Epoch Of Unlight - At War With the Multiverse

Chronique CD album (42:52)

chronique Epoch Of Unlight - At War With the Multiverse

Énoncé du problème :

Soit un chroniqueur pouvant scribouiller au mieux 2-3 papiers par semaine.

Soit un flux d'envois promotionnels au débit moyen d'une vingtaine d'albums nouveaux par jour.

Question : comment faire rentrer cette multitude de carrés musicaux impatients d'être jaugés dans le petit triangle étriqué de l'agenda chroniquatoire, sans empiéter sur les obligations professionnelles, personnelles, et l'intégrité du système nerveux auriculaire ?

Vous avez un quart d'heure. Les calculatrices doivent être éteintes, et rangées dans les cartables.

 

La période des examens étant à présent derrière nous, on ne va pas vous laisser transpirer sur la question. La réponse est simple : 1) on dégrossit en filtrant par genres 2) on écoute les 1/2/3 premiers morceaux des albums retenus... Et si on sent que « 'y a moyen » et que la liste des chroniques en attente ne ressemble pas trop à la file indienne devant un Apple Store un jour de sortie d'iPhone 69, on clique mentalement sur le lien « Pouce en l'air ».

 

Epoch of Unlight – inconnu de mes services de renseignement il y a encore peu – n'a eu aucun mal à franchir les étapes ci-avant décrites. Car lorsqu'on lance At War with the Multiverse, on se prend en pleine poire le rugissement « The Anthropocene », deux grosses minutes d'un sprint impétueux lors duquel un At The Gates sous stéroïdes course on ne sait qui, mais on n'aimerait pas être à sa place étant donné à quel point les lèvres sont retroussées, les narines dilatées, les yeux hallucinés, et les poings serrés ! C'est hyper carré, c'est mélodique aussi (on a failli ne pas s'en rendre compte !), mais toutes les savantes subtilités – réelles – du morceau sont livrées dans un grand torrent impatient de décibels, de double pédale et de growl, droit dans la gueule.

 

… Et c'est diablement bon !

 

Oui mais... Et si les Américains (ils viennent de Memphis, Tennessee, pas loin du Pierre et Vacances où Eddy Mitchell prend une loc' à l'année) étaient du genre lapins, à tout donner lors d'une étreinte-éclair aussi puissante que brève ? Allez zou Messieurs, que cachez-vous donc sur cette piste #2 ? Pan-Pan-Pan dans la tronche dès l'entame de « The Numbing Stillness » : Epoch of Unlight n'est pas du genre à s'arrêter au stand pour changer les pneus ou les bougies : 'faut que ça dépote, 'faut pas se laisser doubler dans les virages ! Pour autant la mélodie et les accroches sont non négociables – mais attention hein, jamais en mode roudoudou, pause-détente en slip sur fourrure de rhinocéros laineux aux côtés de Gudrun : ces ingrédients sont servis brûlants, comme le Baileys dans le B-52.

 

Mais extirpons un instant nos arpions du flot houleux de ce 4e album pour s'offrir un regard panoramique sur la carrière des gugusses. Si, sans tenter d'en savoir plus avant, vous décidez d'affronter les 42 minutes que dure ce déluge de baffes, vous risquez d'être étonnés d'apprendre que, loin d'être un fougueux représentant de la génération Z, cela fait bientôt 30 ans que Tino LoSicco – batteur et seul rescapé du line up original – essaie de faire croire aux oreilles téméraires qu'Epoch of Unlight est scandinave. En voilà encore un qui doit marcher à la Wonder ! Derrière ses allures de gros coup de bambou asséné par un colosse à longs cheveux blonds, At War with the Multiverse est en fait un quatrième album pointant le bout de son artwork 17 ans après son prédécesseur. Et pour ceux qui auraient déjà croisé les loustics par le passé, préparez-vous à un changement, car la dimension Black Metal a quasiment disparu, à l'exception de quelques traces sur les plus Death/Black des titres de l'album, comme « Wrath of the Cryomancer » et « An Amaranthine Line ». Car à présent les Américains se sont complètement recentrés sur un Death Metal viril, boosté au Thrash, veiné de majestueux élans épiques, et – l'info avait déjà fuité plus haut dans ce papier – largement imprégné de mélodie. On navigue donc entre un At The Gates musculeux, Dimension Zero, The Crown quand la couronne devient plus Rock'n'Roll, et, quand l'envie de sortir l'épée se fait sentir, un Amon Amarth en danseuse dans les descentes.

