Marilyn Manson - Mechanical Animals

Chronique CD album (62:30)

chronique Marilyn Manson - Mechanical Animals

Quatrième chronique de Marilyn Manson sur Core And Co. Et quatrième personne différente qui vient foutre son pif dans le cul nauséabond de ce personnage aussi emblématique, iconique – n'en déplaise aux détracteurs – et controversé du metal des années 90's / 2000's. Et certainement un point de vue encore différent sur le bonhomme, son imagerie et surtout sa musique. Je n'irai pas par quatre chemins sur le fond de ma pensée en ce qui le concerne : il peut être sacrément génial dès lors qu'il s'entoure des bonnes personnes qui savent exploiter et tirer son potentiel vers le haut, auquel cas, cela oscille entre la mi-molle et le sacrément dégueulasse auto-parodique. Malheureusement, si l'on prend en compte que le groupe dénombre 28 ans de carrière, le premier cas de figure s'avère bien trop rare car c'est vraiment lorsque le Révérend surprend son monde en sortant de sa zone de confort pour flirter dans des directions inattendues qu'il excelle. C'est notamment ce qu'il s'est passé avec The Pale Emperor en 2015, un véritable retour gagnant après plus d'une douzaine d'années – si ce n'est quinze selon l'indulgence que l'on veut bien faire preuve – où il n'était que l'ombre d'une larve insignifiante. Et pour le coup, je rejoins le cri du cœur poussé par le compère Jull, même si je ne me lâcherais pas forcément au point de dire de lui que c'est l'album parfait. Mais quand même le deuxième album le plus excitant de la carrière de Manson. Pour celui qui remporte la palme, il faut remonter pas mal dans le temps et revenir en 1998. Une jaquette aux teintes claires et cliniques où l'on voit un Manson étrangement affublé, une sorte d'entité assez cybernétique dans l'esprit, à mi-chemin entre l'androgynie et l'hermaphrodisme. C'est sûr que comparé au sombre poisseux ouvertement provocateur d'Antichrist Superstar (1996) et de Holy Wood qui suivra deux ans plus tard – tous deux fort respectables également – Mechanical Animals décontenance et consterne par un contraste saisissant.

 

Si les Américains se faisaient encore chaperonnés deux ans auparavant sur Antichrist Superstar par un Trent Reznor qui s'est révélé décisif sur la direction et la qualité de ce second disque, suintant et transpirant de tout pore le meilleur de Nine Inch Nails musicalement parlant, Mechanical Animals représente le début de l'envol du groupe par eux-mêmes sans le producteur qui les épaulaient pourtant depuis son tout premier jet, Portrait Of An American Family. Le divorce fut particulièrement houleux, ce qui explique sans nul doute le pourquoi du comment d'une telle émancipation sonore. Car Mechanical Animals ne ressemble à aucun autre de ses frères, qu'ils soient aînés ou cadets. Imaginez un Marilyn Manson qui aurait bouffé du David Bowie et on aura posé les grandes lignes de ce troisième opus.

 

A l'instar de son aîné direct, il s'agit là encore d'un concept album. Manson incarne ici deux entités : Oméga et Alpha. Le premier est un alien glam-rockeur au sexe difficilement définissable et drogué tombé sur Terre puis capturé pour être placé dans un groupe nommé The Mechanical Animals. Un clin d’œil plus qu'assumé à David Bowie avec son Ziggy Stardust And The Spiders From Mars. Le second représente Marilyn Manson, en tant qu'artiste tout aussi junkie qu'Oméga, fermant la page Antichrist Superstar, n'arrivant pas à se réinsérer dans la société. Oméga s'avère être l'alter ego d'Alpha puisque les frasques du premier influe directement sur les sentiments du second, d'où le fait que chacun de leurs côtés, ils entreprennent un retour dans une société qu'ils considèrent comme peuplée d'êtres déshumanisés et robotiques (d'où le terme d'animaux mécaniques) afin de chercher le Coma White, une sorte de St-Graal chimique qui leur permettrait enfin de ne faire qu'un.

