Mordred - Volition

Chronique CD album (16:09)

chronique Mordred - Volition

Oui, oui, c’est vrai, allez-y, vous avez le droit: « C’est quoi ce soi-disant fan de Fusion qui n’a pas chroniqué la moindre sortie de Mordred sur CoreAndCo? ». Fool’s Game, In This Life, Vision, The Next Room: ils mériteraient tous une chro rétro en ces pages. Et ça arrivera un jour (… tant d’albums et de si petites épaules: pourquoi ne m’as-tu pas fait grizzli plutôt que lapin Môman?). « Downtown », « Shut », « Falling Away »: autant de morceaux qui ont fait bouillonner la testostérone du lycéen que j’étais et qui font toujours de même avec le vieux chroniqueur que je suis devenu…

 

Mais commençons par expliquer à la génération TikTok – ainsi qu’aux anciens qui n’ont pas tenté l’aventure quand ils ont croisé le nom du groupe – de-quoi-ça-s’agit… Mordred est l’un des tout premiers groupes à l’origine du mouvement qu’on appelle ici Fusion, mais que les Anglo-saxons connaissent plutôt sous les termes de Crossover / Funk Metal / Rap Metal / Shorts, Skate & Sun glasses Californian Metal. Utilisant des guitares qui se chauffent du même bois Thrash que leurs collègues de Death Angel ou Testament, les p’tits gars de Frisco ont une conception du Metal qui s’avère beaucoup plus ouverte sur les autres genres que celle du patché moyen. Ainsi utiliser un flow Rap, faire claquer des doigts sur un groove à la James Brown ou – attention, le groupe a quasi déposé la trademark – incorporer en ses rangs un DJ qui scratche sa platine comme un Daddy K (mais vous êtes fou?) ne leur fait pas peur. Bien au contraire: c’est carrément leur kiff. Pendant les 80s, en diffusant largement les clips de Faith No More, Infectious Grooves, Mordred et bien d’autres, MTV a contribué à faire émerger un mouvement qui a enfin mis du fun, du soleil et des popotins qui se trémoussent dans le quotidien du métalleux. Malheureusement cette scène a fait Pshiiiiit au bout de quelques années, et Mordred n’a jamais donné de suite à The Next Room, son album de 1994.

 

« … n’AVAIT jamais donné suite » plutôt. Jusqu’à aujourd’hui. Car – non? si! – les bougres sont de retour! En fait si l'on regarde bien ils se sont reformés brièvement en 2001, puis ont re-arrêté, se sont refaits une passe de j’y-vais-j’y-vais-pas, puis ont fini par sortir en 2015 le single « The Baroness ». On y croyait alors, dur comme fer. Sauf que rien de vraiment concret n’a suivi… Mais patience est mère de Sœur T (la sista de Mr T, bien sûr), comme on dit. Et 5 ans plus tard arrive enfin une vraie sortie dodue: Volition, l’EP qui nous occupe aujourd’hui. Celui-ci n’était d’ailleurs par vraiment prévu à la base. C’est juste que le groupe a composé pour l’album à venir – The Dark Parade – plus que ce qu’un 33 tours ne peut décemment contenir. D’où ce package 4 titres, ce clown grotesque en costard, et ce vol icheune.

 

Approche du riffing inchangée, scratch dès les premières secondes, tortillons saccadés, production proche des standards d’époque mais sans forcer sur les toiles d’araignée: « Not For You » accueille le fan de manière rassurante, dans un décor qu’il connait et aime. Alors c'est sûr, ouille!: le premier contact avec le chant du Scott Holderby de 2020 est un peu dur… Mais avec le temps on s’y fait. D’autant que le morceau coule tout seul, rythmé par quelques interventions télégraphiques, égratignant au passage un rêve américain bien abîmé par quelques années d'extrême trumpification. A ce stade, pas de grosse surprise, ni bonne ni mauvaise, si ce n’est ce chant un peu chcrougnougnouff… Puis arrive le premier choc avec « What Are We Coming To ». Finis les riffs de skateurs, bienvenue aux casquettes de rappeurs. Et plus que de simple Hip-Hop, c’est de Trap dont il s’agit ici. Boucle mélodique rampante, BAR du pauvre, ambiance bien dark, un bon vieux flow à la Ice T… Et – moins bonne idée – un Scott qui n’hésite pas à vocoder ses interventions, transformant une expérimentation tout à fait acceptable (surtout sur un EP) en une séance mi-contentement, mi-grincements de dents. Honnêtement ils risquent de se faire casser du sucre sur le doc avec un tel titre, alors qu’il y aurait de quoi plaire aux fans du « Carnivore » de Body Count (dans une version cependant démétalisée).

 

On retourne dans du Mordred classique avec « Love Money ». Sauf que, problème: le titre ne casse pas des briques. Mais alors vraiment pas du tout. Les samples éparpillés sur le morceau ont la finesse de ceux utilisés sur le « Born Dead » de Body Count (encore lui). Quelques transitions à la batterie sentent le Bof avec un B majuscule. L’accroche est quasi-inexistante… On n’y croit pas. Et on en profite pour se rendre compte que le son est vraiment pas dingo, tout plat, avec un mix en-dessous de la moyenne. Finalement c’est le punchy « The Baroness » qui s’en sort le mieux, le morceau assurant une rythmique vigoureuse et dynamisante tout du long de ses 3 minutes 14, utilisant le scratch à bon escient, et proposant une montée mélodico-rappée du plus bel effet sur le refrain.

 

Cette chro-dissection ne fait pas de mystère: l’EP du retour de Mordred est un peu tiédasse. A vrai dire on aurait même un petit arrière-goût amer en fond de bouche… Amertume qui perdurerait si l’on n’avait pas eu la chance de pouvoir écouter The Dark Parade, l’album qui arrive derrière à grands pas. Et lui est bien plus solide. On réécoutera quand même ce 4 titres pour « The Baroness » (j’avoue n’avoir pas trop écouté le titre lors de sa sortie en version single)… et dans une moindre mesure pour « Not For You » et « What Are We Coming To » – dont on aimerait une version sans vocodeur et avec une vraie batterie plutôt que cette BAR anémique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: soyons honnêtes, si on résume le retour de Mordred à Volition, le résultat n’est pas hyper brillant. Un titre est vraiment médiocre (« Love Money »), le morceau expé’ (« What Are We Coming To ») est gâché par l’utilisation d’un vocodeur crispant, et le meilleur titre est déjà sorti en single (« The Baroness »). N’empêche, ça fait plaisir de retrouver les gugusses. Et surtout: l’album à venir, lui, est vraiment pas mal du tout. On en reparle bientôt!

 

photo de Cglaume
le 03/08/2020

1 COMMENTAIRE

Eric D-Toorop

Eric D-Toorop le 21/08/2020 à 12:44:46

Etre et avoir été...

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