Gorguts - Colored Sands
Chronique CD album (01:02:55)

- Style
Death Metal technique - Label(s)
Season of mIst - Date de sortie
3 septembre 2013 - écouter via bandcamp
Enfin le voilà le nouveau brûlot des canadiens de Gorguts ! Plus de 10 ans après l'excellent From Wisdom To Hate, digne successeur d'un Obscura virevoltant avec un death metal plus technique et avant-gardiste que jamais, on attendait beaucoup du combo de Luc Lemay. Suite à un changement de line-up aussi drastique que nécessaire pour une renaissance du groupe, Gorguts se transforme en un all-star band de la branlette musicale extreme, voyez plutôt: John Longtreth (Origin), Colin Marston (Dysrhythmia, Behold The Arctopus) et enfin Kevin Hufnagel (Dysrhythmia lui aussi). Tout ça pourrait sembler bien présomptueux que de s'acoquiner de si talentueux musiciens, Gorguts n'a-t-il pas perdu quelques plumes après toutes années ? La verve guitaristique de son frontman saura-t-elle nous surprendre et nous faire frémir à nouveau ?
La réponse ne se fait pas attendre, le riffing tortueux de Luc Lemay est toujours de mise, et parfaitement suivit autant par la base rythmique que par la seconde guitare. La densité typique des compositions de Gorguts - qui a fait tant d'émules depuis (Ulcerate et Deathspell Omega en tête) - nous met toujours autant la tête en quatre. Les riffs rapides sont d'une complexité et d'une richesse exemplaire et sont extrêmement bien complétés par leur nouveau virtuose de la basse à 1000 cordes. L'addition des deux membres de Dysrhythmia permet également de développer un aspect mélodique aussi subtile que précieux dans cet amas de notes fulgurantes. Ces parties aèrent considérablement le travail de composition du groupe, non pas en séparant de façon drastique les parties rapides des parties calmes, mais en donnant une profondeur et une cohérence aux structures des morceaux.
Les mids-tempos ne sont pas en reste avec de bons morceaux mettant l'accent sur la lourdeur du riffing de Lemay et les gracieux arrangements mélodiques de son comparse ("An Ocean Of Wisdom"). En mode rouleau compresseur le groupe se défend également plutôt bien, sur la fin de "Forgotten Arrow" ils mettent à mal des beat-down que peu de groupes de death metal sauraient rendre aussi puissants. Une ambiance de fournaise rappelant ce que développe les excellents Immolation par exemple, mais cependant dans un registre moins feutré. Quoi que... La prod est relativement classe, je m'attendais à une batterie complètement ratée, à un chant trop en avant, et peut-être à des cordes potables compte tenu de la qualité du son des nouveaux membres. Le groupe à donc plutôt bien géré son affaire avec un équilibre certain entre tous les instruments, rien ne me semble envahissant (même la double, c'est dire l'exploit !) et une ambiance se dégage rien que sur le grain des guitares dont toutes les subtilités de jeu ressortent parfaitement. La basse de Marston ne fait pas défaut non plus et sonne assez fidèlement à son timbre habituel (très caractérisé pourtant) mais se marie bien avec le reste sans prendre le pas sur tout le reste (ce qui aurait put être insupportable). Globalement rien à redire là dessus, et sur rien d'autre non plus finalement. Même la pochette est plutôt cool pour une sortie Season Of Mist qui nous ont habitué à des trucs parfois plus piquant visuellement. En fait l'album ne souffre d'aucuns défauts particuliers, il reste entier et inspiré. On à même le droit à une interlude épique ("The Battle Of Chamdo") séparant l'album en deux parties, et aérant une fois de plus l'écoute avant de replonger dans des méandres guitaristiques et de blast-beats de folie. La seconde moitié de l'album étant plus marqué musicalement par les membres de Dysrhythmia que part Lemay ouvre de nouvelles portes à l’esthétique du groupe. "Enemies Of Compassion" qui est peut-être le titre le plus chaotique et fermé de l'album, mettant beaucoup de temps à s'apaiser et à trouver un rythme plus serein mais bref jusqu’à son solo déroutant (et cette fin de morceau super balèze). On notera d'ailleurs les solos très bien amenés de ce Colored Sands, assez ponctuels et bien sentis, jamais de trop et n'envahissant jamais l'espace des compositions. On met un certain temps avant d'arriver au bout de cet album qui se termine abruptement, nous laissant un peu en plan je dois dire. Cette impression est assez étrange, et m'a rappelé des impressions de films dont la densité (ou l'aération ceci dit) nous pèse tout au long du film, qui une fois arrivé à son terme, nous coupe net l'herbe sous le pied. Comme si l'effort de concentration et d'attention produit tout au long de son déroulement n'était pas récompensé mais nous laissait l'impression de rester sur notre faim après nous avoir complètement gavé, saturé, rassasié.
L'épaisseur d'un tel disque est autant un atout qu'un frein à son écoute, comme tous ceux du genre, la nuance entre mal de crâne et pur génie est parfois maigre. Si la patte Gorguts est toujours reconnaissable, elle s'est enrichie de la musicalité de ses nouveau membres, ("Ember's Voice" par exemple, étonnamment le plus Dysrhythmiesque et le plus Morbid Angelien des titres de cet album) apportant ainsi la respiration nécessaire pour que ce disque tienne dans le temps. Sans défauts apparents, ce Colored Sands s'inscrit avec facilité dans la lignée de ses prédécesseurs et ne souffre aucunement de son statut "album du retour". La raison en est fort simple, Luc Lemay et ses nouveaux acolytes savent écrire des putains de bons morceaux et ont réussi un beau tour de force en renouvelant leur élan de création sans pour autant changer radicalement de crémerie (comme l'avait fait Morbid Angel sur Illud Divinum Insanus). A groupe culte album culte ? L'avenir le dira, mais ce nouveau brûlots du géant canadien seul rescapé (artistiquement du moins) de la scène du Québec (Augury, Negativa, Cryptopsy, Quo Vadis, Neuraxis etc s'étant tous plus ou moins ramassés la tronche) nous prouve que Gorguts est toujours un fleuron de technicité et d'inventivité dans ce milieu qui se mord souvent la queue. Respect.
3 COMMENTAIRES
Matt666 le 12/09/2013 à 14:59:59
Quelle tuerie ce disque bordel !
Domain-Of-Death le 07/11/2013 à 09:35:48
Album de folie! Dur à encaisser comme tu dis mais c'est putain de bon par où ça passe ;)
francoisville le 15/08/2015 à 07:37:37
Une musique réfléchie et pourtant très organique. Du génie et une personnalité unique.
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