Los Fabulosos Cadillacs - Fabulosos Calavera

Chronique CD album (62:02)

chronique Los Fabulosos Cadillacs - Fabulosos Calavera

Cela semblait étonnant, aussi. Que les anglophones n’aient pas un terme pour englober toutes ces formations qui ont prospéré dans les traces de Mr. Bungle. Pourquoi les Français – avec le "Nawak Metal", si si, c’est officiel – et les Australiens – avec le "Circus Metal" – seraient-ils les seuls à avoir une étiquette à accoler à tous ces groupes zébulonnant derrière Patton et ses potes ? Alors oui, je sais : les Australiens sont anglophones. Mais ils ne sont pas représentatifs de la totalité du cheptel. Et leur « Circus Metal » n’a pas dépassé les frontières de l’Océanie, là-bas, tout au fond à droite. Quant aux « Bunglecore », « WTF Metal » et autres « Avant-Garde Cartoon Surf Rock » sur lesquels on peut tomber à l’occasion, ceux-ci sont utilisés faute de mieux, sans volonté de s'inscrire dans une continuité ni de respecter une catégorisation mûrement réfléchie.

 

C’est au beau milieu de ce règne de l'à peu près que, surgissant du fin fond de cette fourmillante malle aux trésors qu’est le site www.rateyourmusic.com, apparût sans crier gare « Sporkcore ». Lequel terme embrasse une large portion de ces albums que les nawakophiles avertis considèrent comme des incontournables. Jugez plutôt :

Et en effet, quand on googlise la chose, on en trouve de belles poignées d'occurrences, de ci et de là…

 

Mais il serait temps d’en venir à Los Fabulosos Cadillacs, car c’est pour eux que l’on se trouve rassemblés en ces lieux. Eh bien c’est via l’une des listes RYM ci-dessus que votre interlocuteur est tombé sur ces Argentins. Et non, il ne s’agit pas d’un obscur gang de mariachis camés au Pulco Champi’. Ce groupe de Ska s'avère être une institution en Amérique hispanophone. Formée en 1984, actuellement signée chez Sony, la formation a 12 albums dans sa besace. Et Fabulosos Calavera – le 8e de ceux-ci (si l’on ne compte pas les live) – est certifié Platine, et a valu à ses créateurs de recevoir le Grammy Awards du « Best Latin Rock, Urban or Alternative Album ».

 

... Parce que je ne vous parle pas uniquement de démos éditées à 100 exemplaire par des clodos albanais, non mais !

 

Vous avez peut-être tiqué en lisant « groupe de Ska ». N’ayez crainte : Fabulosos Calavera est un peu le Life Is but a Dream..., ou le Feel Sorry For The Fanatics si vous préférez – bref, un écart notable (un grand écart même) – dans la discographie des zigotos. Celui-ci est en effet particulièrement expérimental, plus sombre qu’à l’accoutumée, s’aventurant notamment dans le Punk, le Metal, et le Jazz en plus de son ancrage naturel dans les musiques latines.

 

Et c’est pour cette raison que celui-ci s'est vu invité au sein de la Nawak family. Car en plus de s'éparpiller aux quatre vents, l’album déborde d’une énergie hilare témoignant d’un groupe en train de s’en payer une bonne tranche. Ce contexte explique en revanche la frustration que les uns et les autres pourront potentiellement ressentir : 1) du côté des fans, qui se trouvent brinquebalés loin de leurs pantoufles musicales 2) mais aussi du côté des nawak-addicts, qui se retrouvent avec une grosse poignée de titres monochromes, aussi éloignés du Metal que des mélanges tutti frutti qui les font habituellement bicher.

Et forcément, on partage les difficultés des seconds.

- Parce que, si « El Carnicero de Giles/Sueño » pratique 5% du temps une espèce de Death/Thrash rugueux, le reste du planning est consacré à une sorte de Jazz lounge animé par un Manu Chao comatant dans son hamac.

- Parce que « A Amigo J.V. » n’est que Jazz bluesy déprimant au petit matin, dans les brumes laiteuses d’un jour à peine naissant.

- Parce que « Hoy Lloré Canción » se secoue les maracas quelque-part entre le Buena Vista Social Club et « La Colegiala » (rappelez-vous, amis vieux croutons, la pub Nescafé et son petit train).

- Parce que « Calaveras y Diablitos » nous joue un Reggae indolent et cuivré pour rasta hispano.

