Jars - ДЖРС III

Chronique CD album (44:12)

chronique Jars - ДЖРС III

C’est l’été, il est donc temps de voyager un peu et pour une fois, délaissons les plages du sud et les côtes de l’ouest pour passer à l’est, du côté de Moscou. Alors, vous allez me dire “ouiiii mais..euuuuh..nooon...toooout ça...Noooous, on préfère la plage, c’est un peu tout le temps pareil mais au moins, on connaît. C’est vrai que plus ça va, plus ça sent la pisse mais au moins connaît”. Et bien, non, pour une fois, il est temps de changer d’air et de se faire happer par le bonheur de la découverte fortuite.

 

Formé en 2011, Jars, trio mené par Anton, au passage l’organisateur du festival punk "Moscow's Troyka fest", en est déjà à son sixième rejeton et aura fait le choix de l’appeler 3 (ou III en chiffre romain)...dans un pur esprit contradictoire?

Punk? A priori, oui car dans cette galette de près de 45 minutes, le groupe nous balance sa hargne piquante, musique et texte inclu. Et sans rentrer dans des réflexions sociologico-politiques, je me permets d'affirmer qu'il faut un peu plus de baloches pour chanter "Moscow does not believe in tears, kill then and come, I need you, you owe me, nobody is safe, I'm the boss, I'm God, I'm a cop, kill me soon, I am the state" en Russie que de chanter "La france est une poubelle et nous en sommes les déchets". Jars n'a pas des choses à dire, Jars a un message à faire passer et le fait en mode Gitane Maïs: sans filtre!

Punk? A fortiori oui mais pas seulement, car Jars n’hésite pas à fourrer sa crète dans des squats musicaux où la bière n'est pas plus chère mais où elle a un autre goût.

En résulte, un punk très “élaboré”, pas nécessairement "straight", un punk...progressif! Fichtre, le terme est lâché et je me rends compte de l’énormité de la chose. Tel le découvreur, j’ai l’impression d’avoir mis la main sur ce qui est pourrait être le premier groupe de punk progressif (les commentaires me prouveront, j'espère, l'inverse).

 

Voyez plutôt:

"Curse Curse Curse" a une intro digne d’un tube de Red Fang, puis devient presque ambiant avec son long pont entêtant pour finir dans une ritournelle quasi screamo.

"Which empire are you", 6 minutes 53 au compteur, avec son intro dans le style le plus basique qui soit (un skank de batterie pour les jargonneurs), puis la guitare rentre avec ce riff à la rythmique quasi mathcore avant d’enchaîner avec un espèce de pont qui alterne guitare timide sous-mixée avec des fortissimos d’un trio transformé en orchestre de plus en plus noisy (#eargasm) avant de clôturer le tout en reprenant une dernière fois la ritournelle chaloupée du début. Couillu mais ça passe.

"Ultramarathon" et sa basse bourdonnante, sa voix digne d’un Jacob Bannon (Converge) portée par un instrumental hardcore mélodique. Et bam, v’là t’y pas que ça enchaîne avec un petit riff en single notes digne d’un Dillinger Escape Plan. A peine, tu t’habitues, tu t’installes et tu es bien que le groupe enchaîne avec un plan à la Queen Of The Stone Age. Incroyable!

Et "Mechanism", on en parle? Sérieux, cette intro! On dirait quasiment du U2 mais cette montée, mes enfants, cette montée! C’est encore mieux branlée que la mayonnaise de Mamie Jacqueline! La batterie métronomique, bien au centre, bénéficie d’un mix quasi jazzy et est propulsée en métronome d’ambiance avant de laisser la place à une voix digne des groupes de de la fin des années 80 complètement dopés à l’anti-tussif. Le morceau continue de s’étirer dans une lente ascension aérienne, un genre d’Escher musical mû par une évolution vers un style plus free avec ce saxophone absolument dantesque. Vous vous demandez comment sonne un saxo punk ? Ne cherchez pas plus loin, vous y êtes et ca bute. Bravo au passage à Anton Ponomarev pour sa prestation.