 

Si la version vinyle isole les deux parties par le biais de deux galettes, la version CD réunit tout sur un seul disque et entremêle même les titres entre eux. Un second placement plus judicieux pour l'écoute dans le sens où Mechanical Animals s'avère plus varié et hétérogène dans son déroulement qui s'étale tout de même sur un peu plus d'une heure. De plus, la compréhension pour celui voulant se plonger dans le concept ne se retrouve nullement remise en cause, les titres liés à l'une ou l'autre des deux parties se distinguant très facilement de par une approche différente musicalement parlant.

 

Délaissant complètement le metal indus' déployé dans Antichrist Superstar, Mechanical Animals emprunte une voie résolument rock aux relents futuristes, presque sophistiqués. Carrément glam dans la partie Oméga où sont réunis les titres les plus dynamiques de l'opus. Après tout, l'extraterrestre est une rockstar et une rockstar n'est rien sans ses hits efficaces et radio-friendly. Et en cela, des « Rock Is Dead » ou encore des « The Dope Show » remplissent très bien leur contrat tant elles rentrent direct dans les boîtes crâniennes en une écoute et donnent instantanément envie de bouger son boule et chanter les refrains à tue-tête. Tant en concert ou en club que sous la douche en se servant du pommeau comme micro de fortune. Mention spéciale à « I Don't Like The Drugs (But The Drugs Like Me) », fun, d'apparence léger mais poignant d'intensité de par l'incursion de chœurs gospel. Ces derniers que l'on retrouve d'ailleurs employés de manière plus éthérée chez son alter ego Alpha avec « The Speed Of Pain ». Un Alpha par ailleurs plus mollasson, donnant plus d'importances aux atmosphères/mélodies sombres et mélancoliques, voire dramatiques (« Coma White »), et au chant plus posé de la part du maître de cérémonie. On y ressentirait presque comme une sorte de voyage introspectif de cet être paumé qui déambule dans un monde où il ne se sent pas à sa place. Tellement étranger et shooté qu'il en déforme complètement la réalité, extrapolant les détails qui le dérangent et dégoûtent au sein de ses congénères pour en arriver à une perception visuelle assez psychotique (« Mechanical Animals », « Dissociative »).

 

On peut considérer Mechanical Animals comme un parfait antagoniste d'Antichrist Superstar. Passant d'un metal indus' noir et cradingue à un rock synthétique et futuriste aux accents presque cybernétiques plutôt lumineux, la fournée de 1998 avait de quoi faire jaser plus d'un fan qui s'attendait et attendait la suite logique de son grand frère. Et pourtant, aussi surprenant que peut être ce retournement de situation, celui-ci s'avère intelligent car rondement mené et judicieux au vu du contexte où le groupe devait complètement s'émanciper de l'ombre de Trent Reznor. En cela, Marilyn Manson impressionne et prouve qu'il possède un certain génie tant le concept interpelle de par deux degrés de lecture (l'un purement narratif et fictif, l'autre bien plus vindicatif et dénonciateur) en utilisant une imagerie moins provocatrice mais tout aussi fascinante. Et avec un album doté d'une aura monstrueuse, qui sait captiver son auditoire qui ne s'ennuie pas durant cette heure de musique. Dommage qu'il ait fallu attendre dix-sept ans pour que Brian Warner nous prouve qu'il ne s'agissait pas juste d'un coup de chance.

photo de Margoth
le 21/05/2017

2 COMMENTAIRES

pidji

pidji le 21/05/2017 à 12:11:44

Clairement 1 de mes préférés voir mon préféré de Manson, justement de par son côté différent .

Eric D-Toorop

Eric D-Toorop le 22/05/2017 à 11:36:15

Belle chronique ;)

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