Obituary - Dying of Everything

Chronique CD album (44:57)

chronique Obituary - Dying of Everything

Tu aimes patauger dans le Death baveux, dodeliner de la nuque sans penser au lendemain, et te rouler des oinj’ sur des rythmiques et riffs pépères qui évitent de vriller les nerfs et de faire tomber des boulettes de shit sur le tapis ? Obituary est donc déjà ton ami. Si ce n’est le cas, vu tes goûts et la teneur de leurs dix albums (sans compter le petit nouveau), c’est que tu es un être plein de contradictions. Du genre qui râle parce que l’hôpital et l’enseignement publics sont dans un état lamentable, mais qui échange son bulletin de vote contre des promesses de moins d'impôt. Mais on a confiance en toi, ami(e) mélomane habitué(e) des lieux : si tu as entrepris la lecture de cette chronique étiquetée « Death groovy et baveux », c’est que tu connais le groupe des frères Tardy, que tu sais que The End Complete est l’album de Death Metal qui a le plus vendu au monde, et que tu as conscience que, si le groupe s’était formé en Europe, il serait une version allemande – fiabilité, inflexibilité & traditions – de Grave.

 

Qu'y a-t-il donc sous le capot de ce onzième album ?  « Du nouveau, de l’inédit ? » ** Bîîîîîîîîînnn ! ** (bruit de buzzer pour mauvaise réponse / smiley qui pleure). « Le meilleur album des Floridiens, manifestant un regain d’inspiration inespéré ? » ** Bîîîîîîîîînnn ! ** (la même). « Un album de Death groovy et baveux, qui fait le taf comme le groupe l’a toujours fait, sans faillir ni en coller plus haut que le bord ? » ** Tou-lou-louuuup ! ** (buzzer de bonne réponse / smiley souriant). Bien vu Jacky : rien de neuf, c’est la teuf, le groupe ne cherche pas à se faire plus gros que le bœuf.

 

Ce n’est pas parce que le Covid est passé par là et que ça a donné à nos rednecks préférés l’occasion de retourner taquiner la muse que cela allait les pousser à explorer le registre Tech/Prog ou à entamer la lecture de « Le Gravity Blast pour les Nuls ». Non, les gars ont toujours vendu des albums et tourné par le vaste monde en se contentant de touiller quelques notes avec quelques infrabasses dans du jus de guitare grésillant, et ni eux ni nous ne voyons pourquoi cela aurait dû changer. D’où Dying of Everything, opus dont la seule originalité (pour eux, pas pour nous !) consiste en cette pochette de Mariusz Lewandowski, sans doute l’une des toutes dernières réalisées par celui-ci, l’artiste s’étant éteint en juillet dernier.

 

Vu qu’il est encore frais et dispo, sur le seuil d’une tracklist de 10 morceaux pesant trois quarts d’heure de disto’ fessue, le groupe se lance d’un pas vif et décidé dans « Barely Alive », morceau qui cavale plus vite que la moyenne, à un point tel que le confectionneur de bédo évoqué en début de chronique aura du mal à rouler sereinement son 3 feuilles à son écoute. Les Américains s’y montrent belliqueux comme un Chuck Schuldiner pré-90s, dégainent un solo bouillonnant semblant sortir tout droit de From Beyond (Massacre) : bref, c’est la teuf à Tampa, tout le monde à poil aux Morrisound, c’est Obituary qui régale ! Puis stupeur : « The Wrong Time » démarre sur une note étonnamment emprunte de profondeur atmosphérique… Vont-ils développer un thème, poser des ambiances, voire inviter Christopher Lee à lire un texte de Charles Robert Maturin ? Non, rassurez-vous : le morceau retombe rapidement dans l’habituelle coulée de lave guitaristique servie sur son matelas groovy mid tempo et sa sauce aussi répétitive qu’entêtante.

 

Mais vous savez comme moi qu’avec cette recette simplissime destinée à une efficacité maximale, c’est quitte ou double. Pile, on rentre dans le trip, on ferme les yeux, on se laisse entraîner dans ces accueillantes abysses qui parlent avec gourmandise à notre cerveau reptilien. Face, on se fait chier sur des plans routiniers et poussifs, on erre l’œil hagard le long de compos paresseuses, à la rythmique flasque et à l’accroche honteusement facile. Et s’il est vrai qu’avec l’expérience le groupe évite de plus en plus les pires écueils de l’écriture en mode automatique, il ne réussit pour autant pas à éviter les bâillements sur « Without a Conscience », les grimaces sur le début d’un « Weaponize the Hate » franchement terne, ni le blues sur un « Be Warned » conclusif trop grassement Doom pour être pleinement satisfaisant. Sans parler de « War » qui cache un peu trop sa relative frugalité derrière le gimmick éculé du « Pan pan j’ai collé des bruits d’artillerie dans le morceau, ça le fait trop ! »… On note quand même que ce dernier nous offre un riff interrogatif plus inspiré, ainsi qu’un solo franchement bonnard – une constante tout au long de cette nouvelle cuvée... Alors on ne cassera pas trop de sucre sur son dos.

 

Néanmoins, comme le verre est également à moitié plein, on reconnaitra que les Floridiens savent nous emmener avec eux dans ce grand mouvement de balancier groovy & gras-du-bide qui repose tellement le cerveau. On les suit donc avec joie et abandon sur les deux premiers titres précédemment évoqués, mais également sur « My Will To Live », sur un « By The Dawn » bénéficiant d’un solo de David Austin (Nasty Savage) et d’une intro dont les 4 notes renvoient directement à « Infernal Death » (cf. Scream Bloody Gore), ou encore sur un « Torn Apart » gaillard, qui fait d’autant plus mouche qu’à ce stade de la tracklist on est devenu un peu moins exigeant. Et puis à force de poncer la galette, on se rend compte que les lascars se permettent quelques petites originalités de-ci de-là, comme ce court break étonnant, totalement acoustique, à 3:09 sur « War », ou ces discrètes inclusions de pédale wha-wha gouailleuse sur « My Will To Live » (tiens, à 2:26 par exemple).

 

S'il s'avérait que certains manifestent un enthousiasme débridé en évoquant Dying of Everything, ceux-ci seraient à coup sûr très très (très !) bon public. Car il ne s’agit là de rien d'autre que de l’un de ces albums « Bas du Front, Frais dans l’caleçon » auxquels Obituary nous a habitués depuis des années. Mais il est vrai que la chose est agréable, efficace, pas prise de tête : exactement ce qu’on attend des Floridiens. C’est donc avec en tête ce contexte bien particulier qu’on profite le mieux de ce petit dernier, comme d’un Vendredi 13 épisode 24 sans invention ni frustration particulières… Après tout pourquoi en vouloir toujours plus ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: éternel artisan d'un Death baveux aussi groovy que peu véloce, Obituary arrive aujourd’hui à l’étape du 11e album marquant 35 ans de bons et loyaux services. Parfois balourde et routinière, parfois juteuse et envoûtante, sa popotte roborative et simple lave le dedans du crâne sans se soucier de passer le plumeau dans les coins, et s’apprécie d’autant mieux qu’on n’en attend pas plus que ça…

 

photo de Cglaume
le 01/02/2023

4 COMMENTAIRES

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 01/02/2023 à 10:18:50

Oui, le baveux, c'est la vie !

Xuaterc

Xuaterc le 01/02/2023 à 11:49:49

Plutôt qu'un bédo, ça serait de la Meth, demande à Allen West

cglaume

cglaume le 01/02/2023 à 11:57:03

Haha en effet…

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 15/12/2024 à 19:18:11

En réécoute là : il est quand même bien bonnard.

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