 

Bref, ça sent la sueur, le front haut affrontant les éléments déchaînés, la bravitude, la mâlitude et la vélocitude.

 

Quelques esprits chagrins vont néanmoins sans doute y aller d'un « Oui, j'ai pris bonnes notes de votre acuité technique et de votre efficacité à toute épreuve, mais qu'est-ce qui vous différencie fondamentalement des autres mercenaires de votre espèce – qui, pour la plupart, ont été élevés au knäckelbröd et pas au pain à burger ? ». Parce que c'est vrai que ce n'est pas un excès de personnalité qui risque d'étouffer nos amis. Mais d'habitude, sur ces nombreux albums génériques que des décennies de riffs létaux ont déposé entre nos oreilles, on finit par tomber sur un mid tempo paresseux, sur une sucrerie coupable, et arrivé aux deux tiers – quand ce n'est pas bien avant – on finit par avoir du mal à réprimer un bâillement, ainsi que des pensées parasites du genre « Est-ce qu'il reste assez d'huile d'olive pour ce week-end ? » ou « Merde : c'est cette année le contrôle technique ! ». Or, sur At War with the Multiverse, ce n'est jamais le cas. Les Américains réussissent à nous tenir en haleine tout du long. Et l'excitation reste présente jusque sur les tous derniers morceaux, « Night Hunt » et « All Light Dies », respectivement en position #8 et #9 de la tracklist, ceux-ci étant parmi les tous meilleurs de la galette.

 

Alors si vous ressentez l'envie de prolonger les bonnes vibes nées à l'écoute du récent Monokrator de The Bleeding, avec toutefois un petit supplément de mélodie – oh à peine hein, et jamais plus haut que le bord – on ne peut que vous exhorter à partir vous aussi en croisade contre ce Multiverse qui nous est ici vendu avec des arguments bien plus convainquants que lorsque c'est cette pauvre endive fade de Zuckerberg qui s'en charge.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: At War with the Multiverse ne vous promet pas une réalité virtuelle à 4 sesterces pleine de publicités et de bugs, mais 42 minutes d'un Death boosté au Thrash aussi viril que mélodique, le genre made in Scandinavia (bien qu'Epoch of Unlight soit américain) mais sans la couche inutile de marshmallow, qui appuie aussi peu sur le frein qu'il lasse. Un plaisir simple mais à l'homogénéité qualitative pas si courante que cela, quelque-part entre At The Gates, Dimension Zero, The Crown et – allez – un Amon Amarth tout vénère.

photo de Cglaume
le 22/09/2023

6 COMMENTAIRES

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 22/09/2023 à 10:13:11

ça fait pousser les poils sur le pack de 6 ça !

AdicTo

AdicTo le 22/09/2023 à 10:45:45

Mais j’vais même finir la semaine motivé :)

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 22/09/2023 à 16:52:55

J'y reviens : ça envoie du platane oui mais le son manque absolument et cruellement de chaleur et d'impact. C'est désespérément sans relief. Clinique. Sur l'intro de The Möbius Path, c'est flagrant. Ou comment niquer un album prometteur avec un producteur (pote/cousine/voisin/belle mère) de moins de 50 ans qui pige que dalle à la puissance de ce qu'il met dans la boite. Du gâchis, donc.

cglaume

cglaume le 22/09/2023 à 22:04:00

Comment ça ? Mais le son est vachement moins clinique que celui de Kim Dracula pourtant !!

😅 (comment ça « n’en rajoute pas » ?) 😁

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 23/09/2023 à 12:50:24

Suis trop vieux pour ces conneries.

Epoch of Unlight

Epoch of Unlight le 26/09/2023 à 02:51:08

🤘

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