Death Engine - Mud

Chronique Vinyle 12" (38:25)

chronique Death Engine - Mud

Y a des sujets avec lesquels je peux pas m’empêcher d’être inlassablement en contradiction avec moi même. Si vous suivez un peu le parcours sinueux de mes chroniques sur Core & Co, vous remarquerez certainement que je passe mon temps à dire que la mode du noise hardcore contemporain me casse les burnes avec son attirail de riffs chaotiques, d’influences black metal au rabais et de saturation abusive, voire inutile. Mais d’un autre coté, si la mode me les brise menu, il se trouve que je me retrouve très régulièrement à torcher quelques lignes élogieuses sur une poignée de groupes, souvent français. Un vieux réflexe d’adolescent attardé ? Un élan nostalgique porté sur la scène suisse des années 2000 qui excellait dans cet exercice ? Une manière de dire que je suis jamais content (et que je vous emmerde) ?... Ben j’en sais fichtre foutre rien, mais comme quand on essaye de chasser le naturel, il a la facheuse tendance de revenir au galop, je vais, et de manière totalement légitime, encenser ce premier album de Death Engine.

 

Alors, souvenons-nous : les quatre bretons nous avaient sorti un bref ep de 4 titres il y a deux ans. Ils y distillaient leur amour du nihilisme, de la distorsion, des larsens et de Breach avec goût et ferveur tant et si bien que j’avais pas pu faire autrement que de bloquer bêtement sur ces quatre pistes pendant des semaines. La honte.

 

Du coup, oui, je mentirai si je disais que l’annonce de la sortie d’un (court) album en 2015 ne m’avait pas collé une demi molle mais, vous voyez ma p’tite dame, pondre quatre très bons titres et coller une mandale sur un long format, c’est pas exactement la même chose… Surtout quand on s’inscrit dans une scène hexagonale déjà bien fournie en groupes plus ou moins intéressants (ok, ok, j’arrête avec ça).  Du coup, si j’avais du énoncer mes attentes avant de jeter une oreille baveuse sur cette rondelle, j’aurais probablement dit des conneries du genre « de la maturité, des chansons variées, de la sincérité, de vraies émotions et de grands moments mémorables ».

 

Et ben devinez quoi…

 

… C’est exactement ce que j’ai eu.

 

Niveau maturité, ben c’est cool, rien à dire… En même temps, est ce qu’il veut vraiment dire quoi que ce soit ce mot là ?... En tout cas, il est impossible de ne pas reconnaître que les bretons ont gagné en assurance, tant dans le bordel qu’ils produisent que dans les compos qu’ils torchent. J’aurais même été curieux d’écouter ce disque en aveugle sans savoir qui en était l’auteur. Je suis persuadé que j’aurais demandé ce que c’était et comment j’avais pu passer à coté de ça, le tout avec un filet de bave aux lèvres et des yeux rougis par l’impatience.

 

Concernant les titres variés, ben c’est carton plein là aussi. Malgré le coté assez étriqué du style pratiqué et des influences qui y sont immanquablement liées, il n’y a pas un titre qui ressemble vraiment au précédent. On se mange donc successivement des déflagrations soniques à vous faire saigner les oreilles, des ralentissements vaseux et malsains à souhait, des expérimentations qui sentent bon l’empilement de pédales de fuzz, des détours mélodiques inattendus, des synthés encore moins attendus, des balbutiements de guitare acoustique malade… De toute évidence, nos quatre larrons ne se sont pas du tout contentés de nous pondre sept titres en pilote automatique, mais on préféré se prendre la tronche à deux mains afin de faire de leur premier lp un truc palpitant. L’intention est louable, surtout quand elle donne naissance à un disque aussi varié.

 

Coté émotion, on va la faire court : si Amen, leur premier ep, suintait déjà le malaise et la haine, on pouvait néanmoins lui reprocher de se vautrer un peu trop facilement dans la noirceur : « on s’appelle le « moteur de la mort », on se colle une pochette noire et on crie comme si on allait vraiment pas bien dans nos têtes ». Avec ce premier lp, malgré une pochette blanche cette fois, la donne n’a pas particulièrement changé mais le clou s’enfonce tellement profond et tellement brutalement à chaque hurlement qu’au final, on s’en branle gentiment de savoir si les bretons ont des vies de merde ou pas. La noirceur des compos de Death Engine colle le frisson. Point.

 

Pour finir, je conclurai donc sur les moments de grâce qui traversent ce disque. Les premiers accords dégoulinants de « Medusa », la gratte accoustique nimbée de larsens de « Organs », la conclusion cataclysmique de « Cure », l’accalmie maladive de « Zero », la monstrueuse ligne de basse de « Still », la déflagration radicale de « Entertain » ou encore le mélodies entêtantes de « Negative » sont autant de détails qui effacerons les précédents dans une succession de branlées déculottées que Death Engine nous administre à chaque nouvelle chanson. Putain, même la ghost track du disque avec son petit coté cold / indus mélodique a réussi à me coller un dernier frisson.

 

De deux choses l’une, soit Death Engine a juste sorti le disque que j’attendais avec toute la subjectivité et la mauvaise foi qui peuvent me caractériser, soit ils ont juste pondu un petit chef d’œuvre. Dans les deux cas, la note est méritée.

photo de Swarm
le 09/03/2015

1 COMMENTAIRE

daminoux

daminoux le 09/03/2015 à 13:20:30

superbe kronic. pour un album qui m'a mis une claque ce debut année. c'est un album qui te revois dans tes derniers retranchement un comme les albums thou & body. un enorme surprise.

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