200 Stab Wounds - Manual Manic Procedures

"T'es pas gêné, toi. Presque un an et demi sans écrire de chroniques et tu oses revenir ? Mais en vrai, tu sais que personne ne t'attendait et que le webzine a très bien continué sa vie sans toi - comme il l'a toujours fait ? J'espère que si tu daignes nous honorer de ta verve, c'est pour de l'exceptionnel, du grandiose, du sublime, pour nous parler d'un groupe expérimental déniché dans une salle de concert sordide lors d'un trek d'un an entre la Roumanie et le Kazakhstan, ou dans les backrooms d'un bar interlope à Berlin, espèce d'escroc. Allez, vas-y, épate nous, Philippe Manoeuvre de caniveau, fais nous rêver, parce que sinon je sens qu'on va tous en avoir vite fait rien à foutre."

Oui, chef, plus d'un an sans écrire, et le pire c'est que je n'ai même pas d'excuse. Je n'étais même pas en voyage humanitaire à Oulan-Bator, mais plutôt à procrastiner et à scroller comme un débile, et l'objet de ma chronique n'a vraiment rien d'exceptionnel. Non, pour tout t'avouer, c'est du death metal, assez basique, pas de l'intello à la Imperial Triumphant, ni du composé au pied à coulisse comme du Gorod, tu verras, c'est assez simple à comprendre. Des guitares accordées plus bas que terre, des grognements, quelques lourdeurs hardcore présentes çà et là pour te mettre un coup de coude en passant. En vérité, des disques comme celui-ci, depuis quelques années, tu en as une pleine charrette chaque vendredi. A la louche tu leur colles entre 5 et 7 sur 10 en fonction de l'humeur du moment et tu n'envisages pas sérieusement d'en mettre un exemplaire sur tes étagères, je le sais.

Alors pourquoi 200 Stab Wounds plus qu'un autre ? Ce disque est formidablement con mais pas autant que les musiciens qui l'ont composé souhaiteraient le faire croire. Parce qu'effectivement, ça ne vole pas bien haut en apparence, mais il y a un sens de l'efficacité et de la concision - 9 titres, 29 minutes, ils ont tout compris - que beaucoup de groupes n'ont pas le goût d'avoir. Parce que même dans un titre aussi bas du front que "Flesh from within" vient se loger un solo de guitare redoutable, parce que quelques claviers à la Sabrina John Carpenter viennent planer sur l'instrumental "Led to the chamber / liquified" et enfin parce que la construction absolument jouissive d'un morceau comme "Defiled Gestation" empile une quantité de riffs à décoiffer ta raie d'enfant de choeur. Non, ce n'est pas avec ce disque que tu pourras élever ton âme et la faire s'envoler vers les cieux immaculés de nouveaux horizons musicaux, c'est plutôt pour flatter tes plus bas instincts, titiller ton cerveau reptilien et te donner ta ration hebdomadaire de musique primitive que tu le sortiras de ton étagère - si toutefois tu condescends à suivre les excellents conseils du parangon de bon goût qui écrit ces lignes.

Alors certes, en conclusion, on classera plutôt Manual Manic Procedures dans la catégorie des efficaces et roboratifs que des chefs d'œuvres immortels, mais le meilleur indicateur n'est-il pas que, quelques mois après sa sortie, il tourne toujours régulièrement sur ma platine sans que la lassitude ne vienne poindre ?

Marc

le 19/12/2024