Defiled - Infinite Regress

Chronique CD album (35:17)

chronique Defiled - Infinite Regress

S’il avait un marteau, Defiled cognerait le jour, il cognerait la nuit, il y mettrait tout son cœur. Sauf qu’en fait de conditionnel, les Japonais conjuguent leur bricolage musical à l’indicatif. A l’impératif même, a-t-on envie de dire, devant tant d’impérieuse énergie. Il cognerait, donc, et laisserait volontairement le sèche-cheveu tomber dans la baignoire de l’auditeur. Pas pour l’hommage à Cloclo, non: pour couronner cette avalanche de patates par une bonne vieille châtaigne confectionnée à Fukushima – les amateurs de paniers bio apprécieront.

 

Quand Infinite Regress vient s’inviter sur la platine, l’oreille curieuse passe classiquement par trois phases (la mienne, du moins):

Phase 1, « ramasse tes dents »  ➯ « ‘De dieu comme ça latte! C’est du Pitbull Death Metal, c’est ça? C’est méchant, court sur pattes, bas du front, musculeux… C’est bien simple, on dirait un rejeton issu de la 2e division du Death polonais (Devilyn, Hate, tout ça…) qui aurait été éduqué à la poésie par un second-couteau de la scène allemande (comme Obscenity par exemple). »

 

Phase 2, « poing américain doré à l’or fin » ➯ « Certes les titres sont courts (rarement plus de 2-3 minutes), mais les bougres y calent un max de riffs! « Systematic Decomposition », « Masses in chaos » ou le morceau-titre sont de bons exemples de cet art de l’hyper compression. César (le sculpteur, pas l’empereur!) serait fier. »

 

Phase 3, « pas basique, mais pas captivant » ➯ « OK, une telle masse de plans qui s’enchaînent: Defiled ne doit pas avoir un gros background Punk. Mais même les Progueux les plus généreux peuvent être casse-couilles. Et dis: tu vas le réécouter ce 6e album toi, une fois ta chronique torchée? »

 

Pas sûr, en effet. C’est peut-être ce phénomène qui explique qu’après 28 ans dans les pattes (les années défilent pour Defiled, forcément) et un partenariat qui dure avec Season of Mist, les Japonais peinent à s’imposer. Cet album est solide, et tartine avec une conviction et une force qui ne sont pas loin de rassasier le Cromy qui dort en nous. Mais il y manque le goût de reviens-y. Pas que le propos soit pauvre, ça non. On vous le disait plus haut, cette grosse demi-heure est pleine de riffs. Et malgré une certaine homogénéité de ton et de son, en dehors du bon vieux Death de tradition qui tabasse sec, on peut y dénicher du tortillon technique plein de tressautements (« So Blind » et son arrière-goût d’Atheist), du visqueux qui prend le temps (le début du morceau-titre), des langues de brume glacées qui rappellent les débuts d’Emperor (le premier tiers de « Tragedy »), des craquages Grind/Death (un peu partout de-ci de-là), des accents Punk, Thrash… Et puis de la mélodie épique aussi. Ainsi que – ciel, tant de raffinement? – un lichette de tapping cosmique (au début de « Tragedy », puis à nouveau sur l’outro).   

 

Mais c’est ballot, quand le quatorzième titre s’éteint finalement, si notre estime pour l’album est bien plus grande que ce que les écoutes initiales (et les articles traitant des albums précédents) auraient pu laisser présager, on ne se retrouve pas non plus avec un feu brûlant dans la tripaille. Bref Infinite Regress c’est du bon, du brutal, du belliqueux, pas du balourd non, ni du barbant, mais pas non plus du super bluffant.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: le 6e album de Defiled est un concentré de Death méchant, brutal, court sur pattes et vindicatif comme un pitbull reniflant l’os sous l’étoffe du jean. Derrière des apparences de brute épaisse, on découvre plus de raffinement qu’il n’y parait. Mais pas non plus de ces attributs qui séduisent sur le long terme.

photo de Cglaume
le 10/03/2020

5 COMMENTAIRES

8oris

8oris le 10/03/2020 à 09:39:42

"une bonne vieille châtaigne confectionnée à Fukushima – les amateurs de paniers bio apprécieront.": mon écran est maculé d'une projection de café et de mucus nasal. Merci Lapin! :D

Je ne connaissais pas ce groupe et...je n'aurais pas pu perdu grand chose à ne pas le découvrir. Je n'ai ressenti que la phase 2. Trop de changements pour moi, une impression de travail baclé, des compos vite torchés, mais en même il y a effectivement un petit quelque chose qui sort au fil des écoutes et leur batteur est une vraie machine.
Une note pleinement justifiée et la conclusion itou.

cglaume

cglaume le 10/03/2020 à 11:25:26

Désole pour l'écran :D

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 10/03/2020 à 15:39:39

D'accord avec vous deux: c'est mignon mais ça manque de groove tout ça.

Margoth

Margoth le 10/03/2020 à 16:00:05

C'est marrant, j'ai souvenir d'un album d'eux sorti il y a quelques années où la particularité était qu'ils avaient tenté certains morceaux avec une basse slappée. Le rendu était étonnant et discutable, c'est dommage qu'ils n'aient pas continué dans cette voie parce que l'idée était bonne...

cglaume

cglaume le 10/03/2020 à 17:11:54

Il y a Havok qui a repris ce concept... pour le Thrash par contre :)

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