Sinister Dane - The Claws of Time
Chronique CD album (29:40)

- Style
Funk metal tranquille - Label(s)
Autoproduction - Date de sortie
13 octobre 2023 - Lieu d'enregistrement Sawhorse Studios
- écouter via bandcamp
Mais oui, bien sûr que les années 20s produisent toujours de ces albums de Funk Metal gouailleurs, indice UV 11+, comme on en faisait à la grande époque ! Le problème c’est juste que personne ne nous tient au courant de leurs sorties ! Vous le saviez, vous, que Sinister Dane avait sorti un troisième millésime en octobre dernier (… on parle de 2023 !), quasiment 30 ans après le précédent ? Comment ? Vous ne voyez pas qui est ce Sir Mister Danny ? OK. On va donc devoir en passer par une petite séance de rattrapage…
L’acte de naissance de Sinister Dane a été rédigé au service Etat Civil de la mairie de St Louis, Missouri, en 1988. De par son style et son chant, la formation sera naturellement apparentée à Living Colour… dont elle assurera d’ailleurs la première partie lors d’une tournée en 1991. Mais Sinister Dane, ce sont bien d’autres dates encore, notamment en ouverture de Public Enemy, 24-7 Spyz, et même No Doubt ! C’est également – et surtout – un 2e album sorti chez Columbia, sur lequel on trouve l’hyper croustillant tube « Where’s My Parade » (… allez donc vous régaler en le découvrant / le ré-écoutant ici).
Voilà pour la formation accélérée.
Alors, après tout ce temps : Matt Martin, Donald Williams, Joey Sears et leurs copains ont-ils adopté l’allure raisonnée du déambulateur précautionneux, ou bien roulent-ils toujours des mécaniques, décapotés sur la corniche, comme à l’orée des 90s ? Eh bien musicalement, rien n’a changé, ou presque. Il faut dire que, comme pour les spectacles de magie, il y a un truc : les dix compos nouvelles sont en fait « d’époque », celles-ci ayant été composées entre 1990 et 1995 – elles étaient destinées au successeur immédiat de Sinister Dane. Ce qu’elles sont toujours, au final, vous me direz, et vous aurez raison … Sauf qu’elles nous sont proposées bien plus tard que ce qui était initialement escompté !
Côté énergie, si l’on cherche la petite bête, on pourra effectivement trouver que le passage de trois décennies a légèrement émoussé les lames. On pourra d’ailleurs être tenté de comparer le Sinister Dane dernier cru à un mélange assagi de Living Colour et de FFF. Notez qu’il n’est pas désagréable de prendre le temps, à la cool, sous un parasol, de profiter des décibels joliment nonchalants de titres super décontract’ comme « Again », qui nous ressert un fond de rhum arrangé, ou « Ravens », plus pétillant, mais qui, lui non plus, ne décolle pas complètement du transat.
Attention, The Claws of Time ce n’est pas non plus que du Funk Metal en hamac ! Le morceau-titre, par exemple, alterne micro-séances de relaxation et spasmes guitaristiques en terrain accidenté – ces contrastes fonctionnant rudement bien, d’ailleurs ! Les zigs profitent également de « Too Much Coffee » pour s’adonner l’espace d’une minute et demie particulièrement roots à du punk de fond de garage. Parce que, nom de nom, l’album n’est pas destiné à être vendu à l’office du tourisme de Kingston, Jamaïque ! Plus important encore, The Claws of Time réserve quelques pistes particulièrement juteuses qui, si elles n’atteignent pas le niveau de « Where’s My Parade », marquent quand même efficacement les esprits. Comme « Spitting Poison », à l’indolence déterminée, et à la démarche féline d’autant plus assurée qu’elle peut compter sur les amortisseurs puissants d’une basse redoutable. Comme « Swollen River » également, dont le riff principal, simple mais incisif, se marie judicieusement avec des langueurs plus bluesy.
On modérera tout de même notre enthousiasme, ce retour sur le devant de la scène se trouvant entaché par quelques petits défauts et compos relativement tièdes. Parmi lesquels « Wishing », pas mauvais mais sans éclat, « Snap », au refrain dont on ne sait s’il est inutile ou irritant, ou « Die By The Blade », qui reprend lourdement l’intro dans son intégralité et peine à la transformer en une conclusion convaincante. Sans compter un son pas franchement désagréable, mais un peu râpeux, comme si l’étape de mastering avait été faite à la va vite…
Contrairement aux albums aussi énergiques qu’enthousiasmants d’un Slope, The Claws of Time ne semble donc pas suffisamment armé et sexy pour espérer convaincre un TikTokeur à la mode que le Funk Metal est LE nouveau courant à streamer jusqu’à plus soif. C’est par contre un shoot bienvenu de bonnes vibes ensoleillées, ce genre de feelgood album qui ouvre doucement les vannes à endorphine et colore notre quotidien de couleurs plus vives, tout en faisant vibrer discrètement la corde nostalgique. On le conseille donc chaudement aux vieux fusionophiles…
La chronique, version courte : The Claws of Time, c’est le retour de la revanche de Sinister Dane, 30 ans après l’épisode précédent. Ses couleurs sont à la fois sépia (les compos ont été écrites entre 1990 et 1995) et vives (c’est du Funk Metal, que diable !). Son allure est à la fois nonchalante et décidée. Ses mimiques rappellent Living Colour et FFF. C’est un album à la fois poire et fromage, ensoleillé mais pas non plus brûlant, qui vous garantit une sieste douce sans bousculer vos papilles ni vos certitudes.
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