La Jungle - Blurry Landscapes

Chronique CD album (38:58)

chronique La Jungle - Blurry Landscapes

Blurry Landscapes est un autre de ces albums “COVID”, une réponse à l’impossibilité de faire des concerts ou même de répéter, une nécessité permettant aux groupes de continuer à avancer artistiquement bon an mal an, un album composé dans la bizarrerie d’une situation inédite jusque-là par le duo Belge La Jungle qui signe là son sixième album. Quelques éléments de contexte supplémentaires semblent nécessaires. Plus qu'un simple album, le groupe s’est associé pour l'occasion avec le “Art et Marges Museum” de Bruxelles et a sélectionné 10 artistes oeuvrant dans l'art brut à qui chacun des 10 morceaux de l’album a été présenté. Charge alors à chaque artiste de choisir un titre pour un des morceaux et créer une oeuvre à partir de ce dernier. Les réalisations en résultant sont visibles dans l’édition vinyle de l’album.

 

Bien que je ne connaissais rien du groupe, si j’en crois les quelques excellentes et alléchantes chroniques de leurs précédentes production (ici, ou encore à cet endroit), tout porte à croire qu’ils n’ont pas changé leur fusil d’épaule et continuent à développer un post-rock aux allures de transe méditative composé, arrangé, mixé et présenté avec un inaltérable talent associée à une belle maîtrise et une complète maturité. Maîtrise et maturité qui servent pleinement l’efficacité d’un groupe que l’on devine pourtant continuant à expérimenter, essayant, jouant avec les boucles, exploitant tout le potentiel de motifs simples mais qui fonctionnent parfaitement, les agençant avec un souci profond de l’arrangement et une véritable maîtrise de la dynamique.

 

Autour de sa base guitare/batterie instrumentale (la voix est parfois présente mais assez discrètement sur l'ensemble) un peu post-rock shoe-gaze (qui plaira à ceux qui apprécient Pneu, Poil, Chien Bernard et autre TFT), le groupe bricole, décore, agrémente, construit, ajoute des incursions électro légères, des ambiances quasi-tribales, ethno-musicales, renforçant de samples, ds petits bruits, de petits trucs et despetits machins, des petits "on ne sait pas que c’est, mais on sait que ça le fait”.

Le résultat fonctionne parfaitement, on se laisse emporter sans mal par, plus que la musique, cette bande son rock dansante qui pourra s’apprécier seul aussi bien que dans la promiscuité entraînante d’une salle de concert.

Blurry Landscapes se défendra sans aucun mal sur scène et suscitera la pleine adhésion du public à la recherche d’une expérience musicale qui ne passerait pas que par les oreilles.

 

Si la batterie est des fois pleines d’expressivité et joliment groovy ("The Marvelous Forest Of Our Dream", le beat de "Hatching The Light" et son charley cyclothymique d’une saveur incroyable), elle paraît parfois minimaliste dans la mesure où ça manque parfois de fills pour amener un peu de relance, ponctuer le groove. A contrario, des éléments souvent délaissés par les manieurs de fûts (toms, cloche) sont ici beaucoup plus exploités, une originalité bienvenue et qui sert parfaitement la volonté du groupe de nous emmener vers des ambiances tribales ou en tout cas différentes.

 

Le mixage comme la production a un goût très analo, quasi-live, avec l’idée très prégnante de ce côté “art brut” mais très propre et avec ce petit grain sonore qui pourra prendre tout son sens sur vinyle.

 

 

Aucune faute de goût, pas de pieds dans le plats ni de gros sabots, si ce n'est ce côté volontairement très répétitif parfois qui lassera ceux qui aiment une musique moins expérimentale. Aussi, on y reviendra plus rarement qu'un album plus "pop" dans son intention, moins intimiste, moins personnel. On a la sensation d'être au milieu de l'oeuvre de deux artistes sans qu'on puisse totalement pouvoir s'en emparer. Mais c'est une sensation que j'ai souvent avec ce style de musique très laborantine, expérimentante, proposée sur un fond de post-rock électro: tellement planant qu'on s'en éloigne un peu pendant l'écoute, de façon quasi systémique, c'est une musique qui nous relâche plutôt qu'elle nous attrape, toute entrainante qu'elle puisse être.
Et pourtant, malgré son nom, le paysage proposé par La Jungle dans Blurry Landscapes est très clair, à l’avenant de ce qu’ils ont pu proposer par le passé. Elaboré de manière particulière comme une réponse à contexte particulier, c’est la sixième preuve que le duo maîtrise son style, son propos et la manière de le partager avec un public qui ne pourra aller qu’en s’élargissant étant donné la richesse dansante de ce post-rock infusé d’une volonté artistique brut, intéressante et originale. J'avoue ne pas les connaître assez pour savoir si l'album dénote d'une évolution quelconque mais pour ceux comme moi qui ne connaîtraient pas et qui seraient ouverts à bien des styles, cet album donne clairement de découvrir le reste de leur discographie.

 

 

On aime bien: un post-rock shamanique qui fonctionne

On aime moins : une batterie qui manque un peu de relief

photo de 8oris
le 14/10/2023

1 COMMENTAIRE

Moland

Moland le 14/10/2023 à 13:34:30

Découvert au Festival Frisson Acidulé, incroyable, l'énergie qu'ils déploient sur scène.  Créant un vortex apocalyptique dans le public. 
Bien ouej, la chronique 

AJOUTER UN COMMENTAIRE

anonyme


évènements

  • ULTHA au Glazart à Paris le 27 juin 2025
  • Seisach' 6 les 17 et 18 octobre 2025
  • Devil's days à Barsac les 9 et 10 mai 2025