Dragonbreed - Necrohedon

Chronique CD album (37:54)

chronique Dragonbreed - Necrohedon

Face au raz-de-marée des envois promotionnels qui menace de l’engloutir, le chroniqueur ne réussit à garder la tête hors de l'eau que grâce à quelques stratagèmes ayant fait leurs preuves. Parmi eux, le respect d'au moins deux grosses phases de tri. La première s’effectue sur le genre officiellement affiché. En effet pas besoin qu’un lapin se fatigue l’oreille quand l’attaché(e) de presse annonce la dernière sensation Folk Drone / Indie Sludge / Doom’n’Prog / Dissonant Pop / Stoner lo-fi / Psyché Hardcore, voire Trve Power Musclor Metal… Ceux qui n’auront pas été recalés au terme de ce premier écrémage auront droit à une écoute ciblée passant au tamis du chercheur d'or musical de 1 à 3 morceaux, histoire de déterminer si « Mouôôrf, non ! », « Pas mal, mais trop bateau », « Sympa, mais déjà ras la TODO list » ou « Ah ouais, chan-mé : je prends ! ». En temps normal l’aventure de Necrohedron aurait dû s’arrêter lors de la 2e phase qualificative. Mais lorsque celui-ci s’est présenté devant le jury de Mon Promo a un Incroyable Talent, votre interlocuteur n’avait pas écouté de Melodeath depuis un sacré bail. Et puis il faut reconnaître que le riff sournoisement sexy qui démarre « The Undying », puis la grosse déferlante de barbarie sucrée qui suit – à la fois tellement caractéristique et pourtant tellement jouissive – nous ont drôlement rougi les oreilles. Il y avait indéniablement du plaisir à l’état pur dans ce premier contact ! Alors hop : coreandcorisons joyeusement ce premier album de Dragonbreed – en plus ça ajoutera une petite touche Chtulhu / Poulpy pas dégueu’ sur la page d’accueil !

 

Figurez-vous que cette Race du Dragon au nom sentant fort les d’ssous de bras héroïc fantasy s'avère en fait être un side project dans lequel batifolent les trois quarts du line-up de Suidakra. Oui parce que, alors que nos Teutons en pagne étaient en train de travailler à leur petit dernier (Wolfbite), ils se sont retrouvés avec sur les bras certains titres franchement plus Barbares & Donjons que Bûcherons & Druides. Or l’époque est au recyclage : ils n’allaient pas mettre à la benne tous ces beaux riffs finis à la testostérone quand même ! D’où coup de fil à un ami (Stefan Fiori de Graveworm, au poste de grogneur) et création d’une nouvelle entité toute dévouée à la cause du Melodeath torse-poil.

 

Au vu du synopsis et de l’origine de Dragonbreed (l’Allemagne, donc, terre de traditions métalliques ancestrales), pas besoin d’avoir intégré Ulm pour savoir ce qui attend l’auditeur. Vastes coulées d’un Melodeath aussi chatoyant que musculeux, guitares twins vaillantes jouant les tourbillons de champs de batailles, assauts épiques, feu, sang, ors : on retrouve ce mélange de poils Death, de noirceur shriekée BM et de fougue Heavy qui caractérisait les premiers vagissements des Dark Tranquility et autres In Flames, auxquels s’ajoutent des bourrasques glacées Death / Black et la puissance chaleureuse d’un Death mélodique plus « classique », héritier de Edge of Sanity et Amon Amarth. Les muscles saillants arborent de profondes cicatrices, mais les abords bourrus peinent à cacher que sous cette cuirasse bat un cœur sensible. Vous connaissez la musique, et vous savez donc à quel point la chose peut être kiffante pour peu qu’on oublie que les épées sont en mousse et les heaumes en carton. Et l’auditeur de se prendre donc pour Thor sur l’exaltant « The Undying », de céder à une mâle mélancolie sur « The World Beyond », et de batailler comme un beau diable sur le grisant « Sinister Omen »

 

Contrat rempli mon Loki !

 

On tempérera cependant le plaisir pris à entendre les os craquer et les flèches siffler du fait de quelques menus défauts bien naturels en de telles circonstances, mais néanmoins agaçants aux entournures. C’est qu’en artisan consciencieux Dragonbreed met la satisfaction client parmi ses objectifs premiers. Mais vu le plaisir crasse avec lequel il se vautre dans les clichés lourdingues, il semble qu’il s’imagine le client en question comme un festivalier poilu et ventripotent arborant patches Running Wild / King of Asgard / Finntroll et ayant sa carte de membre de la Confrérie des Metalleux Mangeurs de Pâté de Tête. C’est forcément ce qui explique que l’on retrouve un peu trop souvent ces moments où l’heure est grave et où il est temps de scander des « Hey ! Hey ! Hey ! » à l’unisson avec nos Brozers in blood. Plus souvent encore le groupe se croit obligé de recréer cette ambiance de coin du feu où la guitare se fait acoustique et le guerrier nostalgique, celui-ci se confiant en chant clair à propos de son bouclier brisé, de sa promise éloignée et de ses érections contrariées. Rien de vraiment rédhibitoire, mais à la longue ça finit par gratter les articulations auriculaires (… oui, bon, on n’est pas là pour un cours magistral d’anatomie hein !).

 

Pour le dire avec un peu plus de concision – vous avez vraiment lu tout ce qui précède ? Ça fait chaud au cœur ! – Dragonbreed n’a pas son pareil pour évoquer un monde où un In Flames élevé la hache à la main règne sans partage sur les Royaumes du Nord. On aurait aimé que l’élève soit parfois un peu moins tâcheron, histoire qu’il ait une chance d’égaler ses maîtres, mais même en l’état la copie qu’il nous rend est tout à fait satisfaisante. Inutile de vous dire que les inconditionnels de ce genre de ripailles sucrées mais viriles peuvent ajouter un bon point à la note ici attribuée...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: pour ambiancer vos parties de Warhammer vous hésitez entre ressortir les premiers In Flames et un bon vieux Death mélo de champs de bataille? Essayez donc Necrohedron, le premier Dragonbreed : vous bénéficierez ainsi en prime du capiteux bouquet émanant de Günther, vaillant apprenti charcutier qui finit sa 16e édition du Dungeons & Dragons Fest’ dans une mare de bière tiède et de vieille sueur rance…

photo de Cglaume
le 20/12/2022

4 COMMENTAIRES

Pingouins

Pingouins le 20/12/2022 à 12:34:05

Avec un nom pareil c'était forcément melodeath ou power.

cglaume

cglaume le 22/12/2022 à 09:16:27

Les chances étaient grandes en effet 🙂

noideaforid

noideaforid le 22/12/2022 à 15:11:31

Des muscles,des poils, des épées en mousses, des érections contrariées, des boules en sueurs... Curieusement ça donne envie d'écouter ce que c'est ! Cette manipulation mentale de fou 😂

cglaume

cglaume le 22/12/2022 à 18:28:14

Haha, je ne m’étais pas rendu compte que ma chronique était à ce point Village People haha

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