Vestige - Interview du 18/10/2024
Photos © Moland Fengkov
Retranscription : Aldorus Berthier
Bienvenue à la cinquième Seisach’ Metal Night(s) ! Pour commencer, bravo pour vos premières armes ; Season of Mist a fait un super travail pour faire votre promo ! Quelles sont les clés pour lancer efficacement un jeune groupe tel que vous ?
Théodore : … Eh bah, être chez Season of Mist. (rires) Non sérieusement, ça s’est fait de manière très fluide ; je ne sais pas s’il y a vraiment des clés, sinon je dirais s’entourer de personnes avec qui le projet est commun, qui comprennent, comme ça a été le cas pour Season, et qui ont envie de tirer dans le même sens. Et puis même à travers le groupe en lui-même en fait, l’équipe. De manière générale, on a tous des personnalités mais aussi des compétences qui se complètent. Du coup, on tire tous vers le haut avec nos forces et je pense que c’est déjà un bon élément à prendre en compte. La première chose, en fait.
En effet, Janis s’est bien lancé ; « Corrosion » cumule plus de 20 000 streams sur Spotify à l’heure de l’écriture de cette interview en tout cas. Êtes-vous satisfaits de son accueil auprès du public et de la critique ?
Théodore : Ah ouais carrément, complètement satisfaits. (approbation générale) À vrai dire, quand ça a commencé, on ne s’attendait pas à autant d’un coup en fait.
Tout arrive très vite en fait, non ?
Théodore : Personnellement j’ai toujours eu de l’ambition pour Vestige, donc je n’ai jamais voulu me mettre la moindre limite en me disant « Non, ça n’ira pas là » ; par contre, que tout aille très vite comme ça, c’est vrai que ce n’est pas forcément ce qu’on aurait pu prévoir dans un premier temps. Mais du coup tant mieux et on est en effet très contents de ça, qu’il s’agisse de Spotify ou même des retours sur les concerts.
Le communiqué de presse évoque d’ailleurs la création de Vestige à une période mouvementée de ta vie, Théodore ; que peux-tu dire à ce sujet ?
Théodore : En fait, il s’agit d’une période où j’étais en grande remise en question personnelle de par rapport à mes relations mais aussi mes relations avec moi-même. On sortait d’une tournée avec Naraka avec Quentin et P.-A. (Pierre-André Krauser bassiste de Vestige, ndlr), mais aussi avec Thomas (Petit, le guitariste, ndlr), qu’on a rencontré pendant la tournée dans un cadre non-musical. Nous sommes devenus très amis à ce moment-là de ma vie, alors que j’avais beaucoup besoin de créer et que je n’étais absolument pas impliqué dans la création artistique chez Naraka, je n’y faisais que de la session et du live. Par conséquent, j’avais vraiment besoin de sortir quelque chose de par rapport à ce qui m’est arrivé et ce que ça m’a fait réaliser. C’est même un peu le thème de Janis. J’ai donc créé les sons, je les ai présentés à Quentin, P.-A. et Thomas, puis le reste s’est ensuivi.
J’allais justement y venir, à Naraka, qui est toujours actif si je ne m’abuse. De quelle manière ce premier groupe a-t-il jeté les bases du nouveau ? Merci pour les spoilers déjà (rires), mais du coup c’est vraiment une histoire de rencontre qui a généré ce premier album de Vestige ?
Théodore : Par rapport aux rencontres que j’ai faites dans ma vie ? Oui, complètement. Ce que dis souvent des collègues chez Vestige, c’est qu’avant d’être de bons musiciens ce sont surtout des amis. Ça rejoint même un peu ta première question, « quelles sont les bases pour lancer un truc comme ça », eh bien c’est avant tout d’être avec des amis, savoir s’entourer en fait. Ça m’a paru évident que Vestige se ferait avec ce crew-là.
Pour tout ce qui est composition artistique, Naraka n’a rien à voir ; j’ai fait la mienne dans mon coin dans un premier temps et ensuite on a tout revu ensemble. Naraka n’a pas vraiment joué dedans ; c’est vraiment les personnes rencontrées pendant la tournée qui se sont montrées fondamentales.
