HourHouse - Gold Tooth Guru

Chronique CD album (35:33)

chronique HourHouse - Gold Tooth Guru

Si vous êtes un fin connaisseur de la scène Trap Metal, ou un fan de Ho99o9 et Dälek, vous allez sans doute dire à raison que je suis grave à la ramasse. Si vous êtes Cromy, vous allez me conseiller d’aller écouter City Morgue, et de ne pas oublier non plus Kravo Boca. Mais si, comme moi, vous êtes juste un vieux nostalgique qui court après le souvenir des 90s, vous serez d’accord pour reconnaître qu’en matière de Rap Metal, hormis les sorties plus ou moins régulières de Body Count, on n’a plus grand-chose de consistant à se mettre dans l’oreille. Alors si, c’est vrai : les derniers Hacktivist et Nova Twin ont été à deux doigts de nous soutirer un vrai petit Rhaa Lovely des familles. Mais dans l'absolu, rien qui fasse vraiment trembler les fondations du genre. Pas grand-chose de transcendant non plus du côté de Boom Dox. Quant aux « gros » espoirs de la scène, aïe aïe aïe… Ils sont censés s'appeler Fever 333 (« Hahaha », comme on dit quand on ne souhaite pas faire de plus amples commentaires…) et Hyro The Hero (qui nous aura bien eu avec l’EP Worst Behavior avant de montrer son vrai visage sur Bound For Glory).

 

On a déjà vu espoirs mieux placés.

… Ah ils sont loin les jours glorieux des Clawfinger, Rage Against The Machine et autres Stuck Mojo !

 

À présent je vous propose une expérience : mettez-vous dans la peau d’un gugusse qui rumine les pensées ci-dessus, et envoyez-vous les 3 premières pistes de Gold Tooth Guru

 

Vous avez déjà vu à quoi ressemble The Mask quand son petit cœur est transi ?

Eh bien même chose de ce côté-ci du clavier !

 

#1/ La montée en pression commence avec « The Sit Down », « bête intro » à mi-chemin entre la scène où Lucy Liu dessoude du yakuza dans Kill Bill, et « Smoked Pork », la cultissime entrée en matière de Body Count.

     → 'y a pas à dire, ça titille la corde sensible ! On se dit que pour annoncer une grosse rouste et des molaires qui volent, on ferait difficilement mieux que cette flinguerie crapuleuse.

 

#2/ Mais les choses sérieuses commencent vraiment sur le morceau-titre. Sirènes façon état d’urgence (on reste dans le registre B.C., oui oui). Guitares de 20 étages de haut, tout en béton et en acier. Agression urbaine métissée, soufflant tantôt un flow gangsta teigneux, tantôt des rugissements Metalcore excédés. Le tout servi dans une prod’ toute en brûlante saturation, ce fil de fer barbelé sonore enrobant les riffs saccadés et les cordes vocales éraillées comme un terrain vague miné.

     →Putain c’est fat ! C’est la guerre dans le ghetto blaster ! Oublié le Gangsta Djent gentillet d’Hacktivist : bienvenue dans la Guérilla Rapcore à la vie à la mort !

 

#3/ Mais la deuxième lame ne faisait que redresser le poil. C’est « Bodybag Musik » qui se charge d’effectivement couper à ras. Notamment via un riff éclaboussant de douilles les environs, tandis que la sulfateuse redessine le paysage urbain façon Mad Max.

     →Stop c’est bon, j’achète ! 9/10, direct’ : je vous fais une confiance aveugle, les gars !

 

« ... Observez bien, Mesdames & Messieurs : c’est ici le point de bascule. La pomme dans laquelle il ne fallait pas mordre. Notre protagoniste plane pour quelques minutes encore tout en haut de l'Olympe du kiff... Plus dure sera la chute ! »

 

En effet, dès « LSD » le contrat de confiance qui venait d’être signé avec HourHouse se voit violemment foulé aux pieds. Et cette rupture d'idylle naissant de se voir confirmée de plus en plus irrémédiablement au fur et à mesure que les pistes défilent – « 965Cutthroat » constituant l’unique exception notable à cette douloureuse désillusion.

 

Sur le « LSD » en question, tout semble d’abord bien commencer, en mode Violent Rap / Djent in-yar-face. Mais rapidement un ver s'extirpe de la pomme, juste avant la barre de la minute, celui-ci prenant la forme d'une mélodie Teen-Pop bien trop radio-ïsable pour traîner à cette heure tardive en plein milieu d’une jungle urbaine qu’on nous décrivait comme pleine de dangereux caïds. D’autant que cette fois, si l’enveloppe est toujours aussi rugueuse et inhospitalière, elle n’accroche plus guère l'auditeur, la compo s’avérant vite un peu creuse en dedans. Et sur « Instinct », le ver en question se révèle bien plus gros que prévu. En effet, le boa qui nous jaillit alors au visage a engraissé en se nourrissant d'une zic aussi catastrophique que sirupeuse déroulant tous les clichés du bad boy lover dont même un Linkin Park ne voudrait pas. Ça sent le vieux reste de big mac abandonné dans un couloir de centre-commercial, la trahison artisitique ado-friendly… la schizophrénie musicale caractérisée, même.

 

Comment peut-on ainsi jouer pendant 10 petites minutes les gros psychos déglingos, puis balancer ensuite de la gelée tout juste pubère que même un Hanouna peinerait à refourguer à son troupeau décérébré « en mal de sensations fortes » ??

 

Cela ne vaut pas la peine de détailler plus avant l’étendue du massacre qui suit. Sachez juste, histoire de charger un peu plus la barque, qu’on croit sentir par moments la présence d’un vocodeur pas vraiment assumé. Que les teeneries insupportables deviennent la norme quasiment jusqu’au bout. Et que – après tout, pourquoi ne pas boire la coupe merdeuse jusqu’à la lie ? – sur « Ride » le groupe abandonne toute dignité pour verser dans une sorte de Rap Lounge baignant dans un synthé brumeusement rose, saupoudré de « Babe, mmmhm… » caractéristiques du DJ qui croit à tort que ses initiales signifient Don Juan, et finissant les yeux fermés dans une ambiance que les magasins Sephora et Pimkie ne renieraient certainement pas…

 

Est-il bien utile de conclure ?

 

Allez, oui, histoire de vous donner les quelques infos biographiques que, dégoûté, je n’ai même pas eu la présence d’esprit de livrer en début de papier. Alors voilà : HourHouse est une jeune formation issue des quartiers chauds de New Orleans. Et Gold Tooth Guru est son premier album. Mieux vaut terminer sur ces quelques informations factuelles : cela évitera de tenir des propos que la violente désillusion causée par ce coitus pas seulement interruptus, mais carrément emasculus, risque de rendre inutilement insultants.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte : le temps de ses trois premières pistes – pour un peu plus de 7 minutes – Gold Tooth Guru réussit véritablement à nous convaincre qu’il constitue la révolution explosive qui va replacer le Rap Metal tout en haut de la chaîne alimentaire musicale. Arrivent alors les dix morceaux suivants... Qui s'avèrent autant de street cred’ killers mettant en charpie nos espoirs, ceci dans un désolant carnage radio-ado-triso tellement décevant qu’on espère encore parfois l’avoir seulement rêvé…

photo de Cglaume
le 27/01/2024

2 COMMENTAIRES

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 27/01/2024 à 11:32:33

Stuck Mojo rules.

Pingouins

Pingouins le 28/01/2024 à 08:24:19

Artwork bien placé dans le top des mochettes 2023 👌

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