Mr. Bungle - Mr. Bungle

Chronique CD album (1:13:15)

chronique Mr. Bungle - Mr. Bungle

Les requêtes du Prêtre Nawak (ou comment sournoisement détourner les clauses d'exclusivité naïvement signées par notre léporidé glaumesque au sein de son ancien terrier) – Épisode 1

 

Vous vous en étonnerez sûrement de me voir signer cette présente chronique dans le sens où Mr. Bungle, c'est LE candidat de plume glaumesque par excellence. Eh bien, figurez-vous que même s'il aurait sans doute bien voulu la faire, le pauvre est pieds et mains liés dans le sens où il est encore emprisonné des chaînes de son ancienne crèmerie qui lui a fait signé à l'époque une clause d'exclusivité. Sous la torture, vous vous en doutez bien. Et comme il y a tout un panel d'autres groupes dans ce même cas de figure, il est possible que la série s'étende sur d'autres croustillades dans le futur. C'est donc Bibi, sous la gentille demande du prêtre Nawak en chef, qui se doit de rectifier l'absence du triptyque discographique de la toute première troupe de Mike Patton, ayant vu le jour bien avant son intégration au sein de Faith No More, dans la base du site. Si honorée aurais-je dû me sentir, je dois bien admettre avoir comme une petite vague de haine, toute en cordialité. Et pour cause, traiter de Mr. Bungle – à l'instar de Faith No More d'ailleurs – pour moi, c'est comme ouvrir une boîte de Pandore. D'où le fait que je ne peux me résoudre à les noter, ni même d'en parler avec beaucoup de recul, d'objectivité ou quelconque approche critique dite « journalistique ». Et puis merde, fuck la conscience professionnelle, ce n'est pas comme si ça allait me garnir le compte en banque après tout !

 

Même si le pire à aborder reste sans aucun doute le suivant, Disco Volante, relater ce premier méfait éponyme me fait bien serrer mes petites fesses enflammées. Parler de son album de chevet (ex-æquo avec le Angel Dust de vous-savez-qui), ça fait autant fantasmer que ça effraie. Tellement de choses à dire et tellement peu en même temps. D'autant plus lorsqu'il appartient à un registre musical aussi bigarré et nawak rendant l'exercice basiquement ardu pour tout chroniqueur en herbe. Le gourou en chef s'étant franchement bien appliqué dans le registre « j'analyse la teneur musicale en tentant de la décrire de la manière la plus terre-à-terre que possible mais avec décontraction pour que ça passe mieux », je vous laisse son discours juste là, histoire d'élargir le spectre des perceptions et me permettre d'aborder le sujet autrement. *Attention, ceci n'est nullement un placement de produit inter-concurrentiel, il s'agit uniquement d'un petit renvoi de balle d'usage lié à un esprit de solidarité interne !*

 

En quoi cet album éponyme m'a plus marqué et botté que ses deux petits frères, pourtant plus soignés, choyés et maîtrisés dans leur genre ? C'est vrai que cette carte de visite, compilant et/ou finalisant en réalité des titres issus des démos parues depuis 1985 coproduits par le grand John Zorn en personne, est certainement ce qu'on pourrait appeler la forme primitive de l'entité Mr. Bungle. Point de ligne réellement directrice, tout s'entremêle et/ou s'enchaîne sans véritable retenue de manière assez brute de décoffrage. En cela, cet éponyme représente un véritable patchwork de tous les éléments, chacun construit façon silex préhistorique, qui caractérisent Mr. Bungle, disposés d'une manière extrêmement bordélique, tendance foutoir organisé. Ajoutez à ça que cette galette reste la plus ancrée dans la mouvance groovy 90's, le spectre The Real Thing planant de manière fort insistante au-dessus d'elle, et cela nous amène à un constat assez sordide : voilà certainement l'opus ayant le plus subi les affres du temps.

 

Cela paraîtra peut-être has-been pour certains, je trouve malgré tout que l'addition de tout ce que j'ai évoqué précédemment donne en ce Mr. Bungle un charme fou. Et ne fait qu'enfoncer le clou de ce que j'ai toujours pensé de ce disque depuis ma toute première écoute : il s'agit en réalité de la BO cachée du final du film d'horreur totalement foutraque Society*. Ce qui est d'autant plus valable avec le temps qui passe, rendant les effets spéciaux complètement nanardesques alors qu'ils avaient pourtant été pleinement récompensés à l'époque, en 1989. Alors, certes, le parallèle vous semblera très certainement capillotracté mais c'est bel est bien ça qui m'a d'emblée foutu un coup de pied à l'estomac lorsque j'ai découvert cet album. Car à mon sens, ce sont les images les plus concrètes qui décrivent le mieux toute les ambiances, thématiques et étrangeté qui émanent de cet opus éponyme en terme sonore. Et le pire, c'est qu'il y a fort à parier que d'un côté comme de l'autre, c'est totalement fortuit. Le timing similaire écarte pas mal la possibilité que l'un ait pu pleinement s'inspirer de l'autre, les compositions ayant été faites avant la sortie dudit film qui n'a, de plus, trouvé distribution américaine qu'un an après la sortie de l'album.

