Chokebore - Black Black

Chronique CD album (52 minutes)

chronique Chokebore - Black Black

1998, le grunge se meurt. Pearl Jam n’en finit plus de sortir son album Yield, Alice In Chains s’étiole à mesure que Layne Staley se noie dans une dépression morbide, Soundgarden s’enlise dans des querelles internes et voilà déjà 4 ans que Kurt s’est fait suicider. Sale temps pour les jeans troués…

Plutôt que d’aller à son chevet, Chokebore enterre le grunge. Ni plus ni moins un solde de tout compte. Le gang hawaïen, encore tout auréolé d’un A Taste For Bitters à fleur de peau, continue donc son éloge de la lenteur avec Black Black sorti en 1998.

Certes, Chokebore ne composera jamais le tube de l’été. Et tant mieux ! Non, leur truc à eux se situerait plus dans la déconstruction des formats préétablis. Dans la mise en abîme. Dans une ode aux âmes désabusées par un monde allant toujours trop vite. Une fausse torpeur contemplative.

Chokebore est malgré tout un groupe pop. Et anti-pop aussi. Bref, un groupe atypique, plein.

 

Habité comme jamais par un Troy B Von Balthazar en pleine possession de ses moyens, Black Black n’est pas un concept album. Ouvrant sur un « Speed Of Sound » tout en finesse avec des rythmiques délicieusement anorexiques, le down tempo lancinant de l’album fait entrevoir une lumière perdue. La flamme est pour autant bien vive. Les chansons sont ciselées et entêtantes. Plus que de proposer des tubes faciles, Black Black emmène vers des contrées pleines de nuances. Chokebore sait tout faire: du titre pop lofi en mono riff « Sad Getting Sadder », à des choses aériennes plus post rock (« Every Move A Picture » ou « Lives Like Satellites »), en passant par la power pop classieuse (« You Are The Sunshine Of My Life » ou « The Perfect Date »).  Spleen électrique.

Flegmatique, Chokebore entretient le mystère qui l’entoure et distille son talent sans forcer les choses. Une attitude de surfer hawaïen : attendre que la bonne vague arrive pour mieux la prendre à contresens. Si Black Black a fait feu, les tournées qui ont suivi en ont fait tout autant. Flamboyant sur scène, le groupe a réussi à convertir même les plus sceptiques par des prestations bluffantes de maîtrise et d’énergie. Indé jusqu’au bout des ongles, les quatre d’Honolulu n’ont pourtant pas eu la même destinée que certains de leurs contemporains. De galères en galères, leurs différents labels ont tous fermé boutique les uns après les autres. Chokebore, que Cobain considérait comme son groupe préféré, serait-il un groupe maudit ? Peut-être, mais contre vents et marées, ce groupe a su survivre aux années 2000 et proposer une musique envoûtante, organique et originale. Enjambant tous les cadavres semés sur son passage, Chokebore suit sa propre route et apprend à survivre à ses détracteurs. Beau temps pour les jeans à trouer…

photo de Geoffrey Fatbastard
le 24/07/2011

3 COMMENTAIRES

Ukhan Kizmiaz

Ukhan Kizmiaz le 24/07/2011 à 20:05:43

Probablement l'un des tous grands disques du genre à ranger aux côtés du Challenge for a civilized society d'Unwound.

Belle chronique ^^

Wild Thing

Wild Thing le 03/08/2011 à 16:53:11

Fabuleux de voir une chronique de cet album ressortir aujourd"hui, tellement il aurait pu sortir hier...Anti pop absolue, oui, surtout dans le sens "anti-joie"! lol Cet album m'a beaucoup marqué à sa sortie, accompagnant des instants aussi noirs que les ambiances de Chokebore.

Merci pour ce flash back!

Geoff FtBsTrD

Geoff FtBsTrD le 04/08/2011 à 10:13:01

Je crois que je me suis mis à faire du webzinat juste pour ce genre de comments... Merci à toi, Wild Thing!

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