Evilness - Unreachable Clarity
Chronique CD album (45:55)

- Style
Death/thrash mélodique - Label(s)
Autoproduction - Sortie
2013 - Lieu d'enregistrement Conkrete studio
- écouter via bandcamp
Avec un nom aussi direct et sans fioriture (... et cliché aussi!) qu’Evilness – qui dit en substance « On n’est pas des mickeys hein, on joue du metal… M’enfin on n’égorge pas non plus des chatons à la scie sauteuse » – on aurait pu s’attendre à ce que ces toulousains pratiquent un hard’n’heavy à la française, genre Manigance / Sortilège, ou un thrash jeans-patches-Kanterbraü bien d’chez nous. Mais le nom de ce 1er EP à rallonge et cette pochette assez classieuse nuancent un peu cette première impression: il pourrait bien y avoir des touches prog, ou du moins une grosse ambition technico-narrativo-mélodique là-dessous.
Et la vérité, c’est que l’on n’est pas tombé si loin que ça de ce que la vitrine pouvait nous laisser entrevoir, Evilness faisant bien dans le méchant-mais-pas-barbare. Comment ça? Eh bien le groupe pratique un death/thrash très mélodique. D'un côté la qualité des parties de guitare apporte cette touche de sophistication suggérée par l’artwork et le titre… Et de l'autre l'aspect plus bourrin hérité du patronyme du combo trouve bien lui aussi un écho dans les « lignes de chant » de Bruno, particulièrement ternes et monocordes. Imaginez-vous la touche « titane & dentelle » d’un metal à la Scandinave façon Insomnium / Soilwork, mais en plus thrash et plus dépouillé, chaussé de vocaux gruikesques trop linéaires, et là paf: devant vos yeux ébahis se dresse Evilness.
Il semblerait toutefois que le groupe soit conscient de ses forces comme de ses faiblesses, car en plus des 7 titres originaux – parmi lesquels l’interlude « Despair and Hope », sans chant aucun –, Unreachable Clarity propose 3 reprises purement instrumentales de « Essence of Bitterness », « Despised Decline » et « Lies, Cries, Died ». Et effectivement, à leur écoute il s’avère que non seulement il ne manque rien à ces interprétations sans postillons, mais qu'en plus on peut même considérer celles-ci comme meilleures que les morceaux dans leur version chantée.
Mais arrêtons-donc de tirer sur le pauvre Bruno pour causer plus globalement de la musique du vil E.Ness. Alors: qu’est-ce qu’il a sous le Capone? (Hum: regarder « Les Incorruptibles » ou picoler, il faut choisir...) Eh bien on vous le disait: les 7 titres proposés sur Unreachable Clarity évoluent entre thrash/death et death/thrash ultra mélodique à tempo moyennement élevé. On baigne donc dans les coulées de riffs gentiment abrasifs, les échappées lead flamboyantes et les chaudes arabesques mélodiques. Si tout ceci sent fort le Grand Nord européen, on y trouve également des influences venant d’un peu moins haut, notamment en provenance du Pestilence de Testimony of the Ancients. Si si, ça s’entend par exemple sur « Essence of Bitterness » (ce riff-essaim d’abeilles à 1:11!), ou sur le tout début de « Burn » qui réveille les souvenirs de « Land of Tears ». Sur « Despair and Hope » par contre, on trempe nos orteils dans l’eau claire d’une parenthèse automnale au détour de laquelle on croit distinguer un petit clin d’œil au « Stairway to Heaven » de qui vous savez (on a envie de fredonner « There’s a lady who’s sure all that glitters is gooold » dès 0:10)... Le genre de respiration de mi-parcours typique qui n’étonnera pas les amateurs de metal Ikea quoi...
En bref, Unreachable Clarity propose de bonnes lampées d'un metal plutôt sympatoche, qu’on apprécie d’autant plus facilement que le son – prod, mix, comme mastering – est très bon, en particulier si l'on considère qu'il s'agit là d'une première sortie autoproduite. Malheureusement il est également vrai que le chant de Bruno ruine un peu notre plaisir et que, malgré un niveau technique très honorable et des compos qui tiennent vraiment la route, on peine à trouver ici des titres à la personnalité suffisamment trempée pour que l’on ait envie de s’en badigeonner régulièrement les feuilles (quoique « Essence of Bitterness » ressorte quand même un peu du lot). Evilness part donc plutôt du bon pied, mais pour franchir le cap d’après, il lui faudra soit développer le petit truc qui fera la différence, soit faire preuve de l’excellence de composition qui a présidé à l’élaboration du magnifique dernier Soilwork, The Living Infinite. M'enfin là, c'est vrai: je mets la barre un poil haut...
La chronique, version courte: Evilness propose un death/thrash hyper mélodique et vraiment agréable sentant fort les Krisprolls. Son point fort: de belles guitares acérées. Son point faible: un chant d’orque monocorde vite lassant.
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