Botgörelsen - Att Kuva det Upproriska Köttet

Chronique CD album (41:06)

chronique Botgörelsen - Att Kuva det Upproriska Köttet

Berlin-Est, RDA, fin des années 1980. Face à une société prisonnière du conformisme d’État, une poignée de personnalités, peintres, dessinateurs, poètes, auteurs de performances, musiciens, ont tenté de créer une subculture, dessinant des espaces de liberté et se plaçant bon an mal à l’abri de la pression institutionnelle. Parmi eux des artistes originaires de Dresde se sont signalés pour leur pratique de … l’autoperforation ! À l’instar de Micha Brendel, l’un des plus reconnus, spécialement pour son œuvre d'art perfor(m)ative appelée Der Mutterseelenalleinring et réalisée en 1989, quelques mois avant la chute du Mur.

 

Ouch, ça fait mal ! Micha Brendel en 1989

 

 

Plus de trente ans plus tard, les images de cette performance ont à ce point marqué un musicien suédois que celui-ci a demandé à l’Autrichien Stefan Rindler (par ailleurs chanteur de Nekrodeus) de s’en inspirer ouvertement pour réaliser l’artwork devant orner la pochette du premier long-format de son projet Botgörelsen. De cet aventurier musical solitaire, on ne sait à peu près … rien ! Son premier album Att Kuva det Upproriska Köttet – comme c’est souvent le cas pour les one-man projects dans le Black Metal – a d’abord fait l’objet d’une sortie sur support numérique en mai 2021. Avant de bénéficier un an plus tard du soutien du label britannique Onism Productions (Tugt, Benthik Zone, Olim, Phreneticum), dont l’esprit et l’esthétique collent bien à l’expression des émotions défendues par ce Botgörelsen (« Pénitence » en suédois). Je me suis immergé et égaré dans les lyrics de ces cinq titres qui étirent durant plus de 40 minutes le portrait d’un « monde noyé dans une lumière sans pitié et sans fin » et pris entre « extase désespérée » et « désespoir extatique ». Y prévalent la culpabilité, la honte, la colère, la haine, la peur débridées, des maux « qu’aucune prière ne peut guérir », au point de chacun est à même de se laisser « tomber de façon incontrôlable dans l’abîme ».

 

Ces paroles inquiètes sont imbibées dans un Black Metal brut, glacial et tourmenté qui pose un voile brumeux sur l’ensemble des compositions. Les influences sont multiples. Alors que débute le premier morceau, le mid-tempo, accompagné par cette guitare bien granuleuse à souhait, sonne très scandinave, très Trve à la Gorgoroth ou à la Dødheimsgard. Ce "Själafiende" m’a même fait penser à d’autres Norvégiens, ceux de Mork ; il claque d’ailleurs comme le dernier album de la bande à Thomas Eriksen aurait dû claquer. Sombre, inquiétant, poisseux. Se dégage en outre une forte identité DSBM (Leviathan, Shining, Psychonaut 4). Normal lorsque les peu recommandables Jef Stuart "Wrest" Whothead et Niklas Kvarforth font partie des écoutes primordiales de ce Botgörelsen. La langueur dysthymique nous guette à maintes reprises ("Klagan för Uteblivna Skördar"). Riche de passages plus mélodiques ("De Fallfärdigas Vallfärd") et versant sur quelques segments plus expérimentaux un soupçon d’avant-garde à l’Imperial Triumphant ("Skänklåt till Solen"), Att Kuva det Upproriska Köttet tire profit d’une écriture indéniablement soignée et complexe. Mais de toute façon, cela était un préalable indispensable, dès lors que cet artiste suédois voulait avec son BM défendre une musique si expressive et tourmentée.

photo de Seisachtheion
le 04/11/2022

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