce voyage en laissant l’esprit de l’auditeur se diluer dans les derniers soubresauts de l’album, notamment grâce à l’ultime solo, dantesque au possible que ne renierait pas Iron Maiden, oui Môssieu. Comme un baroud d’honneur plein de dignité. En fin de compte, cet album plus que réussi parvient à explorer divers horizons sans se perdre pour autant dans la variété de ses ambiances mais plutôt en exploitant avec un équilibre et une cohérence déconcertants leurs richesses. Une des plus belles découvertes de 2019.

photo de Moland Fengkov
le 11/10/2021

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