Je pense que vous ne me contredirez pas si j’affirme que votre genre musical est assez complexe à définir… Par conséquent, pourquoi votre étiquette actuelle se limite au « modern metal » ? Déjà que sa définition reste obscure pour la plupart des metalleux… (rires)
Théodore : Bah voilà, c’est exactement pour ça ! Apparemment il faut absolument donner un genre quand on te pose la question (rires), donc on a hésité entre post-metal, modern metal… Personnellement, je comprends qu’une « case » puisse être nécessaire, mais déjà que moi je n’aime pas faire ça, quand j’ai composé et que tout le monde s’en est imprégné, Vestige au sens large s’est dit qu’on fait ce qu’on aime, ce qu’on a envie de faire avant tout. Derrière il n’y a pas de réflexion en mode « tiens, je vais faire du black ». Typiquement, « Automne » est un morceau très shoegaze, que je voulais conclure par une grosse outro djent, simplement parce que je voulais le faire et je ne me suis pas posé la question. C’est un peu dur de tout faire rentrer dans des cases, donc entre post-metal, modern metal…
Quentin : « Modern », tu peux mettre plein de trucs dedans en fait, c’est le fourre-tout parfait (rires). Le son du groupe de manière générale est assez moderne, du coup ça façonne pas mal ce que chacun peut s’en faire comme idée de style, parce qu’on y trouve beaucoup de choses.
Oui, « modern » ça rentre aussi peut-être un peu dans l’idée du metal qui s’ouvre à énormément de genres maintenant ?
Théodore et Quentin : Oui voilà.
Le featuring de Neige a-t-il bien contribué à la promo de l'album ?
Quentin : Oh oui, je pense. On a tout de suite pu constater à partir du moment où le clip d’« Automne pt. 2 » est sorti : d’un coup, poum-poum-poum, plein d’écoutes et de de gens qui s’intéressent au groupe. Même par rapport au clip qu’on a sorti juste avant, il y a eu un effet boule de neige – « waouh, je l’ai pas fait exprès ! » (note d’Aldorus Berthier : au moins une vingtaine de secondes d’éclats de rires nerveux parasitent ce moment-là de l’enregistrement, je n’ose imaginer le geste que Quentin a pu joindre à la parole au moment de caser cette blague dans l’interview).
Mais du coup, comment vous-êtes vous rencontrés et comment vous êtes-vous débrouillé pour obtenir sa participation au projet ?
Quentin : Ça rejoint typiquement ce que disait Théo tout à l’heure par rapport aux rencontres qu’on a faites pendant la tournée de Naraka, faite avec Cradle of Filth et, justement, Alcest. On y est devenus vraiment amis avec toute l’équipe d’Alcest, et pas seulement les musiciens. C’est aussi comme ça que Théo s’est pas mal rapproché de Neige, ils restent même en contact maintenant mais bon il t’en parlera mieux que moi…
Théodore : Oui, on est tous les deux Parisiens et c’est parti tout simplement. Un de ses meilleurs amis musiciens cherchait un pote pour faire du sport, il lui a parlé de moi et nos cercles se sont un peu rapprochés. Du coup je vois Neige régulièrement, en plus de ce qui est devenu un très bon ami – qui se reconnaîtra ;). Évidemment qu’il y a eu un bon effet de propulsion ; pour rire, je me souviens d’une conversation ressemblant à « Oui oh bah, ce sera tant que ça, je sais pas vraiment si… », et moi de lui répondre « Oh, je crois que tu te rends pas vraiment compte… » (rires). Et quand les retours sur « Automne, pt 2 » sont arrivés justement, à lui de repartir à la charge : « Ah, j’ai vu, c’est pas mal les retours… » et moi de conclure : « (à peine perceptible) Boh, tu déconnes… » (éclats de rires).
Comment se manifeste musicalement parlant cette volonté de faire de Vestige un « projet au fort potentiel de connexion profonde avec les gens, forgeant une expérience collective à travers le langage universel de la musique » (pour citer le communiqué de Season of Mist) ? De quelle manière cette philosophie peut-elle vous propulser encore plus loin dans le secteur du metal ?
