Aortes - Devouring Gloom
Chronique CD album (46:43)

- Style
Dark post metal - Label(s)
Autoproduction - Date de sortie
28 février 2023 - écouter via bandcamp
C'est forts d'une bonne dizaine d'années du groupe de ses géniteurs que nous parvient Devouring Gloom depuis Vilnius en Lituanie.
Cet album est pourtant le premier qui se fera sous ce patronyme, on ne peut plus 'joie-de-vivre', d'Aortes, puisque le quatuor évoluait précédemment en tant qu'Autism.
Comme beaucoup d'autres groupes à travers le monde, les années pandémiques et leur lot de turpitudes personnelles et collectives ont fait évoluer le line-up (désormais composés de deux membres de Red Water et de deux de Gilzeh), lui-même ayant une incidence sur le style de composition du groupe, qui a fini par changer de nom pour marquer cette différence, et donc cette évolution de leur musique.
Si le précédent album Have You Found Peace ? (sorti sous le nom d'Autism, donc, en 2019), évoluait déjà dans les sphères en 'post', qu'elles soient metal ou hardcore, proche des Rosetta ou Callisto, Devouring Gloom vient se courber dans un virage beaucoup plus sombre et écorché qui emprunte bien plus à Amenra.
Dans le chant déjà, où le chant hurlé plutôt puissant et growlé d'auparavant laisse à présent la place à une écorchure à mi-chemin entre celui de Colin des Belges précédemment cités et celui de Bryan Garris de Knocked Loose, avec une tendance un peu plus blacky-shrieky (sur « Lay My Bones » par exemple), ce qui fait ressurgir un impact moins contemplatif et plus dévastateur (ou dévasté) du côté des émotions transmises.
Pour prendre un autre exemple un peu décalé, le premier morceau « While I Wilt » et son ambiance bien dark viennent me rappeler les sursauts erratiques de Lingua Ignota sur « Do You Doubt Me Traitor » dans ses hurlements frénétiques et désespérés, bien qu'on en soit musicalement très éloigné.
Dans la musique aussi, puisque l'ensemble est assez raw et constitué de pas mal de friction sonore, pour une abrasion des conduits auditifs et un album qui porte bien son nom de par sa noirceur envahissante. A noter un excellent dernier morceau au titre là encore très adapté (« Immersion »), mais aussi – et plus surprenant – une reprise de « Something In The Way » de Nirvana, qu'on ne s'imaginerait pas repris par une formation telle qu'Aortes.
Et pourtant, son caractère mid-tempo en fait effectivement un candidat à la post-metallisation, et le résultat est somme toute intéressant.
Si cet album est parfois un peu trop souvent sur le fil de ses influences Amenra-esques, il parvient tout de même à faire suffisamment de pas de côté pour éviter de s'y enfermer et conserver sa propre interprétation du post metal / post hardcore.
Devouring Gloom s'adressera donc avant tout à celles et ceux qui aiment leur post-metal bien sombre et sludgy, et surtout sans envolées aériennes : le flot qui coule dans cet album d'Aortes est un flux presque toujours souterrain, malgré quelques rares lignes plus mélodiques ici et là, mais qui viennent plus ajouter à l'aspect plombant et dark que chercher à mettre un peu de lumière par-dessus les obscurs paysages décrits.
Car comme le groupe le décrit lui-même, « les thèmes centraux de cet album sont la lutte avec ce sentiment de submersion par le désespoir, l'abandon, la solitude – ou, comme nous l'avons imaginé – une obscurité qui vous entoure et vous dévore. Parfois, on trouve la force de la combattre. D'autres fois, on admet sa défaite. Mais il y a toujours de l'espoir ».
A écouter comme pour faire du canoé-kayak sur un fleuve souterrain, et sans piles de rechange pour la frontale. A vous de trouver la sortie.
1 COMMENTAIRE
Vincent Bouvier le 27/04/2023 à 20:28:17
La reprise de Nirvana est certes inattendue, mais pour le coup, elle vraiment pas déplaisante... Elle y incorpore un "dynamisme rageux" doublée d'une profonde obscurité qui en font une relecture vraiment intéressante.
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