Terzij De Horde - In One Of These, I Am Your Enemy

Chronique CD album (29:36)

chronique Terzij De Horde - In One Of These, I Am Your Enemy

Après le hardcore de Get Some!, je continue mon voyage aux Pays-Bas mais dans une autre région musicale de ce plat pays qui n’est pas le mien: celle où résonne la musique de Terzij De Horde que je découvre à l’occasion de ce "In One Of These, I Am Your Enemy".
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La vache, difficile de faire une chronique quand tu te fais couper la chique à ce point.

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Commençons par l’artwork parce qu’il se pose là. … Vu de loin, dans la miniature flou d’une plateforme de stream, on a un énième fond flamboyant (ou assimilé), une énième montagne (ou assimilé) en avant-plan avec un énième guerrier (ou assimilé) s'y dressant fièrement. A priori, une énième pochette d’un album de black metal….mais non. Le cliché, saisi par Kellan Hendry, a été pris en Turquie en 2021. 221 000 hectares de forêts réduits en cendres après 14 jours d’un incendie largement reconnu comme conséquence du réchauffement global. Une pochette qui symbolise, me semble-t-il, à merveille, la petitesse de l’homme face aux désastres qu’il a engendrés. Pourquoi payer un graphiste pour illustrer l’horreur quand montrer la réalité y suffit. Car Terzij de Horde, dont le nom provient d'un poème du philosophe vitaliste Hendrik Marsman, est un groupe qui a des choses à dire et le black-metal à la saveur très unique de ce In One Of These, I Am Your Enemy  est le support musical d'une dénonciation, sans ambages, des travers de notre espèce, cette sale engeance.

 

Un black-metal complexe, moderne dans l’écriture, brut de fonderie dans le son; un black-metal qui lorgne subtilement aussi bien vers le prog que vers un post-hardcore doomesque; un black-metal définitivement plus urbain plus que païen mais un black-metal bel et bien méphitique, l'odeur de l'humus ayant été remplacé par celle de l'asphalte. Le niveau de vénéritude de l’interprétation est sans commune mesure. La batterie n’est quasiment que blast et grooves martelants à la martialité sans faiblesse, pas une once de gentillesse. La guitare n’est que riffs malsains vomis dans une distorsion acide, pas une once d’amabilité. La basse n’est quasiment que ciment étouffant, pas une once de sympathie. La voix n’est quasiment que vociférations rageuse, pas une once de bienveillance.

Quasiment par-ci, quasiment par-là mais l'adverbe n'a ici rien de péjoratif car les musiciens, tous excellents, savent moduler les titres, installer des ambiances (par exemple à la sixème minute du titre éponyme ou à la onzième de "Precipice") qui, si elles n’ont rien d’éthérées ou d’aériennes, donnent à l’auditeur de nouvelles perspectives d’écoutes, de nouvelles clés de lecture pour déchiffrer l’évolution du black-metal proposée ici. L’ennui n’est donc jamais au rendez-vous et ce malgré un format particulier avec ses 3 titres de 4, 11 et 13 minutes respectivement. Certains morceaux auraient peut-être pu être scindés en 2 voire 3 morceaux quitte à adopter un track listing à la Catch 33. C'est un plaisir à écouter d'une traite mais on aurait voulu pouvoir revenir sur certains passages bien précis.

 

Le mixage est parfait, une belle couche de vernis sur des prises que l’on devine très raw, capturées en conservant toute la fraîcheur de l’interprétation. La répartition des instruments est parfaite: quoique vous vouliez entendre, vous pourrez l’entendre; tout est esseulable, rien n'est esseulé. Tour de force s’il en est car le résultat sonne toujours uni, complet. Un bloc de ciment sonore à peine pris et sur lequel on aurait déposé un léger voile de brillance.

 

Au-delà d’un groupe, au-delà d’un album, difficile de ne pas s’incliner devant ce black-metal (qu’on hésite presque à encore qualifier ainsi) puissamment moderne qui nous fait (re?)découvrir que, au-delà des étiquettes, au-delà d'une sous-culture et de ses codes, la haine est probablement ce qui peut donner le plus d’énergie à la musique surtout quand on triture ce sentiment, qu’on joue avec ses différentes facettes parvenant ainsi à l’instrumentaliser (au sens littéral du terme) sans jamais lui donner la saveur ridicule du cliché. Non content de maîtriser cela, dans In One Of These, I Am Your Enemy, Terzij de Horde inscrit dans sa musique une dimension contemporaine et urbaine qui résonne parfaitement dans l’actuel…climat.

 

 

On aime bien: le mixage, le style incroyable, l’interprétation magistrale...

On aime moins: le track listing un peu bizarre

photo de 8oris
le 23/08/2022

4 COMMENTAIRES

Seisachtheion

Seisachtheion le 23/08/2022 à 08:55:36

Très bonne came !
Décidément la Hollande...
... Une p'tite lassitude pour le chant toutefois à la fin de chaque écoute.
Un peu frustré également par la durée totale ;)

Pingouins

Pingouins le 23/08/2022 à 11:04:40

Pochette de l'année.
Le morceau titre est vraiment classe.

Seisachtheion

Seisachtheion le 23/08/2022 à 13:55:47

Oui pochette de "feu" !
L'homme et la nature outragée, quel face-à-face !

Freaks

Freaks le 23/08/2022 à 20:22:00

ah ça résonne en ces temps d'apocalypse c'est sûr!
C'est aussi beau que terrifiant..
Franchement pochette de l'année, et en plus c'est bien foutu musicalement parlant..
Belle trouvaille/chronique ;)

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