Bear Ghost - Blasterpiece

Chronique CD album (40:00)

chronique Bear Ghost - Blasterpiece

Arrivé jusqu’à nous sur le dos des premières feuilles mortes de l’automne 2023, Jiminy nous avait fait adorer le retour dans les salles de classe / les premiers barbecues en col roulé / les déboires des habitants du Haut-Karabagh (… maiiiiis non, ohlala : c’était juste histoire de vous remettre dans le bain d’alors). Alors oui, on avait été briefé auparavant, du coup on savait pertinemment que Bear Ghost était censé déboiter sa race… Mais la confirmation avait été tellement magistrale qu’on n’avait pu réprimer un mouvement de surprise heureuse, les sourcils et les commissures des lèvres grimpant pour l’occasion aussi haut qu’ils le pouvaient !

 

Or le lascar qui vous cause a un mal fou à faire comme si un groupe génial n’avait jamais eu de passé. Et il se trouve que le trio de Phoenix a commis un EP en 2014 (on en recausera), puis un premier album, deux ans plus tard. Celui dont il est ici question, c’est ça, bravo les Sherlock ! Opus dont on peut au passage dire qu’il porte assez bien son nom. Car « Blasterpiece » semble être la contraction de « blast » et de « masterpiece ». Or ce dernier signifie « chef d’œuvre », statut que ledit album n’est pas loin de mériter. Quant à « blast », le mot ne fait pas ici référence à une technique de batterie nullement utilisée au cours de ces 40 minutes, mais plutôt à l’expression « What a blast ! » qui signifie « Quelle claque ! » (dans le sens « Quel kiff ! »). Et c’est indéniable, ses onze titres chassent les nuages et font briller grand et fort le soleil à l’intérieur de nos têtes.

 

Paradoxalement, disais-je donc, pas de blast sur Blasterpiece. Car Bear Ghost ne s’adonne que peu au Grind, au Black, au Death, ni à aucun de ces genres qui font pleurer le Petit Jésus. Le créneau de ces joyeux loustics, c’est un Nawak Metal/Rock souriant, qui projette sur l’écran de nos paupières les images bariolées d’une comédie musicale Cartoon Metal pouvant rappeler un Dirt Poor Robins ayant abusé des productions Hanna-Barbera, ou le Moron Police de Defenders of the Small Yard. Les arbres chantent en chœurs avec Baloo, Roger Rabbit galope derrière Alice, des sonorités chiptune croisent une basse à gros bidon : c’est nimp’ et c’est beau. Et pas aussi délirant que je veux bien vous le laisser croire – rassurez-vous, amis clownophobes.

 

On regarde un peu sous le capot ?

 

Je vous parlais de comédie musicale. Et c’est justement le lever de rideau que ce genre de spectacle requiert qui est offert via « Introduction To Blasterpiece », courte pièce affirmant la tonalité décalée, l’approche énergique, et l’attitude joyeusement déterminée caractérisant la musique du trio. Puis la séance de zumba sur ressorts démarre via un « Necromancin' Dancin' » à grosse basse, trépidations Ska et accroche évidente dignes d’un petit-frère facétieux de Toehider. Le crescendo continue en suivant la même pente fortement ascendante pour aboutir sur un « Funkle Phil » dont le seul défaut est de livrer la plus grosse buterie de l’album dès la 3e piste. On vous prévient : une fois intégré, le refrain reste accroché bien fort au ciboulot, et ne vous lâche dès lors plus.

 

Mais même si la médaille d’or est décernée relativement tôt en début de tracklist, d’autres épisodes bondissant nous attendent encore par la suite, tantôt en mode Nawak/Rétro/Swing (on pense aux Triplettes de Belleville, aux VRP, et à l’insouciance des Années Folles sur « Gypsy »), tantôt dans l’exact même registre que Moron Police (tiens, sur « Starkiller »), tantôt à cheval entre Youpi Surf Rock kitch et Youpla western spaghetti (« Hola Adriana »), tantôt dans un registre « grande salade Nawak » (cf. « All At Once »).

Il reste cependant encore un peu de place pour des titres moins notables – bien que pas désagréables – tels que « She-Wrecks » et « Paradise » (plus Soul, et lorgnant d’ailleurs un peu vers Bruno Mars). Ainsi que pour des morceaux dont on pourrait se passer sans verser de chaudes larmes, comme la complainte synthétiquement duveteuse « Sickness For Nothing » qui semble issue d’un album de Muse, ou « Prelude », dont la lente mécanique semble destinée à agiter au ralenti les mouchoirs des aurevoirs – sauf qu’on aurait préféré un fin plus pétillante (décidément, le groupe a du mal à conclure avec panache… cf. « Vulture » sur Jiminy) !

 

Peut-être pas aussi irréprochable que son décoiffant successeur, Blasterpiece n’en reste pas moins un brillant premier album, et une pièce de choix pour quiconque se précipiterait sur sa billetterie préférée s’il apprenait que le Muppet Show était adapté en Comédie Musicale Metal/Rock à gros budget.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: quelque-part entre le Defenders of the Small Yard de Moron Police et une comédie musicale montée par un Dirt Poor Robins endorsé par Tex Avery, Blasterpiece s’avère être un superbe premier album ne faisant qu’à peine moins bien que le Jiminy qui lui succédera sept ans plus tard.

 

 

photo de Cglaume
le 02/06/2024

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