Wormhole - Almost Human

Être cloisonné, Wormhole n’aime pas ça. Enfin… dans une chambre derrière un écran pour limer leur jeux favoris, Doom 3 et Metroid Prime 2, durant des milliers d’heures, si… au point d’en puiser toute leur inspiration… mais musicalement parlant, non. Les gars de Baltimore ne trouvant d’ailleurs aucun sous-genre qui définisse pertinemment leur style en ont inventé un: le Tech Slam. Après tout… pourquoi se limiter quand tu peux définir tes propres règles? Un peu comme aux prémices de l’hiver, quand tu te retrouves face à ce choix cornélien: raclette ou tartiflette? Ben eux te serviraient une tarticlette. Bref… Almost Human, troisième album des américains est un savant cocktail de Brutal Death et de Slam à la sauce survival-horror spatial.

Tout gamer qui se respecte sait que le temps et la persévérance sont élémentaires afin d’atteindre ses objectifs et c’est au terme d’une quête de sept ans et deux albums (Genesis en 2016 et The Weakest Among Us en 2020) que Sanil Kumar déclarait avoir enfin trouvé le vocaliste dont le groupe rêvait. Tu m’étonnes… Julian Kersey possède la voix d’outre-tombe d’un boss de fin, réduisant le zombie de bases au rang de castrat et qui ne manquera pas de provoquer quelques Alt+F4 chez les âmes sensibles. Depuis ses débuts en 2015, hormis les chanteurs donc, qui ont essuyé plusieurs game over, pas de changement pour un line-up qui affiche clairement l’envie d’émerger de l’underground en signant chez Season of Mist. La production, assurée par le batteur de Hath, AJ Viana, passe aussi au niveau supérieur, pour un rendu de toute propreté, desservant bien le style moderne proposé ici.

Almost Human s’ouvre sur deux pistes à la construction presque similaire, et qui malgré leur ralentissement monstrueux donnant l’impression de se faire piétiner le crâne, feront certainement perdre leur lucidité aux amateurs de dissonance. « System Erase », au fort parfum d’Ulcerate et « Elysiism » mettront aussi en évidence la complémentarité des guitaristes Sanil et Sanjay Kumar, leur complicité fraternelle semblant être un sérieux atout pour les partitions les plus techniques. Durant ces premières minutes, une forme de beauté obscure émane des riffs complexes et catchy mais l’hostilité domine nettement l’ensemble, retranscrivant l’atmosphère suffocante des zones explorées (« Delta Labs ») par notre band de geeks durant, sans doute, de nombreuses nuits blanches. Le chant s’apparente souvent plus au grognement bestial d’un alien en pleine traque, bouche ouverte, bave gluante dégoulinante, dents acérées prêtes à déchiqueter (« Bleeding Teeth Fongus », « Delta Labs »).

Wormhole (litteralemnt : trou de ver) n’est pas un blaze choisit au hasard. « Data Fortress Orbital Stationary » et « Almost Human » captivent par leurs nombreux changements de rythmes. Le jeu de Matt Tillett, batteur à la cadence de tir réglable par variateur, escorté par des guitares alternant entre mise en orbite et pesanteur écrasante généreront régulièrement un sentiment de distorsion temporelle. Le tempo deviendra même élastique, l’espace-temps se courbera sur « The Grand Oscillation », pure gemme noire clôturant l’album où l’on appréciera particulièrement la voix un peu plus en retrait dans le mix, laissant presque transparaître un côté humain.

Alors cette tarticlette ?

Ma foie… plutôt goûtue… et pourtant, je ne suis habituellement pas friand des voix aussi extrêmes, trouvant que l’aspect purement technique empiète trop sur la capacité à transmettre des émotions. Mais ce Almost Human grâce à ses instrumentations modernes et dissonantes, ses variations de rythmes incessantes m’a pris par surprise… comme quoi il faut rester ouvert d’esprit et goûter à tout.

AdicTo

le 19/10/2023