Et ça continue encore et encore. "I need enemies" et son intensité criante, ses envolées magnifiques. "SpeedCop", pas le meilleur titre mais pas le moins efficace, et dans tous les cas, un pur défouloir bouclé en 1:42. "Moscow does not believe in tears" et son côté indus crado n’en finit pas de nous étonner sur la diversité de la palette musicale du groupe.

 

Le son est bon, tout le monde est là, est bien nourri, bien logé, le squat est crade mais on y est bien. Ca joue parfaitement et ça a la gnac. Les guitares sonnent la mort, la basse aussi même si parfois un peu trop en ronde pour le style (on aurait parfois attendu quelque chose de plus agressif et granuleux) . Globalement, le mixage a un côté un peu DIY mais qui sied parfaitement à l’esprit de l’album et met tout le monde à l’honneur.

 

 

Chroniqueur, c’est très ingrat. Plus on écoute d’albums et plus on est blasé, plus on attend quelque chose de nouveau, on veut de l’original et on espère du surprenant. Beaucoup d’entre nous ont abandonné, rompus dans leur élan épistolaire par la monotonie des sorties, qui s’enchaînent et se ressemblent bien trop souvent. Pour les courageux qui s’accrochent, fort heureusement, il est des groupes qui savent remettre un coup de boost à leur foi pas totalement perdue. Jars est un de ces groupes, de ceux qui n’hésitent pas détricotter un style usé jusqu’à la corde pour essayer d'en créer un nouveau. Leur post-punk-progressif est aussi efficace et sincère qu'entêtant et surprenant, il ne souffre en tout cas d'aucun défaut.

 

On aime: l'énergie du punk (et son esprit réellement contestataire), la versatilité du prog dans une formule maîtrisée et parfaitement amenée, le solo de Saxophone

On aime moins: je continue de chercher, dès que j'ai trouvé, je vous fais signe!

photo de 8oris
le 11/08/2021

9 COMMENTAIRES

cglaume

cglaume le 11/08/2021 à 11:59:02

Le Post-Punk, c'est pas une sorte de Punk progressif déjà quelque-part ? :P

Crom

Crom le 11/08/2021 à 12:08:34

Non pas forcément lapin, c'est du punk pour hipsters, c'est tout. 

8oris

8oris le 11/08/2021 à 14:17:17

Pour moi:
- "post-X" c'est quand on introduit dans un style X des éléments qui n'ont rien à faire là (ou pas grand chose). 
- "X progressif", c'est quand on casse les structures classiques (couplet/refrain/couplet/refrain/pont/refrain) en conservant un style X 

Bref, là, c'est vraiment pas un truc de hipster qui se masturbent la barbe en faisant le Social justice Warrior derrière un clavier en ronce de noyer à 300 balles.

cglaume

cglaume le 11/08/2021 à 15:27:50

Du coup le Nawak c'est de la Post-Fusion progressive, c'est ça :D ?

8oris

8oris le 11/08/2021 à 16:13:53

Le nawak de base, oui!
Le gros nawak, c'est l'inverse, c'est de la progressive-fusion-post
Le méga nawak, c'est de la propost-fugressive-sion
Le super méga nawak, c'est de la PrtiiosnFegspusoovsre

Crom

Crom le 11/08/2021 à 18:56:48

Je parlais du post-punk. J'ai une vision très rétrograde du punk. Dès les 80's il y avait déjà du post-punk, l'étiquette faisait très branchouille rapport aux prolos keupons débiles 

AdriLugosi

AdriLugosi le 11/08/2021 à 21:36:28

Énorme cet album, merci de l'avoir chroniqué !

Eric D-Toorop

Eric D-Toorop le 13/08/2021 à 22:08:42

Nouvelle bonne pioche pour les gars de P.O.G.O records (du coup, forcément que du punk y'en a dedans).

Xuaterc

Xuaterc le 14/08/2021 à 13:18:14

Et le post Nawak, tendance progressive?

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