- Parce que sur « Amnesia » un Eros Ramazzotti argentin laisse dégouliner son Rock tristoune le long du comptoir.

- Et parce que « A.D.R.B. (En Busca Eterna) » propose un Tango décalé semblant interprété par des Négresses Vertes pas complètement sérieuses, mais presque.

 

Par contre, pour ce qui est du reste des morceaux – ce qui fait encore sept titres (je ne compte pas les deux « radio edits » qui ferment la marche) – c’est la Fiesta Tralala, le jumelage Bedlam / Buenos Aires, le Festival du Nimp’ Joyeux. Avec comme munitions principales, en sus des genres déjà évoqués plus loin là-haut, de la guitare funky, du chant barré, des cuivres en veux-tu en voilà, de belles ambiances cinématographiques, et du-soleil-du-soleil-du-soleil. Si l’on veut décrire cette pétillante sélection de manière aussi lapidaire que lacunaire, on pourra parler d’un mélange O’Funk’illo / Secret Chiefs 3. Mais évidemment, on serait loin du compte. Le principal étant toutefois qu’on se régale.

- Sur le tube « El Muerto », où un Carlos Santana en état second (mais ayant emprunté du speed à Infectious Grooves) fait chauffer méchamment ses percussions.

- Sur le plus tubesque encore « Surfer Calavera », très typé débuts des 80s, et par ailleurs doté d’une basse énorme, qui allie indolence cubaine, punkeries débraillées, rêveries de bord de plage et Mano Negra.

- Sur le beau méli-mélo « Sábato », qui zigue et zague entre funkeries floridiennes vintage, tension métallique, chœurs Nawak et bordel mexicain.

- Sur « Howen », qui chevauche à dos de Surf Rock hispano jusqu’à un saloon tenu par Tarantino.

- Sur « Il Pajarito », qui pratique là encore le Surf Rock, mais dans sa version arabo-andalouse, et dans une tonalité largement plus barrée.

- Sur un « Niño Diamante » qui propose une sorte de variation sur le « Take Five » du Dave Brubeck Quartet – mais qui malheureusement finit par nous perdre lors de solos / impros pas toujours sexy.

- Et sur un « Piazzolla » qui pratique un Nawak Metal pur jus, speedé, cuivré, ébouriffé, éminemment visuel et joyeux.

 

Indigeste cette chronique ? Ma foi, oui. Longue, et un peu trop « liste de courses ». Mais c’est que l’album est dense… Allez en tirer la substantifique moelle en seulement deux courts paragraphes bourrés ras la gueule, vous, si ça vous semble faisable !

J’avoue que je n’ai su, ni voulu le faire.

Retenez malgré tout que, bien que pas uniformément Nawak, Fabulosos Calavera est un album excellent, haut en couleurs et fort en soleil. Un bain bouillonnant d’énergie latine débridée. Qui vous satisfera d’autant plus que vous n’avez rien, entre deux albums de Mr. Bungle, contre un peu de Chico Buarque (ah non merde : il est brésilien !).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte : Fabulosos Calavera, c’est O’Funk’illo, les Secret Chiefs 3, la Mano Negra et Los Gringos de Machu Picchu (cherchez pas : j’invente) qui brainstorment de concert pour sortir le meilleur album possible. Treize morceaux improbables, parfois bordélico-joyeux, parfois uniformément Jazz. Ou Tango. Ou Surf Rock. Ou Reggae. Mais toujours pleins de soleil et de feeling. Pas un pur bain d’Amérique du Sud 100% certifié conforme. Ni du pur Nawak Metal consacré sur l'autel de Mr. Bungle. Plutôt un entre deux très sympa – mais qui en frustrera sans doute certains. Il y a toujours des grincheux de toutes façons…

 

photo de Cglaume
le 18/02/2024

2 COMMENTAIRES

Pingouins

Pingouins le 18/02/2024 à 16:03:19

Ah la vache les Fabulosos Cadillacs !
Effectivement je confirme, ça tournait beaucoup quand j'ai passé une année en Amérique du Sud y'a..... plus de quinze ans.
Merci pour le rappel de leur existence je les avais complètement oubliés !

cglaume

cglaume le 18/02/2024 à 17:36:50

Le dimanche, c'est fait pour ça 😁

AJOUTER UN COMMENTAIRE

anonyme


évènements

  • Seisach' 6 les 17 et 18 octobre 2025
  • ULTHA au Glazart à Paris le 27 juin 2025
  • Devil's days à Barsac les 9 et 10 mai 2025