 

« Quote Unquote (Travolta) », de par son ambiance vertigineuse et profondément malsaine, se pose un peu comme la découverte de l'orgie finale du film. Celle où ce pauvre mec se retrouve pris par toute cette armada de la secte dans sa quasi-intégralité, où l'on commence à être confronté à ce gros festival de chair latex qui fond et s'entremêle. Ce gros moment de surprise intervenant sans crier gare alors que tout le reste du film auparavant s'était déroulé de manière somme toute convenue et sans réelle exubérance visuelle. Une entrée en matière pour l'album éponyme qui, de la même manière, entortille les boyaux de malaise, et se révèle marquante de par sa singularité. Car au final, même si le malaise ne disparaît jamais spécialement sur le reste de l'album, il se trouve adouci par une touche plus guillerette. Une sorte de cabaret cirquesque, comme le fait Society dans la suite de son final une fois le choc passé. Après tout, comment peut-on prendre des fist dans le cul où les doigts ressortent par la bouche ou l'apparition d'un mec ayant littéralement la tête dans le cul au sérieux ? Certes, c'est dérangeant en terme moral mais les effets d'une autre époque permettant l’exhibition visuelle d'un tel spectacle ne fait que d'autant plus enfoncer le kitsch de la situation. Et en cela, de titre en titre, Mr. Bungle parvient comme à en capturer son essence, afin de présenter, en bon Mr. Loyal sonore matérialisé sous la forme d'une troupe de cirque fanfaronnante de l'étrange, toutes les facettes entremêlées de ce spectacle : décadence aussi grotesque que malsaine rehaussée d'une bonne dose de perversité cradingue mais sachant toujours conserver une grosse part de légèreté guillerette et sautillante. Se permettant même de lorgner parfois vers l'avant-final du film comme sur « The Girls Of Porn » qui aurait parfaitement pu se coller sur la scène nanardesque de la plage.

 

Bref, les différentes ambiances se collent et/ou se succèdent de la même manière que les styles musicaux explorés. Ce qui donne un disque véritablement fascinant. Car l'on sait que tout n'est pas maîtrisé au sein de cette entité mais on sent pertinemment que ce premier album éponyme arrive à aller bien au-dessus du statut de « petit chimiste en herbe qui mélange tous ses produits de manière hasardeuse ». La personnalité extravagante et singulière de Mr. Bungle est déjà bel et bien là, sous sa forme la plus brute. Et elle marque tellement qu'on peut parler de traumatisme : elle peut se montrer aussi attirante/trippante que répulsive. Et le réécouter aujourd'hui, au lendemain de l'annonce du Hellfest 2018 donne sacrément envie de dire à Mike Patton qui sera là avec Dead Cross de venir avec ses potos Spruance, Dunn & co dans sa valise, histoire qu'ils aillent déloger un peu les Pastors Of Muppets – qu'on apprécie mais qu'on entend un peu trop jusqu'à l’écœurement sur quatre jours au HellCity Square tous les ans – dans un show sauvage et improvisé d'un Mr. Bungle dont la dissolution nous a laissé un bien grand vide au sein de la scène nawak.

 

 

 

* Si vous n'avez pas vu ce film, je ne peux que vous le conseiller, ne serait-ce que pour la culture cinématographique de l'étrange tendance nanardesque. Si ce trip perché ne vous tente pas mais que vous restez désireux de mieux comprendre les comparaisons que je peux en faire, je vous conseille de regarder cette vidéo qui le résume et juge très bien en moins de dix minutes, images du film à l'appui.

photo de Margoth
le 04/02/2018

4 COMMENTAIRES

cglaume

cglaume le 04/02/2018 à 10:01:56

** Coeur avec les doigts **

cglaume

cglaume le 04/02/2018 à 10:14:53

La comparaison avec le final de Society est un angle d'approche génie et osé !

cglaume

cglaume le 04/02/2018 à 10:51:29

Génial, pas génie

gulo gulo

gulo gulo le 04/02/2018 à 13:04:58

Leur meilleur album.

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