Dreamwell - Modern Grotesque

Chronique CD album (38:46)

chronique Dreamwell - Modern Grotesque

Alors que la plupart des supports numériques nous font crouler sous les recommandations de choses à faire, à lire, à manger, ou à écouter pour ce qui concerne ce webzine, il faut avouer qu'à moins d'être spécifiquement en recherche de nouvelle musique à se tartiner dans les oreilles, le ratio clic/découverte à suivre (voire même clic tout court) n'est pas ultra positif. En tout cas inversement proportionnel au temps qu'on a passé à écouter de la musique.

 

Mais c'est tout de même par ce biais que Dreamwell m'est tombé un peu par hasard dans les esgourdes au début de l'été, avec ce Modern Grotesque sorti en février. Déjà parce que le titre me rappelait le dernier album de Marilyn Manson auquel j'ai jeté une oreille, en fin de lycée. Et aussi parce que ce souvenir ne collait pas du tout à l'étiquette « screamo » qui était associée au disque qui nous intéresse ici. C'est donc sur la base de cette légère dissonnance cognitive que je me suis lancé dans la quarantaine de minutes de ce deuxième album du quintet originaire de Providence, Rhodes Island.

 

Et bien quand bien même le screamo principalement axé autour de la mélodie, comme le pratique le groupe, n'est clairement pas ma branche favorite du style (et encore moins lorsque certains morceaux viennent s'empêtrer dans les voix claires), Dreamwell a ici des arguments suffisants pour m'avoir fait renouveler l'écoute un certain nombre de fois.

 

D'abord parce que lesdites mélodies, vraiment mises en avant, sont suffisamment variées dans le style et le rythme pour ne pas sembler trop répétitives, mais aussi parce qu'elles sont souvent accompagnées d'un emballage bien plus rentre-dedans mis en œuvre par les autres instruments, qui gardent un aspect passionnel et cathartique essentiel au style et évitent donc généralement l'écueil du trop gnan-gnan larmoyant à mèche teinte en noir (même si, on ne va pas se mentir, on a déjà beaucoup entendu ce genre d'arrangements ces dernières années).

 

Ensuite parce que les parties vocales sont elles aussi plutôt variées, avec des voix hurlées typiquement screamo mais qui vont chercher différentes intonations et émotions, proche de ce qu'on trouvait chez Funeral Diner par exemple. En ce qui concerne les voix claires (« Plague Father, Vermin Son », « The Lost Ballad of Dominic Anneghi »...), comme je le disais, ce n'est clairement pas ma crèmerie et elles auront tendance à m'agacer plutôt qu'autre chose (ce qui était également le cas avec le dernier Devil Sold His Soul), mais je suis tout de même prêt à leur reconnaître une certaine qualité et à supposer que celles et ceux qui apprécient ce type de performance y trouveront largement leur compte. Par ailleurs, plusieurs des morceaux ont été enregistrés en une seule reprise en ce qui concerne les voix, afin de laisser la part belle à l'émotion et d'avoir un rendu proche du live, chose qui tient particulièrement à cœur au groupe.

 

Par ailleurs, l'autre intérêt de ces voix claires et qu'elles permettent de mettre en avant les paroles et le contenu du morceau autour duquel semble s'organiser émotionnellement cet album, « Plague Father, Vermin Son », et ses questionnement sur l'auto-culpabilisation des victimes d'abus, le cauchemar émotionnel de s'enfermer dans l'impression d'avoir été responsable des agressions subies (petit rappel à tout hasard : les agressions sont toujours de la faute des agresseurs, jamais des agressé·e·s).

Emotionnellement donc, mais aussi structurellement, puisqu'on a cette première partie d'album qui déploie un screamo tout à fait honnête et de bonne facture, agrémenté de nombreux breaks mélodiques lumineux et mélancoliques qui vient buter à mi-parcours sur cette piste radicalement différente. Et pour moi, buter est le terme adéquat, puisque je trouve que la suite peine un peu à se relever efficacement. Le reste du disque, la fin, naviguera donc un peu entre les deux tendances, les remixant ici et là. Avec cependant le morceau qui pour moi se détache nettement des autres, l'éponyme « Modern Grotesque », logiquement choisi pour ce rôle au vu de sa complétude, et vient un peu faire mentir la précédente affirmation sur cette fin d'album, pour la modérer avec un terme peut-être plus juste : inégal.

 

Il y a donc de bonnes choses à retenir de cet album de Dreamwell. En premier lieu, on sent que ses membres ont mis du cœur à l'ouvrage pour accoucher d'un disque très personnel et qui leur ressemble, tant du point de vue des émotions que des sursauts cathartiques mis en avant. Les voix hurlées sont très réussies et l'ensemble mélodique généralement plutôt classieux, pour une sorte de mashup entre les Funeral Diner et Devil Sold his Soul déjà cités et des bouts de Suis la Lune, pour donner une idée. On ne va cependant pas se mentir, il manque (très subjectivement) un peu de la fureur punk-hardcore qui a marqué d'autres groupes du style. Mais comme je l'ai déjà signifié plus haut, ce n'est pas ma branche favorite du screamo. Objectivement, il plaira à celles et ceux dont c'est le cas, et probablement pas qu'un peu.

 

A écouter quand il pleut et qu'il y a un peu de soleil quand même, une IPA à la main.

photo de Pingouins
le 03/11/2021

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