Théodore : … wow. (rires)
Quentin : … la réponse D ? (rires)
Théodore : En vrai, ça doit être un peu en lien avec ce pourquoi j’ai écrit Janis : j’ai toujours voulu donner deux couches de lecture à ce premier album. La première, on peut la voir assez simplement en ayant l’impression qu’on parle d’une relation avec quelqu’un, qu’elle soit très forte avec un proche ou amoureuse. La seconde touche plutôt à une relation avec soi-même, et je pense que tout le monde peut se reconnaître, à un moment ou l’autre de sa vie, dans cette nécessité de se poser et comprendre ce qu’il se passait et comment agir. En tout cas, pour Janis, on est vraiment plus dans la réalisation. On parle souvent, dans ces phases difficiles, de guérison, de se rétablir, mais avant tout ça il faut s’abord réaliser qu’il y a quelque chose.
L’équilibre trouvé dans Janis vous satisfait-il, de manière tout à fait personnelle ? Avez-vous d’ores et déjà des pistes pour faire évoluer votre formule ?
Théodore : Oui, Janis a été fait sans concession, et de fait je suis très content d’en être arrivé à ce résultat. C’est tout de même vrai : on a déjà des idées pour la suite, qu’on a hâte d’explorer pour se renouveler tout en gardant l’esprit, l’identité qu’on s’est forgée en studio mais aussi en live. Par rapport à ça, on se dit souvent, en partant d’une idée assez brute, qu’on peut presque la « vestiger » (rires). Peut-être que des idées qui sortent de l’ordinaire finiront par nous arriver, mais on est assez curieux pour ne pas rester sur nos acquis.
Bon, plus personnellement, pour ce qui est de cette année, COREandCO fête ses 20 ans ! (Joyeux anniversaires souhaités) L’occasion pour moi de vous demander : quels rapports entretenez-vous avec la presse, papier comme numérique ? Que peut-elle vous apporter ?
Quentin : Il y a longtemps j’étais plus presse écrite, c’est même comme ça que j’ai découvert plein de groupes. Typiquement, c’est comme ça que j’ai découvert The Old Dead Tree, un groupe avec lequel on va jouer la semaine prochaine [samedi 26 octobre 2024, ndlr] à la Maroquinerie. Je n’ai plus vraiment ce rapport-là vu que, comme pour énormément de gens je pense, il y a moins de consommation de la presse écrite, et c’est plus via les réseaux sociaux que je me renseigne, que je vois passer des choses ou que des amis en partagent. Je ne suis pas forcément abonné mais je consomme énormément par procuration et bouche-à-oreille, maintenant. En termes d’actualité musicale comme de découvertes ; je sais que je suis beaucoup plus difficile maintenant au niveau de mes écoutes et je sais assez rapidement si ça va me plaire ou pas. Il y a très peu de groupes auxquels j’ai vite accroché, et je les écoute pendant un mois sans m’arrêter !
Théodore : Tout pareil mais je pense que je suis pire que toi : j’aime rien (rires), je suis très très dur pour absolument tout. Et par rapport à la presse écrite justement, journaliste est un métier que j’ai eu envie de faire pendant un moment, donc j’y tiens et par rapport aux news je ne me documente quasiment que comme ça. Je ne regarde pas la télévision, c’est très souvent par la presse en ligne. À la fac, je lisais déjà quasiment toutes les news des groupes sur les webzines et puisque j’ai la flemme de follow tous les groupes sur les réseaux sociaux – il y en a trop –, et quand je veux vraiment savoir ce qu’il se passe chez les groupes que j’aime, j’ai quand même gardé le réflexe de m’informer sur le net.
2 COMMENTAIRES
Aldorus Berthier le 14/11/2024 à 10:49:31
Ça m'a flingué quand même la première réaction à la citation du communiqué de SoM. C'est ma question qu'était complètement éclatée au sol, ou bien le label ne le leur a pas montré ? X)
el gep le 20/11/2024 à 23:37:30
Sans doute ils ne s'occupent pas de ce que le label peut bien raconter sur eux, tout simplement.
Les ''communiqués'' de labels ne sont bien souvent que des tissus de conneries, de toutes manières.
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