Plunger - Unclog Me

Chronique Maxi-cd / EP (17:50)

chronique Plunger - Unclog Me

Ils sont frangins, ont choisi pour emblème la ventouse (« plunger », au pays d'Agassi), se proposent de nous déboucher la tuyauterie en 6 titres, et ont même hérité d'un nom de famille qui pourrait bien sentir la botte italienne : Calabio. Le parallèle avec Mario et Luigi est tellement évident que l'actuelle « photo » officielle du groupe emprunte aux célèbres ambassadeurs de Nintendo leur code couleur et leur finition pixellisée datant de l'époque où l'aîné affrontait Donkey Kong pour la première fois. Sauf que vous n'êtes pas sur Space Invaders webzine, et que ce ne sont pas nos chiottes mais nos canalisations auriculaires que ces jumeaux from San Diego ont le pouvoir de décongestionner. Et pour bien évacuer toutes ces choses pas claires qui pourraient gêner l'écoulement du bon son en direction de nos tympans, Kris & Mark (puisque ce sont leurs prénoms) ont mis au point une mixture aussi imparable que le Destop, quoique beaucoup moins toxique : un mélange explosif constitué à 50 % de bon vieux Funk Metal, et à 50% d'un Doom coloré de Stoner (et inversement).

 

Ô joie : un cocktail inédit non référencé dans l'annuaire des Styles Musicaux Improbables !

 

Sauf qu'il va falloir tempérer les excessives effusions d'enthousiasme auxquelles les mixologues de l'extrême s'apprêtent à s'adonner : et de un, au lieu de réellement mélanger les deux mondes, les Plunger bros ont fait d'Unclog Me un Janus discographique dont les 3 premiers titres sont consacrés à la basse qui slappe et aux facéties vocales, et dont la face B est consacrée à une grande séance de relaxation / décélération (... du coup on évitera de qualifier leur musique de « Fusion », vu qu'on est plus ici dans la juxtaposition). Et de deux, contrairement à Mark & Spencer, Mark & Kris font plus dans la boutique de quartier que dans la grande distribution : en effet leur son n'a pas été façonné dans ce genre de studio qui fait d'autant plus de merveilles que vous ouvrez grand le robinet à dollars.

 

… En même temps leur thématique ce sont les chiottes odorantes, et les cuvettes débordant de cadavres des repas de la veille : une prod hollywoodienne aurait sans doute été déplacée !

 

Mais observons, si vous le voulez bien, les plombiers en action. Leurs outils d'abord : une basse, une batterie, deux jeux de cordes vocales, le minimum vital en somme. Et non, l'absence de guitare ne se fait pas douloureusement ressentir, la disto de la seule basse – tantôt tendue comme un ressort prêt à nous pêter à la gueule, tantôt ronflante comme sur la version Stoner d'un disque de Muse – étant toujours suffisamment monstrueuse pour combler les espaces vides. Avec un tel attirail, les zigs réussissent à composer un Funk Metal narquois, aux propos cartoonesquement nasaux, qui slappe de la basse et saute de plateforme en champis comme on est en droit de l'attendre d'une formation ayant grandi en jouant à la console sous les palmiers californiens, avec en sus un goût de l'absurde semblant hérité de Primus. Au comble de l'inspiration la démarche aboutit à un titre comme « Insistence to be Pissed », qui semble émaner d'un Daffy Duck protestant au beau milieu d'une séance de trampoline.

 

Puis le soleil se faisant plus cuisant et le splif plus violemment chargé, les frangins enlèvent leur souliers et passent en mode slow chilling tranquilou-bilou sur un morceau-titre plus relax que déprimé – oui, on peut avoir le tempo lent, mais pas forcément lourd. Sur « Your Funeral » par contre, on retombe comme le titre l'indique dans un Doom plus propice à la mélancolie, voire aux sanglots, avec un petit goût de Candlemas en fin de bouche. Mais comme il fait beau à San Diego, plutôt que de se morfondre, les loustics préfèrent consacrer leur dernier titre à la douce joie de vivre des 70s et se parent alors de couleurs qui, pour le coup, évoquent celles du Cathedral de l'époque The Ethereal Mirror (la seule que je connaisse vraiment pour être honnête).

 

« C'est n'imp' franchement : à quoi sert de proposer des styles musicaux aussi éloignés les uns des autres sur un même support si c'est pour les cloisonner aussi nettement chacuns dans leur enclos? »

 

L'objection est tout à fait justifiée. Et les frangins essaient d'ailleurs de la désamorcer via un titre unique tentant exceptionnellement la rencontre des deux mondes, « What They Say », sur lequel coexistent des choeurs sabathiens période Ozzy et le mantra d'un disciple obstiné de Les Claypool. On regrettera juste que ledit morceau fasse tourner en boucle deux plans successifs sans jamais vraiment développer plus avant la formule. Alors oui, de ce point de vue Unclog Me est un peu frustrant : on voudrait assister à une véritable fusion de ces différents mondes, et pourquoi pas voir émerger une formule nouvelle, comme ont su le faire Zeal and Ardor et Igorrr... Mais cela n'arrive jamais vraiment. Ce qui est positif toutefois, c'est que quel que soit le registre abordé, Plunger sait écrire des morceaux qui font mouche, et qu'avec uniquement 3 EP sous le coude, le groupe a encore tout l'avenir devant lui... Alors laissons-le ne faire qu'une bouchée du boss de fin de niveau, et attendons patiemment le level up du premier véritable album.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: offrant un yin Funk Metal parent de celui de Primus, et un yang plus nettement Stoner/Doom lorgant tantôt chez Cathedral, tantôt chez Candlemas, sur Unclog Me Plunger ne propose pas une véritable fusion des deux univers, mais plutôt une cohabitation franchement sympathique.

 

 

photo de Cglaume
le 27/06/2022

2 COMMENTAIRES

8oris

8oris le 28/06/2022 à 22:26:23

Tu m'as rendu curieux ! C'est sympa, même si j'ai un peu de mal avec les voix mais le côté Primus est très cool, l'univers est perché-rigolo et ça joue. Si c'est leur premier, ça promet pour la suite!

cglaume

cglaume le 29/06/2022 à 05:29:18

C’est un 3e EP. Mais oui, on peut comparer ça à un premier album :)

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